6 - Le premier et dernier amour.

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Après m'être concentrée sur la mer, c'est désormais sur la plage que mes yeux se posent.

L'étendue de sable me paraît immense, l'indénombrable nombre de grains blond chauffe ma peau au contact de celle-ci. Le soleil est à son zénith et mon corps brunit à petit feu. À quelques mètres de là, des mouflets construisent innocemment des châteaux et creusent des trous. L'âge insouciant, l'âge où la seule chose qui t'importe vraiment est de savoir si bientôt, tu auras de nouveaux crayons de couleurs encore plus cool que les derniers. Un âge où tu joues à toute sorte de jeux: et ça te rend libre. Incroyablement libre. Libre d'être qui tu veux dans tes mises en scène de lego ou de poupée.

Je réalise que je pourrai être leur mère et que ces années sont loin derrière moi. Que mes sourires purs et naïfs de gosse ont laissé place aux billes d'eau sur mes joues. J'ai tellement vécu dans le passé qu'aucun futur ne m'est envisageable.

J'ai aimé... Oui j'ai aimé. Pendant 6 mois durant ma vingt-sixième années, j'ai donné à un homme tout l'amour que je n'avais jamais eu l'occasion de distribuer. J'étais folle, folle de lui, de ses yeux bruns et ses longs cils, de ses boucles qui bataillaient entre ses dreds, de sa profondeur d'esprit, de l'autodérision dont il faisait preuve pour se créer une bulle en lévitation au dessus de toutes critiques et regards, de sa philosophie et son côté farfelu. Je l'aimais pour ce qu'il était, pour ce qu'il possédait intérieurement. Matériellement, Artème n'avait qu'une chambre de bonne qu'un couple d'extrême droite lui sous-louait illégalement. L'ayant étudié pendant toute sa scolarité en Russie, il causait dans un français plus que correct. fraîchement diplômé dans l'est de l'Europe, en France, il n'était rien d'autre qu'un homme à tout faire exploité par les patrons peu scrupuleux d'un riche hôtel. Une période heureuse... Il était mon réconfort, mon pilier.

J'ai perdu pied une nouvelle fois lorsqu'il s'est délibérément livré aux services de polices dans le but d'être renvoyé dans son pays. Lors d'une de nos traditionnelles soirées cuite du vendredi, il l'avait évoqué en plaisantant. Il l'a pourtant fait, et je ne l'ai plus jamais revu. 6 mois plutôt j'étais au bord du gouffre, il m'a tendu la main, remonté de moitié, puis volontairement lâché. 6 mois plus tard, j'étais en train de croupir au bas de la falaise.

La loi de l'amour se montre plus efficace que ne l'a jamais été la loi de la destruction. (Gandhi)

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