Mon étrange bad boy: Tome 2

Chapitre 2

Louna

— Tu es ravissante ce soir, Louna, dit Jared en humant la fraîcheur de l'air qui s'écrase sur nos visages.

Les mains dans les poches et le regard au sol, Jared a l'air tendu et calme à la fois. La tension est palpable, et pourtant je suis heureuse qu'il soit ici.

Entre le tintement de mes talons sur l'asphalte humide de la rue et le bruit des cailloux se cognant contre les chaussures de mon nouveau cavalier de ce soir, personne n'ose parler. Enfin, sauf le compliment qu'il vient de me faire. Il a sûrement dû prendre tout son courage pour arriver à prononcer ces six petits mots pourtant si simples.

— Merci beaucoup... le remercié-je en replaçant une mèche de mes cheveux derrière mon oreille et en me perdant dans ses magnifiques yeux bleus. T'es parfait aussi. Je veux dire, t'es très beau, toi aussi...

Je me retourne vivement pour continuer de marcher en me mordant furieusement la lèvre, frustrée de ce comportement minable. Jared rit dans mon dos et ne bouge pas, mais arrive tout de même à effleurer ma main du bout de ses doigts, ce qui m'oblige à m'arrêter. Pas que je n'aurais pas été capable de continuer, c'est seulement le contact de sa peau avec la mienne... Elle m'avait tant manqué que maintenant, ça me fait tout drôle lorsqu'il me touche.

Je me retourne doucement, surprise, alors qu'il tient toujours sa main gauche dans sa poche, ce qui relève le coin de son costard.

Dieu du ciel... Pourquoi est-il si beau?

Mes yeux parcourent tranquillement le trajet de ses lèvres, le contour de ses traits, ainsi que le bleu de ses yeux, celui qui me manquait pour avoir un arc-en-ciel parfait. Sa bouche forme un faible sourire, presque imperceptible, alors que ses doigts continuent de caresser ma main. Son pouce effleure ma paume, alors qu'il recouvre le reste avec la sienne.

Je baisse les yeux, honteuse de ce que j'ai osé lui faire avant qu'il ne choisisse de partir. Une larme perle le long de ma joue, qu'il essuie avec le pouce de la main qu'il vient d'enlever de sa poche. D'un seul geste, il relève mon menton et plonge son regard dans le mien, me rendant encore plus vulnérable, soumise à ses yeux océans. Une lueur brille à l'intérieur. Je ne saurais dire ce qu'elle représente, mais elle me réchauffe le cœur. Je me sens belle, forte, et heureuse, sous son regard insistant. Ce que je n'étais pas, lorsqu'il se trouvait loin de moi. Il me complète, tout simplement.

Je ferme les yeux, profitant de cet instant, et manque poser un doigt sur ses lèvres lorsque je l'entends me parler.

— Tu sais que je vais devoir repartir, pas vrai ? dit-il d'un ton désolé.

J'ouvre délicatement les yeux, refusant de me rendre à l'évidence que sa vie ici est passée, et qu'il sera bientôt temps pour lui de rentrer.

— Shh... Ne gâche pas ce moment, Jared. Je t'en supplie... Seulement pour une fois... le supplié-je.

Il m'observe un instant, l'air surpris, avant de prendre ma tête entre ses mains et de déposer un infime baiser sur mon front. Un frisson parcourt tout mon corps alors que je pose mes mains sur le torse de celui que j'aime, me laissant aller à cette douce attention.

Pourquoi a-t-il dit ça ? Je refuse de le laisser repartir ! Il ne peut pas... Pas encore une fois...

Il me prend dans ses bras et me serre contre lui pendant que je prends une grande inspiration et passe mes bras autour de son ventre. Sa tête se pose sur le dessus de mon crâne, et pour la première fois depuis un an, je me sens bien. Je me sens en parfaite sécurité...

— Pourquoi repartir ? chuchoté-je, la voix enrouée. Tu pourrais rester... Tu n'as pas besoin de retourner à cinq mille kilomètres d'ici, Jared...

Cinq mille kilomètres de moi...

Il inspire et me caresse doucement les cheveux, alors que je verse quelques larmes sur le tissu noir qui recouvre son épaule.

— Ma vie est dans le New Jersey, Louna... Je dois repartir... répond-t-il, désolé.

Un grand silence recouvre le parc dans lequel Jared et moi nous sommes rendus pour nous éloigner des autres.

— Et la lettre ? répliqué-je en y repensant soudainement. Ce que tu m'as dit dans cette lettre... Étais-tu sincère? Ou est-ce que c'était encore de la foutaise ? Une simple lettre, comme ça, sans importance ?

Il est étonné de ma question, ça se voit. Il relève doucement la tête et me regarde un instant avant de détourner les yeux et de prendre une grande inspiration.

— Le temps a passé, Louna... J'étais sincère dans cette lettre. J'étais vraiment fou de toi, c'était même ce qui m'empêchait de dormir la nuit. J'ai été longtemps à t'attendre, mais je suis le genre de mec qui ne s'apitoie jamais longtemps sur son sort. J'apprends à vivre avec les erreurs que j'ai commises, et le mal que j'ai fait. Je ressens toujours quelque chose pour toi, c'est vrai. Mais, à l'encontre d'autre fois, aujourd'hui je ne suis plus prêt à tout abandonner pour toi. J'ai fait des choix que je n'aurais jamais dû faire. J'ai repris une vie que, finalement, je n'aurais jamais dû quitter, car ça nous a fait mal à tous les deux. Et je suis désolé que tu en souffres encore. Mais je ne peux pas... Je suis désolé, Louna... dit-il en effleurant ma joue du bout de ses doigts.

Et moi, comme une vraie débile, je me mets à pleurer. Pas que de petites larmes, non. De vrais sanglots, pur et dur. Jamais une déclaration ne m'a fait aussi mal. Et même si je sais que c'était réel, que tout ce que nous avons vécu a été sincère, je ne peux que me dire que maintenant, à cause de moi, tout est fini. Il m'a oubliée, il a repris ses petits habitudes et ne se soucie plus de ce que je ressens. Même s'il est désolé, il partira quand même, me laissant une seconde fois avec ma peine.

— Pourquoi es-tu ici... soufflé-je à faible voix.

— Quoi ? dit-il en essuyant une innombrable larme sous mes yeux.

— Pourquoi es-tu ici, alors !? répété-je avec une pointe de colère bien cachée dans ma voix.

— J'ai... Frank m'a proposé de venir travailler pour lui encore cet été. Je n'étais pas partant au départ, parce que j'avais peur de te recroiser... Mais j'ai reçu un message d'un numéro inconnu disant que tu n'allais vraiment pas bien, et que j'étais le seul à pouvoir t'aider... Alors je me suis dit... Pourquoi pas. Tant qu'à revenir, j'irai. Je me devais de te dire la vérité sur ce que je ressens maintenant.

Je relève les yeux et le regarde un instant, médusée.

Alors s'il est revenu, c'est seulement parce que quelqu'un lui a demandé et pour accepter le travail de Frank ?! Et puis, qui a bien pu lui demander un truc pareil ?

Je pourrais tout lui avouer sur le fait que je suis elle. Que je suis Ella. Mais ce serait tricher. Ce serait égoïste de profiter de ce fait uniquement parce que je veux qu'il reste avec moi. S'il ne m'aime plus comme je suis maintenant, alors je préfère qu'il me quitte plutôt qu'il ne reste pour une fille qu'il a connu il y a plus de treize ans.

— Va-t'en, lui ordonné-je sèchement.

Je me détache brusquement de ses bras, ferme les yeux et laisse mes larmes dévaler sur mes pommettes rougies.

Il fait un pas en avant et tente de me resserrer contre lui, mais je lève le bras et pose ma paume devant pour lui faire comprendre qu'il ne doit pas me toucher.

Toujours les yeux fermés, j'ose prononcer des mots que jamais je n'aurais pensé sortir de ma bouche un jour.



— S'il te plaît Jared, va-t'en... dis-je en tentant de ne pas relever les yeux. Pars et ne reviens pas. Je ne veux plus te voir. Je ne veux pas que tu me prennes en pitié, juste... pars.



Ma voix est tremblante et enrouée, mais je suis déterminée à garder les yeux fermés. Je ne dois pas le regarder. Si je pose mes yeux sur lui, je sais que je n'arriverai pas à supporter de le voir me tourner le dos. Je préfère qu'il s'en aille de ce parc pendant que je suis plongée dans le noir plutôt que de devoir observer le moindre de ses pas.

Ça fait trop mal.

Et pourtant, on me l'avait souvent dit. Je me l'étais souvent dit.

Je ne devais pas tomber amoureuse, je savais que ça allait me détruire, et pourtant j'ai laissé ce mec entrer dans ma vie, puis dans mon cœur. Chose que j'aurais dû lui laisser fermée.

Voilà ce que ça a donné. C'est le résultat d'avoir été faible, juste une fois.