Chapitre I

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La chaleur n'a jamais été synonyme de paix et bonheur, selon moi.

Par un matin particulièrement ensoleillé sur la ville de Miami, située dans l'état diablement chaud qu'est la Floride, j'arpente ses rues bondées de monde, en quête du centre commercial familier depuis multiples années.

Le temps est sec, incomparable aux mois estivaux où la météo s'annonce toujours humide et désagréable. Non qu'une température frôlant les trente-cinq degrés ne me réjouisse plus, de toute manière, en ce premier décembre.

Pour cette année, j'ai pris l'initiative d'orner les murs intérieurs de mon appartement de quelques babioles, en commençant par une poignée de guirlandes lumineuses puis par une dizaine d'autocollants qui prendront place sur la grande baie vitrée. Je suis déjà en possession d'un sapin, mais si petit qu'il en paraît bien trop ridicule. Ma mère semble déçue, à chaque réveillon, lorsque ma famille vient le passer chez moi et que le triste faux arbre, est repoussé lamentablement dans un coin de la pièce principale.

Alors pour ce Noël, j'ai décidé de faire les choses correctement.

Je continue d'avancer sur le goudron noirâtre du trottoir, les pensées encore occupées par mes futurs achats. La circulation est dense mais surtout désastreuse à Miami, je n'ai donc eu pas d'autres choix que de m'aventurer à pieds, en dehors de mon bâtiment. La foule grouille autour de moi, se hâtant de rejoindre le centre-ville, mais je n'accélère pas pour autant mon rythme, gardant un pas confortable. J'ai curieusement la vague sensation qu'un regard tente de percer l'arrière de mon crâne, tant son intensité est forte, mais j'abandonne rapidement mes suspicions afin de me concentrer pleinement sur mon objectif.

À présent, je me retrouve à marcher seul, à l'écart des autres piétons repassés à plusieurs mètres devant ma silhouette.

L'impression étrange est toujours là.

Trop tard. J'ai à peine le temps de me retourner que je me retrouve déjà plaqué contre le sol de béton, émettant un gémissement lorsque mon visage frappe le macadam. Je me débats et hurle tant bien que mal en vain. La poigne de fer m'emprisonne complètement, immobilisant pour de bon mes membres.

- Mais qu'est-ce que vous me voulez, nom d'un chien ?!

Ils sont deux, indubitablement de sexe masculin, et empestent à plein nez la cigarette et l'alcool. Un goût de sang se propage dans ma bouche. Un de ces deux sbires m'a frappé et probablement détruit l'arête nasale. Je grogne de douleur et remue à nouveau lorsqu'ils essaient de me glisser un chiffon entre les dents, pour souhait de me faire taire.

Une atroce senteur s'empare de mes narines, rendant mes paupières lourdes et palpitantes, et ce n'est qu'une question de secondes avant que je ne m'effondre complètement à terre, le poison évident endormant mon organisme.

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J'entrouvre les yeux après ce qu'il me semble être une éternité, entouré d'un espace confiné et sombre, tapissé d'un genre de moquette. Un coffre de voiture. L'automobile tressaute sur une route paraissant déplorable, marquée de divers nids de poule. Je me retrouve ballotté dans tous les sens, couché sur le dos et subissant douloureusement les anomalies du chemin. Le chiffon a disparu mais mes poignets sont liés étroitement par une corde épaisse et râpeuse. Impossible de m'en défaire.

L'engin poursuit sa longue route, cabossée et interminable. Le nez me brûle incessamment, ma blessure toujours à vif. Je n'ai plus aucune notion du temps. Les nerfs à fleur de peau, je tente vainement de garder mon sang froid et compte les minutes qui me séparent de Miami. Sans doute un acte complètement inutile mais je suis épuisé et les nombres m'aident à tenir le coup.

The Enemy's Daughter (Auslly)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant