L' ÉTAT RETORS

1.5K 19 8
                                    

Je vous avertis...de vous tenir
toujours en défense ; tremblez
même devant la victoire ; c'est
alors qu'il fait ses plus grands
efforts, et qu'il remue ses ma-
chines les plus redoutables.

BOSSUET

Dans la voie du bouleversement
les meilleurs éléments sont tou-
jours dépassés par les plus mau-
vais... Derrière le révolutionnaire
honnête apparaissent bientôt ces
existences troubles.

MARÉCHAL DE MOLTKE

LA révolution industrielle a connu en France sa plus rapide expansion au cours du Second Empire en même temps qu'étaient posées les bases d'un véritable État moderne. Autoritairement établi par un coup d'État, maintenu par une police omniprésente et efficace, le nouvel instrument de gouvernement était indispensable à l'ambitieux projet de ses promoteurs. Deux cent cinquante mille fonctionnaires sont liés par serment au chef de l'État et étroitement surveillés par les préfets ; les magistrats, assimilés aux fonctionnaires, sont nommés et révoqués par décret ; la presse est soumise à de multiples contraintes financières et menaces judiciaires ; les opposant au régime sont purement et simplement déportés en Algérie. Ce sont ces moyens et le "pacte de sang" avec l'armée qui ont permis la militarisation du travail productif et l'extraordinaire essor industriel.
  Les banquiers, les hommes d'affaires et les industriels qui soutenaient ce régime se considéraient, en général, comme des philanthropes ; beaucoup étaient sincèrement convaincus par les doctrines socialistes de Saint-Simon, et l'actuelle dictature ne devait être qu'une étape intermédiaire vers cette ère nouvelle et bienheureuse qu'un autre saint-simonien appellera plus tard "la grande relève de l'homme par la machine".

Dialogue aux enfers entre Machiavel et MontesquieuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant