Chapitre 6 : Lucas

18 1 0
                                    

   Lucas... Quand je repense à lui, mon cœur se serre, je retiens ma respiration.   Il me manque. Aujourd'hui comme demain, et comme tous les jours qui ont précédés ceux-ci. En rentrant du travail, j'ai posé mes clés sur le meuble de l'entrée, j'ai envoyé valser mes chaussures à l'autre bout du salon, et j'ai ouvert le tiroir de ma table de nuit. Sous un fouillis sans nom, une petite boîte en velours pourpre me regardait d'un air de défi. Vas-y, ouvre-moi Lou... Incapable de résister à la tentation, je pris délicatement l'écrin dans mes mains, et j'en soulevais le couvercle du bout des doigts. A l'intérieur se trouvait un bracelet en argent, orné de deux petites fleurs délicates bleu azur. Je posais le bracelet  sur le lit, et soulevait ensuite le fond de la boîte. Une feuille blanche, pliée en quatre, reposait aux côtés d'une plume bleue et d'un coquillage. Au fond, de Lucas, il ne me restait que cela. Un écrin, avec un bracelet, un message et deux bricoles, qui avaient certainement plus de valeurs pour moi que tout le contenu de mon appartement. Mais voilà, Lucas, eh bien... De lui je n'ai plus que le prénom.

   Lucas, objet de tous mes fantasmes d'adolescente, un visage rieur qui hantait mes nuits et même mes journées. Il était grand, enfin d'après moi. Les cheveux bruns, avec des boucles qui lui retombaient devant les yeux, des yeux marrons, mais je les avais tellement regardés que j'aurais pu les décrire avec beaucoup plus d'adjectifs. Un sourire qui s'étalait sur son visage, qui lui faisait une fossette sur la joue droite. Une tâche de naissance dans la nuque, le pli de la bouche... Même après des années il suffit que je ferme les yeux pour revoir parfaitement son visage. Ou peut être que j'imagine juste tout ça et qu'il n'est plus vraiment comme ça.
   Lucas, mon ancien voisin, âgé à l'époque de 16 ans, un an de plus que moi. Il a déménagé pendant mon année de troisième. On était sortis ensemble six mois, si mes souvenirs sont bons. Six mois, ponctués de rires, de disputes, d'un écrin pourpre, d'un adieu trop rapide et inattendu. Je l'ai vu partir, du trottoir d'en face. Il m'a fait un signe de la main, je l'ai regardé dans les yeux, j'ai soutenu son regard le plus longtemps possible, et quand il a disparu au coin de la rue dans le camion de déménagement, je suis rentrée dans ma chambre. Et c'est tout. Au fil des mois, les appels se sont espacés, les messages aussi, et un beau jour, la relation qui s'était terminée en amitié contre leur gré, a totalement disparu. Inconnus l'un pour l'autre.

   Je reposais l'écrin dans le tiroir et accrochais le bracelet a mon poignet. Un jour, peut être... Il était sûrement trop tard. Les années étaient passées. Laissons au passé ce qui appartient au passé. Résignée, je retirais le bracelet et le posais sur une pile de livres. Adieu Lucas.

Notre nous futurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant