L'espoir

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     14 juillet, 1914

     Ah ! Enfin les vacances ! Je n'ai pas revu Yvette depuis la dernière fois. Je crois que nous commençons à être amis tous les deux ! J'espère qu'elle aussi me considère comme un bon copain, car pour moi, elle est la gentille personne au monde, en dehors de ma famille bien sûr. Enfaite, c'est la seule personne qui veut bien parler avec moi, malgré ma maladie.

     En parlant de maladie, je fais secrètement des petits cours d'apprentissage. J'ai trouvé un livre dans l'armoire de Mathilde qui apprend à parler. Pendant ce temps, je n'arrive qu'à faire les voyelles, mais je considère cela déjà comme un progrès. Je pense qu'Yvette est mon aide. Je pense vraiment qu'elle me tirera de cette maladie. Pourquoi ? Je ne le sais pas, mais je ressens cela. Elle me donne envie d'apprendre à parler. J'ai envie de communiquer avec elle, autrement que par écrit. Elle me donne l'espoir.

     Demain, Maman, Mathilde et moi partons à Paris, pour rendre visite à une amie de Maman. Elle m'a raconté que cette amie, Joséphine, la aidé lors de la disparition de mon père. Joséphine soutenait Maman lors des passages difficiles et c'est pour cela qu'elle lui est très reconnaissante. Pour moi, Joséphine reste une grande dame très gentille et douce. Avec ma sœur, on l'appelle « La dame aux prunes ». Cela peut paraitre bizarre comme surnom, mais Joséphine a dans son jardin un prunier magnifique. Elle en est fière et nous en offre toujours ! Quel délice ! Ses prunes sont si juteuses et fruitées ! J'adore les manger au près d'un étang, l'été, lorsque le vent encore tiède fourmille dans mes cheveux !

     Mais ce n'est pas la seule chose que j'aime chez Joséphine. Même si cela ne la concerne pas vraiment, j'aime prendre le train pour s'y rendre ! La locomotive m'a toujours impressionné ! La fumée qu'elle crache rend l'espace plus... incertain et rêveur. Je crois que ce que je préfère c'est le bruit des roues qui s'emboitent sur les rails. Cette mélodie me berce tranquillement, telles les chansons de Maman. Enfaite, je crois que tous les moyens de transport me passionnent. Quand j'y repense, le bateau de Papa m'intéressait tout autant !

    J'ai fait plusieurs recherches sur les moyens de transports et j'ai découvert un article dans un vieux journal. Il parlait du Titanic, le fameux bateau qui a coulé. C'était dur de le lire, car mes souvenirs de mon père remontaient, mais il le fallait. D'abord parce qu'il était captivant, mais aussi parce qu'il prétendait que des passagers avaient survécus. Cela me perturbait. Est-ce que Maman avait lu ce journal ? Avait-elle cherché si Papa était vivant ? Peut-être l'était-il ? Alors, sans laisser trop de place à ces questions, j'allai voir Maman. Je n'avais pas besoin d'écrire ce que je devais lui dire sur un bout de papier, comme je le faisais avec Yvette. Non, Maman me comprenait la plus part du temps. Je dis bien « la plus part du temps » car quand Maman ne voulait pas me comprendre, elle faisait mine de n'avoir effectivement rien saisis. Enfaite, je pense qu'elle le fait exprès des fois !

     C'est bien ce qu'elle fit cette fois-ci. Je lui fis comprendre mes questions, mais elle me regarda tristement. Elle ne me regardait pas du tout, car elle avait les yeux dans le vide. Ses yeux étaient larmoyants. Elle ne me répondit rien et se détourna de moi, en prétendant devoir impérativement recoudre la robe de Mathilde pour demain. Apparemment, elle ne voulait pas en parler ! Je peux comprendre. Déjà que faire remonter mes douloureux souvenirs me trouble, alors je n'imagine même pas ce que doit ressentir Maman ! Ce n'est pas grave. Je ne vais pas insister plus longtemps. Soudain, quand je voulu abandonner, j'eu une idée merveilleuse ! Demain, j'écrirai une lettre à Yvette en lui expliquant tout. Je questionnerai Joséphine à propos de l'article, car elle, qui était une amie très proche de Maman, elle devrait pouvoir me répondre. Peut-être qu'elle au moins, voudra bien me répondre ?

     Je dois savoir pour mon père. J'y crois. Je crois qu'il a survécu lors du naufrage! Il faut que j'en sache plus. Peut-être, lui aussi pense à moi. Peut-être, il essaye de revenir à la maison, mais c'est difficile...Papa, où es-tu à ce moment ?

Les Histoires d'un enfant ou Les Paroles d'un muetOù les histoires vivent. Découvrez maintenant