CHAPITRE 1

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     Le cœur est un organe fragile, défaillant avec le temps. Celui-ci peut se détérioré à tout moment. Le mien a cessé de fonctionner. Seul de vulgaire machine me retienne, péniblement, en vie. Fonctionnant le temps qu'un nouveau cœur arrive. Premier de la liste d'attente du pays, j'attends. J'attends patiemment qu'un individu perde la vie pour que la mienne reprenne du service. N'est-ce pas cruel de vouloir la mort d'une personne pour pouvoir vivre de nouveau ? Ça l'est. Mais c'est ainsi. Je n'ai jamais demandé doté la vie à quelqu'un pourtant cela devra arrivé. Une famille sera déchiré par la mort  naturel ou tragique d'un proche tandis que la mienne pleurera, mais de joie.

     La vie est cruelle. Pourquoi prendre les organes de quelqu'un d'autre ? Si mon cœur ne fonctionne plus, n'est-ce pas un signe que ma vie est fini ? Que ma destiné était ainsi. Pourquoi ne pas vouloir écouter l'appel de la nature ? Cet appel qui me dit de venir dans un endroit meilleur, revenir au commencement. J'ai été conçu pour mourir à un âge peu commun. A un âge où les personnes de mon entourage diront :

" Il était tellement jeune. Trop jeune pour mourir. "

     Âgé de vingt et un ans, je pense désormais que mon heure est arrivé. Malgré le fait que je n'ai pas accompli mes plus grands rêves, il est l'heure. Pourtant, je suis bien le seul à penser de cette manière. A penser que ma vie doit s'arrêter. Mon entourage ne l'entend pas de la même façon. Ils ne veulent pas perdre l'être que je suis. Amies comme famille, chacun d'entre eux viennent me voir à tour de rôle. Priant pour qu'un cœur m'arrive. Se rendent-ils compte de ce qu'ils font ? Ils prient pour qu'une personne perde la vie pour que moi je la garde. N'est-ce pas injuste ?

     Des bruits se font entendre dans le couloir. J'entends les cris de mes parents. De mon père hurlant l'incapacité des médecins à me trouver un cœur.

- Cela fait plus d'un ans qu'il est sur cette foutue liste, dont deux mois dans les cinq premiers et maintenant qu'il est premier de la liste vous asseyez de me faire croire que vous n'avez pas de cœur pour lui ! Vous vous foutez de moi !

- Monsieur... - Tenta le médecin.

- Arrêtez ! Trouvez lui un cœur et vite ! Ce n'est pas si compliqué d'en trouver un avec les dizaines de morts par jours que vous faites !

     Mon père était un homme admirable, du moins avant que les premiers signes de mon cœur malade apparaissent. J'ai toujours admiré mon père pour sa bonté, sa générosité, sa gentilesse et son bon sens. Cependant, à ce que j'entendais depuis déjà quelques temps, toute ses qualités étaient parties. Il voulait très clairement, comme un égoïste, la mort d'une personne, d'un être cher, afin que je vive. Comprenait-il que vivre m'était désormais bien égal. Je ne suis pas un égoïste. Je préfère mourir qu'avoir la mort de quelqu'un sur la conscience.

     Les sanglots de ma mère deviennent bruyant. Tout autour de moi n'est qu'agacement et frustration. Ont-ils au moins écouté ce que je leur ai demandé ? Malgré tout l'amour que je leur porte et le fait de savoir que je suis leur petit ange qu'ils ne veulent perdre, je préférerai partir à jamais. Partir dans un monde où mon cœur battra pour toujours, où la douleur n'est qu'un mythe. Un monde où le cœur n'est pas un organe vital.

     La douleur est omniprésente en moi. La douleur physique n'est plus que mentale. Une douleur atroce. Celle de ne pas être écouté et jamais je ne le serais sur ce sujet là.

     La porte, finalement, s'ouvrit sur mes parents pleurant avec un mince sourire au lèvre. Dissimulant, je le sais, un sourire radieux, un sourire de joie extrême. Sans doute ne le montrent-ils pas sachant mon point de vue sur tout ceci. Le médecin était derrière eux, passant la porte lui aussi. D'un air gêné, il s'apprêta à parler. Mon imagination se mit en marche sachant ce qu'il allait me dire. Mais ce qui sortit de sa bouche, aller bien plus loin  que ce que je pouvais imaginer. L'horreur se créait dans ma tête. Une image atroce défilant dans mon cerveau tout en écoutant ses dires.

- Un jeune homme est arrivé hier au service d'urgence. Celui-ci a été transféré dans le service de réanimation immédiatement. Il est désormais dans le coma. Mes collègues et moi-même pensons qu'il ne se réveillera pas et si le cas inverse se produit, il aurait sans aucun doute de graves séquelles. Le faire survivre grâce à des machines n'est pas une solution. Nous allons donc demandé à ses proches d'accepter de mettre fin à son calvaire. Nous espérons, l'équipe médicale, tes parents et moi que sa famille sera compréhensive.

     Inconsciemment, je venais de baisser la tête. Honteux, voilà ce que j'étais. Comment pourrais-je vivre avec ça sur la conscience ? Savoir que mes parents ont exigés la mort de quelqu'un, d'une personne avec une famille. D'un inconnu que je ne pourrais même pas connaître. Un anonyme dont je devrais être éternellement reconnaissant. Enfin, reconnaissant n'est sans doute pas le bon mot. Je devrais le remercier d'avoir l'amabilité de mourir pour satisfaire mes parents.

     Le médecin venait de partir. Tandis que des images atroces défilées inlassablement dans mes pensées, ma mère s'essaya sur le rebord de mon lit. Un faux sourire se dessina sur mon visage. Un sourire tellement faux que mon pauvre cœur souffrit d'autant plus. Se compressant douloureusement dans ma poitrine.

- Tu vas avoir un cœur mon chéri ! - venait de s'exclamer ma mère.

     Pensait-elle à moi à ce moment là ? Ou bien à elle ? Et si je ne voulais pas de ce cœur. Ce cœur pur et pourtant si impur. Malgré le sourire de ma mère et de mon père appelant sans aucun doute mon entourage pour annoncer la bonne nouvelle, définitivement non. Non, je ne voulais pas de ce cœur. Tout ce que je voulais était d'une simplicité folle. Que l'on débranche ses fils et que l'on me laisse enfin partir en paix. Dans ce magnifique monde qu'est le paradis.


Greffe des sentiments.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant