Chapitre 1

13 0 1
                                    


Lilith, avec son MP3 et ses écouteurs, se baladait dans le parc. Celui-ci était animé par des enfants, des adolescents, des couples ou encore des personnes âgés. Elle regarda autour d'elle à la recherche d'un quelconque banc où s'asseoir. Malheureusement, un dimanche après-midi ensoleillé laissait rarement de la place. Ainsi, elle décida de s'asseoir sous un arbre. L'arbre qui l'abritait du soleil commençait à perdre ses feuilles. A quelques pas d'elle un groupe d'adolescents s'esclaffait et pouffait en détaillant les différents types de passants. Cela lui décrocha son sourire et elle se tourna de sorte à être dos à eux. Elle trouvait ça tellement pathétique de se moquer des gens volontairement... Elle augmenta le volume de sa musique pour ne plus entendre leurs cris surjoués. Elle ferma les yeux et n'entendit plus que la balade qui circulait à travers les écouteurs. Doucement, elle se plongea dans un sommeil léger, dans ce parc à l'allure niaise.

Petit à petit, la musique s'estompait jusqu'à former un long silence. La voix aiguë d'une fille brisa ce vide et réveilla Lilith. Soupirant mentalement, elle leurs jeta coup d'œil et se rendit compte qu'ils s'éloignaient. Sa montre, affichant six heures et demi, sonna faiblement mais l'alarme fut vite éteinte pour éviter d'attirer l'attention.
Toujours assise, elle s'étira pendant quelques minutes avant de se lever pour de bon. Son baladeur, n'ayant plus de batterie, s'éteignit automatiquement. Elle marcha et ne put s'empêcher de bailler. A vrai dire, la nuit blanche de la veille ne l'avait pas aidé. C'était surtout la faute de son père puisque c'est lui qui l'avait convaincu qu'un film d'horreur -le nom l'avait échappée- ne faisait pas du tout peur et qu'il en était presque comique ! Résultat, impossible de dormir sans penser à ce film humoristique. Après tout, c'était sûrement à elle de faire attention. Elle savait très bien pourtant que son père était un habitué de film d'horreur et que pour lui, les "REC" n'étaient que des dessins animés...
En plus de ça, la rentrée au lycée approchait à grands pas... Mercredi.
Lilith avait beau être l'une de ces bonnes élèves que les professeurs adorent et que les élèves jalousent secrètement, elle détestait les rentrées ; surtout LA rentrée, celle du début de l'année scolaire. Les vacances étaient passées tellement vites ! En tout cas, elle en avait bien profité. Elle passait ses journées à faire ses passions, elle dévorait des livres de trois cent pages, écrivait sans arrêt des nouvelles et écoutait de la musique classique toute la journée. Le soir, quand tout le monde dormait, elle aimait bien s'installer à son bureau et compléter son journal intime. Cette activité pourrait paraître tellement stupide pour certains mais pour elle, ça permet de mettre au point ce qui la tracasse et de se sentir mieux le lendemain.

Une petite maison repeinte en blanc depuis le début des vacances d'été se serrait parmi tant d'autres. Toutes ces maisons avaient la même structure, seule les couleurs étaient différentes. Plus petite, Lilith adorait regarder la façade pendant des heures en disant que c'était la plus belle de tout le quartier. Son père et sa mère riaient, heureux, à ses paroles infantiles. Mais, maintenant, elle la voyait d'un autre oeil. C'était là où avait éclaté les premières disputes de ses parents et où les dernières se sont arrêtés... Pour finalement qu'un des deux parte, sans laisser de nouvelles. Autant vous dire qu'à neuf ans et demie, on est très déçue... Seulement, Lilith avait toujours eu un grand coeur, d'ailleurs un peu trop gros, et elle n'avait jamais cessé de penser qu'il n'avait pas fait ça dans l'intention de la blesser, sûrement qu'un jour il lui donnerait des nouvelles et lui expliquerait tout. Enfin, quand les années passent et que, petit à petit, la petite fille devient l'adolescente rebelle, on commence à ne plus y croire. Et à présent, le mot "papa" avait été remplacé du vocabulaire par l'une de ces injures que personne ne dit mais que tout le monde pense. Quelle dommage de perdre espoir...
Les écouteurs pendus de sa poche ne cessaient de claquer au contact de ses jambes. Elle finit par les ranger correctement pour arrêter ce pénible bruit et ouvrit le portillon qui faisait face à la demeure. Elle jeta un coup d'œil furtif à la boîte aux lettres, apparemment vide. En même temps, elle n'attendait pas spécialement de courriels...
La porte s'ouvrit en laissant apparaître une femme souriante et élégante. Son visage était encadré par de courts cheveux bruns ondulés. Elle portait une robe rouge à pois, d'un stylé rétro et chic. Lilith leva la tête et l'aperçue. Elle lui rendit son sourire et s'avança vers elle.
" - Tu aurais dû me prévenir que tu rentrais tard. Je commençais à m'inquiéter.
- Pardon, je n'ai pas fait attention à l'heure.
- Allez, rentre va !"
La femme se décala, laissant Lilith traverser le seuil avant de refermer la porte. Elles s'installèrent autour d'une petite table ronde où était disposé une nappe violette et des couverts, assiettes. Sans un mot, elles se rassasièrent. Les jours étaient beaucoup plus calmes depuis la séparation mais il restait tout de même une petite place vide dans cet ex-paradis enfantin. Une place que plusieurs amants avaient essayer de combler, en vain. Ces hommes détestaient Lilith, elle ressemblait trop à son père pour eux. Ils ne supportaient pas la musique classique, ces films de suspense ou encore son intelligence. C'était la raison pour laquelle sa mère ne cessait de les quitter, jusqu'à en avoir marre et arrêter de chercher une nouvelle âme sœur. Elle ne le disait pas mais, au fond, Lilith la trouvait très courageuse.
" - Alors, prête pour la rentrée ?
- Oui... C'est passé si vite.
- Tu retrouveras Marine.
- Non, elle déménage.
- Ah... Enfin, tu te feras vite des amies, j'en suis sûre.
- Maman. Tu sais tout comme moi que ça ne me dérange pas d'être seule.
- Mais je ne veux pas que tu es encore des problèmes et que tu sois seule pour te défendre, tu le sais pourtant.
- Je n'en aurais pas.
- De quoi ?
- De problèmes, voyons. "
Sur ces dernières paroles, Lilith se leva, pour ranger la table. Sa mère venait de lui rappeler sans trop le vouloir qu'elle allait se retrouver seule. Seule dans ce lycée qui lui était pourtant familier. Familier mais pas amical. En même temps, comment un lycée pourrait être amical ? ... Tout simplement en abritant des gens amicaux. Et elle ne savait que trop bien que ce n'était pas le cas. Il y avait toujours dans une classe un souffre douleur. Ces hypocrites auraient même pû faire un tutoriel sur "comment trouver le souffre douleur parfait". Premièrement, vous choisissez une personne seule, sans amis, qui ne se défend pas et qui vous laissera ainsi se moquer de lui comme bon vous semble, surtout, faites attention à ce qu'il est un défaut ou faites en sorte de lui en crée un !
Lilith avait été l'une de ceux qui se font bousculer dans les escaliers, injurier dans les couloirs, jusqu'à qu'une fille, d'une autre classe, s'en rende compte et, pris de pitié, devint amie avec elle et la défendit contre ses bourreaux qui agissaient sous l'ordre d'un ou d'une "capitaine". Tout cela est tellement pathétique. Oui, encore ce mot, à vrai dire il n'y a que lui qui permet de définir clairement les activités d'adolescents rebelles et benêts.
Lilith partit dans sa chambre en jetant un dernier coup d'œil à sa mère qui commençait à laver les couverts. C'est en étant moins gai qu'au parc qu'elle monta les escaliers. Le parquet, abîmé par les cents pas qu'elle faisait lors d'un caprice aurait dû être remplacé depuis longtemps mais ce n'était pas une priorité, juste une question d'esthétique. Les murs aussi étaient abîmés mais beaucoup moins, on apercevait juste des trous où on devinait l'ex-présence d'un cadre. Un cadre photo, des cadres photo, tous détachés et jetés comme pour oublier le passé. La seule photo qu'il restait de lui se trouvait dans le journal intime à la page des "Personnes croisés dans ma vie". En entendant ça, on pourrait croire qu'on parle d'un tueur ou plutôt d'une tueuse qui note le nom de ses victimes mais, rassurez-vous, c'est juste un passe-temps qui lui fait plaisir et elle se dit que, plus tard, elle essaiera de retrouver ces anciennes connaissances pour admirer ou rire de ce qu'ils étaient devenus. Il y avait une part d'égoïsme dans tout ça qu'elle détestait assumer.
Elle referma la porte après être entré et brancha son baladeur à une prise électrique. En attendant qu'il se recharge, elle alluma le post-radio. Honnêtement, elle détestait la radio, les "hits" qui passaient étaient tous -pour elle- plus inaudibles les uns que les autres. C'est cela qui faisait comment les autres lycéens la voyait, une petite intello qui s'extasie en écoutant du Mozart. Agacée par l'image qu'on lui attribuait, elle pleurait souvent mais jamais devant eux. Sa règle d'or était de ne leur montrer que le côté défensif d'elle-même. Le côté sensible se cachait mais prenait de plus en plus de place. Jusqu'au jour où elle allait craqué et qu'une main tendue l'a aidé à se relever. Marine... Ce prénom sonnait tellement mélodieusement dans sa tête. Il lui suffisait de penser à elle, de son caractère protecteur pour sourire. Mais à présent elle n'était plus là. Elle devra se débrouiller toute seule avec ce que sa grande sœur lui avait appris, notamment ne jamais rentrer dans leur jeu, ils se lasseront tout seul.
Elle zappa les chaînes et finit par mettre un CD, lassée de ne rien trouver.
Elle s'assit à son bureau et alluma son ordinateur. Elle patientait en écoutant la mélodie résonner dans la pièce impeccablement rangée, comme toujours. Elle adorait que tout soit propre dû à son petit côté maniaque. Le petit son de Windows fut suivie de l'affichage de l'écran d'accueil. Au fur et à mesure que les icônes apparaissaient, elle regarda rapidement l'heure à son réveil. Elle n'allait pas tarder à se coucher, elle voulait rattraper la nuit blanche qu'elle avait faite récemment. Une fois l'ordinateur allumé complètement, elle alla sur Internet. Elle souhaitait aller sur le site du lycée pour voir les activités qu'ils proposaient cette année. Elle essaya de se connecter mais ne se souvins plus de son mot de passe. Elle fouilla la petite boîte cachée sous son lit et trouva enfin ce qu'elle cherchait. Un petit papier où elle avait noté son identifiant et son mot de passe. Ce sont les choses qu'elle a l'habitude d'oublier rapidement, et elle le sait, c'est pourquoi elle prend ses précautions !
Elle retourna devant son ordinateur et se surprit à bailler en inspectant la liste des activités. Elle fut joyeusement surprise qu'un nouvel atelier avait été crée ayant pour but d'apprendre à quelques adolescents à jouer du piano. Les places étaient minimes mais elle comptait bien s'inscrire à la rentrée !
Vingt deux heures. Elle se prépara pour dormir en passant à la salle de bain et en se changeant. Une fois débarbouillée, elle se rendit dans son lit pour lire le nouveau livre qu'elle avait entamé. Un thriller, comme elle les aime. De plus en plus fatiguée, elle déposa le roman sur sa table de nuit et éteignit sa lumière, histoire d'éviter de s'endormir dessus. Et s'engouffra alors dans un profond sommeil, dans lequel elle ne se réveillera que le lendemain, à l'aurore.



« Cynthia, redresse-toi ! Regarde comment tu manges, tu es complètement avachie. »

Elle le regarda, souffla puis se leva. On pouvait parfaitement lire la lassitude sur son visage. Elle rejeta ses cheveux en arrière puis adressa son lourd regard à son frère adoptif. Celui-ci fixait son assiette et mangeait lentement. Si lentement qu'on avait l'impression qu'il lui fallait une minute pour manger un grain de riz. Sentant son regard pénétrant sur lui, il se retourna. Satisfaite, elle lui dit en articulant bien ;

« - Tu t'occuperas de ranger la table, hein. Le gentil petit fifils.
- Arrête de parler comme ça ! Intervint son père
- Vous débarrasserez ensemble et, si tu n'es pas d'accord, tu le feras toute seule ! Compris ?
- Gé-ni-ale. »

Lui, qui n'avait toujours pas dit un mot lui adressa un sourire moqueur, mais au fond il en avait marre. Il aurait préféré vivre seul, en fugitif se répondait-il souvent mentalement quand il la voyait. Elle cherchait toujours à jouer la bimbo. Elle ne cessait de riposter au moindre repas qu'on lui préparait, il y avait toujours quelque chose en trop d'après elle. Au lycée, son passe-temps était de prendre les gens de haut, même lui. Cependant, quand elle le cherchait, elle le trouvait toujours et elle finissait par le regretter.

Une fois terminé, il se leva et finit de ranger la table que Cynthia avait commencé. Elle entama les escaliers à toute vitesse pour rejoindre sa chambre. A l'étage, un fin corridor servait de galerie photos. C'est sans prêter la moindre attention à ces cadres qui remémoraient d'heureux souvenirs qu'elle le traversa. La porte s'ouvrit et elle se jeta dans son lit, déjà en pyjama depuis une ou deux heures. Elle leva les yeux au plafond et s'éblouit en croisant le faisceau de lumière de la lampe. En se roulant sur le côté et en tendant un bras, elle réussi à atteindre l'interrupteur qui l'éteignit, ce qui plongea la pièce dans la pénombre la plus totale. A la fenêtre, les volets avaient été fermement clos.

Ces rêves, dans son sommeil, étaient tournés principalement autour de la rentrée. Elle se voyait, traverser la grande grille bleue et marcher sur l'allée menant au bâtiment le plus important. Elle jetterait quelques regards noirs à des filles de son âge et se moquerait des nouveaux qui seraient vainement en train d'essayer de se repérer dans cet immense territoire. Son crop top affinerait sa poitrine et son slim lui ferait des jambes de rêve. Sans oublier ses gros talons noirs, qu'elle ne se gênera pas à claquer à chacun de ses pas. Elle en souriait déjà.

Il monta très lentement les marches de l'escalier en colimaçon. A le voir, on le confondrait avec une limace ou un escargot. Différentes pensées s'agitaient dans sa tête. En particulier un problème, qui l'affectait en premier lieu. Ce soir, ce sera son sujet de préoccupation numéro un. Il rejoignit sa chambre et s'allongea sur son lit, sans oublier d'éteindre la lumière en passant. Il attendait. Le « tic tac » du réveil posé sur la table de nuit se faisait entendre faiblement. Il balaya la pièce du regard, celle-ci avait été aménagé il y a maintenant trois ans, pour une raison toute particulière.

Les pas de son beau-père allant dans sa chambre faisaient assez de bruits pour le prévenir que c'était le moment de se préparer. Encore quelques minutes passèrent avant de l'entendre ronfler dans la pièce voisine. Doucement, il enfila une tenue sombre avant de se lever de son lit et de passer par la fenêtre. Ses activités nocturnes allaient, comme à son habitude, être effectuées.


Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : Nov 28, 2015 ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

Balade des âmes immortellesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant