3. Je suis désolée.

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Cela faisait bien plus d'un quart d'heure que nous étions sur cette moto. Sa tête sur mon épaule, Gharam me serrait fort, très fort la taille. Comme si elle avait peur que je la quitte, moi aussi. Je comprenais parfaitement ce qu'elle ressentait.

Ilyas, paix sur son âme, était l'aîné de la famille. Il avait deux ans de plsu que nous. A l'heure d'aujourd'hui, il en serait à ses 19ans. Après la mort de leurs père, il prenait toujours soin de sa mère, Moataz et Gharam. Il baignait dans des affaires louches. Après tout, c'est devenu une sorte de tradition chez les banlieusards. Cela faisait moins d'un an qu'il nous a quitté. Tué. Personne ne s'en est correctement remis. Surtout Aicha qui était folle amoureuse de lui. C'est elle qui l'avait découvert, une balle à l'abdomen, jeté comme un rien près des poubelles du bloc.

C'est une certitude: Gharam ne voulait pas perdre son frère, encore moins une deuxième fois en une même année. Elle ne mettait pas de casque. Sa tête reposait sur mon épaule et, tout le long du trajet, je sentais ses larmes sur mon cou. Mes jointures étaient devenues blanches tellement je serais le guidon. J'avais la haine contre ces fils de bâtards qui enlevaient la vie à des innocents. Coeurs de pierres sans pitié ni affection.

Nous étions là, plantées devant cet établissement que tout le monde craint. Des gens entraient et sortaient. Chacun dans sa bulle. Chacun sa préoccupation. Je regardait ces êtres qui rentraient paniqués, d'autres en pleurs tandis que certains affichaient une expression indéchirable. Des femmes enceintes, des bébé en sanglots, des adolescents au pied ou Bras cassés, d'autres le visage en sang. On en voyait de toutes les couleurs.

Je décidai de prendre mon courage à deux mains, me levai et Gharam m'imita. Ce petit geste me prouva que c'etait à moi la responsabilité. Celle de lui donner espoir. De la garder aussi optimiste qu'elle était. Certes, une grande et lourde responsabilité s'acharnait sur mon dos mais je ne pouvais pas me montrer faible. Je ne devais pas. Pour elle, Aicha, Kais, Tata Naima. Pour Moi.

En franchissant la porte d'entrée, l'odeur du désespoir et du malheur me frappèrent en plein fouet. Mon visage se referma. Les souvenirs remontèrent à la surface. Je la revoyais s'éteindre entre ces 4 murs grisâtres. Je revoyais mon père qui pleurait silencieusement. Mehdi qui donnait des coups dans le mur tellement forts que sa main se mettait à saigner. Mais il avait fini par glisser le long du mur, de grosses larmes sur les joues. Je chassai ces images d'un seul coup et me dirigeai vers la réceptionniste. Elle était en train de se maquiller. Je lui dis Bonjour mais elle répondit pas.

-Ow je te parle là.
Elle ne répond toujours pas. Je déteste qu'on me mette des vents. Je m'emporte:
-Tu viens de sucer c'est pour ça t'as du mal à répondre?
-T'as vu comment tu parles gamine?
Gharam intervient. Enfin elle parle:
-Oh vas y tu parles trop toi aussi. Fais pas chier et dis où est la chambre de Moataz Louali?
Elle avait adopté un ton neutre, un regard noir.
-Euh ex..excusez moi mademoiselle. C'est euh euh...
-Oh mais accouche merde! Fis-je en mordant mon poingt pour me retenir.
-Je ne veux pas vous vexer, je vois que vous tenez à lui mais, comment dire, il ne s'en est pas encore sorti. Je suis désolée.

Gharam la fixait dans les yeux. Elle commençait à trembler. Ses lèvres s'ouvrirent mais aucun son ne sorti. Ses yeux devenaient de plus en plus humides et rouges. Je l'avais jamais vue aussi brisée. Je la pris dans mes bras,tout en restant silencieuse. Pourquoi? Je ne peux pas vous donner une raison précise. J'étais anéantie, certes. Moataz est le meilleur ami à Mehdi, il a toujours traîné chez moi. On a grandi tous ensemble, on a affronté la vie ensemble. Mais je ne pleurais pas. Mes muscles se contractaient. Je serrais Gharam de plus en plus fort. Je voulais évacuer cette douleur qui se propageait en moi. Qui me rongeait lentement. Je voulais frapper quelque chose, mais je ne pouvais m'en prendre qu'à ceux qui ont tué Moataz. Ça me fait bizarre de dire qu'il n'est plus là, que je n'entendrais plus son rire mélodique,ses blagues pourries.

Mon amie se détacha de moi, et je remarquai qu'elle fixait un point juste en dessous de mes épaules, une lueur d'espoir dans les yeux. Je me retournai et vis Aicha et Kais courir vers nous. Ils parlèrent en même temps:

-Bordel vous foutez quoi ici? Ça fait un bail qu'on vous attend dans la chambre?
-Toute façon c'est fini. Je ne veux pas voir mon frère dans un drap blanc encore une fois, ajouta Gharam, non sans que sa voix se brise à la fin.
-Il se réveillera ma petite, ne t'inquiète pas. La rassura Kais.

Pourquoi il a dit ça? Gharam et moi fîmes une expression d'incompréhension, avant de décider de suivre nos amis dans le couloir, menant aux chambres de l'hôpital.

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Perdre son frère est une chose, une deuxième fois est une autre. Gharam sera-t-ele prête à encaisser? Et sa mère? Et ses amis. Mais, pourquoi Kais a dis qu'il va se réveiller? Qu'est ce qu'il raconte?

Le prochain chapitre arrive. Restez accrochés. C'est ma première histoire et j'ai vraiment besoin de votre soutient.

Bisou! A bientôt!

What's wrong with me?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant