Chapitre 2 : entrée dans l'arène

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La rencontre avec le Marcheur de vent avait laissée Nahoma en colère avec les habitants et les autorités de Hautval réunis. S'acquitter au plus vite de sa mission lui semblait le meilleur moyen de retrouver la solitude et la paix à laquelle elle aspirait.

Fait aussi vite que possible, lui avait intimé Amos Kahn, et ce fut cette phrase seule qu'elle autorisa à résonner dans son esprit chemin faisant.

Quand elle entra sur la Gran'place, les générateurs venaient de se mettre en marche et la ville se parait petit à petit de ses lampions de lumière, signe qu'elle était juste à l'heure pour remettre sa missive. Nahoma n'eut qu'à suivre le mouvement de foule qui traversait la place et qui menait au fond de l'amphithéâtre pour approcher de Gabron, le crieur de nouvelles. Il relisait ses notes avant d'avancer au centre de l'estrade quand la jeune fille quitta la file des curieux venus écouter ce qu'il avait à dire.

Message urgent du conseiller Amos Kahn ! Annonça-t-elle de la fosse devant l'estrade.

Il n'en fallait pas plus pour capter l'attention du crieur. Son visage bourru de gros ours s'éclaira sous le coup de la surprise, et ses sourcils broussailleux entamèrent une gigue endiablée alors qu'il s'approchait à pas pesants.

Qu'est-ce qu'il me veut, encore, celui-là... Grommela-t-il avant de tendre la main, avide.

C'pas moi qui vous l'dirais, m'sieur, vous signez là ?

Oui, oui... Allez, file !

Et Naomah ne se fit pas prier pour obéir une fois le message remit et la preuve apportée que Gabron l'avait reçu. Aussi ne le vit-elle pas devenir pâle comme la mort ni pester à mi-voix tandis qu'il en découvrait le contenu. De même, elle ne devait pas entendre le discours qu'il prononça en conséquence, quelques minutes plus tard, et qui rendit l'assemblée effervescente.

Pourtant, elle n'était pas partie bien loin, à peine à une dizaine de mètres, mais c'était suffisant pour l'amener loin de toute cette folie et de cette course aux nouvelles fraîches. Maintenant que sa mission était accomplie, la soirée était à elle, fourmillante de possibilités à en donner le tournis. Naomah irait-elle manger tout de suite ou regarder son ami Malo travailler à la forge ?

L'estomac dans les talons, elle avait fait son choix quand un garçon de son bâtiment l'interpella. Il s'appelait Kefer, n'avait que 12 ans, mais était plutôt dégourdi pour son âge, ce qui était loin d'être le cas de leurs autres colocataires. Tel un navire dans la tempête, il remontait les escaliers de l'amphithéâtre pour rejoindre Nahoma.

On t'a fait une mauvaise blague ? L'accueillit cette dernière en désignant sa tenue atypique.

En plus d'un maquillage qui lui dessinait un grimace triste sur le visage, il portait une toge blanche et une drôle de bestiole sur l'épaule. Après quelques secondes d'observation circonspecte, Naomah en déduisit qu'il s'agissait d'une poupée. Dans l'agitation ambiante, le garçon n'entendit pas la remarque.

- Tu viens pour Gabron ou pour la pièce? Lui demanda-t-il en s'arrêtant une marche en dessous.

Pas peu fière, la nomade désigna Gabron au centre de la scène et prêt à prendre la parole. D'évidence, le garçon venait pour le théâtre.

- J'avais un message pour l'vieux. D'la part d'Amos Kahn.

Voyant le regard de Kefer s'allumer de curiosité, elle ajouta après une seconde de suspens savamment dosé :

- Confidentiel. J'peux rien dire.

Un autre que lui aurait refusé de jouer le jeu de Nahoma mais, et c'était l'une des choses appréciable chez Kefer, il faisait preuve d'une naïveté rafraîchissante et constante.

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