Mes pupilles furent aveuglées par la lumière du jour. Je poussais un petit cri, signe qu'il ne fallait pas me gêner. Mais la lumière persista. Je m'apprêtais à rétorquer quelque chose quand une voix m'en empêcha :
-Bouge-toi bon sang ! T'es longue à la détente, ça fait dix minutes que j'essaye de te réveiller !, dit la voix agacée.
J'émis quelques grognements, signe de mon mécontentement, puis ouvris les yeux pour voir apparaître un jeune garçon. Ses cheveux étaient principalement de couleur ébène et possédait quelques mèches de couleur bordeaux. Ces yeux quant à eux étaient l'exact opposé : ils étaient très clairs, semblables à la couleur du soleil. Physiquement, il devait avoir entre treize et quatorze ans. Mais quelques choses en lui me surprit : ses cheveux étaient décorés de deux oreilles de chiens de la même couleur. Il possédait une longue queue touffue vers le bas de son dos, elle aussi dans les mêmes tons. Je restais scotchée par ces attributs qui m'étaient inconnus, ce qu'il ne manqua pas de remarquer.
- Dit, tu peux arrêter de me fixer comme ça ? C'est pas le moment de rester ici alors lève-toi, on n'a pas que ça à faire !, m'ordonna-t-il.
Je me levais en bougonnant puis regardais derrière moi : le grand chêne était toujours là et n'avait pas l'air d'avoir changé. Je me demandais combien de temps j'avais dormis. Peut-être 2 heures, ou deux semaines ? A cet instant, beaucoup de questions se bousculaient dans ma tête. Je me rappelais de la nuit précédente. Pourquoi cet homme m'avait-il protégé ? De quoi me protégeait-t-il au juste ? Et surtout, pourquoi m'avoir endormi sur ce chêne si étrange, si mystérieux ? Le garçon-chien me tira de ma rêverie.
-Qu'est-ce que tu fais encore ? Dépêche-toi !
Il saisit mon bras gauche et m'emmena vers un coin de la salle où un puis de lumière était situé au plafond. A ma grande surprise, il m'enlaça comme l'avait fait précédemment l'inconnu pour faire un bond de plusieurs mètres. Après ce saut qui me fit des haut-le-cœur, je me dégageais de son étreinte et remarquait avec stupeur l'endroit où nous étions. Ce n'était plus la forêt qui cachait le terrier, mais une immense salle luxueuse qui ressemblait fortement à celle d'un palais. Elle était dans les tons crème et beige et était décorée de piliers dans le même esprit. Ces grand poteaux assez impressionnant et donnait un aperçu de la taille du plafond. Un escalier tout fait de marbre amenait jusqu'au terrier. Je me tournais vers le garçon et à mon grand étonnement, je remarquais qu'il n'était pas si grand que ça. Il devait faire cinq à sept centimètres de plus que moi. Pourtant, il n'avait pas l'air d'avoir le même âge que moi. Avais-je tellement grandit durant mon sommeil ? Je laissais cette question de côté et engageait la conversation.
-Dis-moi, où sommes-nous ?
-Tu es au QG des dragons ! Et là, nous sommes à l'entrée du chêne de Nolla, là où tu t'es reposée. Je m'attendais d'ailleurs à te voir plus vieille que ça ! La vie éternelle doit être une des particularités des dragons, s'exclama-t-il.
-On vit très vieux, en effet, mais on n'est pas totalement immortels. N'importe quelle blessure peut nous être fatale. Mais si on se conserve bien, on peut vivre plus de 13 000 ans !, terminais-je en souriant. Au fait, qui est cette Nolla ? Et j'ai dormi combien de temps ici ?, l'interrogeai-je.
- Nolla c'est l'esprit du chêne. C'est la déesse de la terre mais se serait trop compliqué de t'expliquer tout ça maintenant... Et pour ce qui est de ton sommeil, je dirais environs... quatre mille ans ?
Je restais pétrifiée par cette nouvelle. Quatre mille ans ? Aurais-je dormi si longtemps ?
-Alors ça me fait 4 800 ans ? Dire que je n'avais que 800 ans il y a ne serait-ce que quelques minutes..., dis-je, désespérée.
-Tu es si vieille que ça ?!, s'écria-t-il, le sourire aux lèvres.
- Déjà je ne suis pas « vieille » et je sais tenir ma langue, pas comme quelqu'un d'autre !
Il se redressa et me fit un regard des plus noirs.
-Répète un peu pour voir ? Déjà je ne suis pas un toutou mais un loup garou espèce de vieille peau !, s'énerva t-il.
Alors que les chamailleries allaient commencer, le jeune homme fronça les sourcils. Etonnement, il décida plutôt d'abandonner et changea de sujet.
-Bon, vient avec moi, je vais te faire visiter le QG.
Je le suivis comme convenu. Nous nous dirigeâmes tous les deux vers une grande porte décorée des symboles anciens. Ceux-ci étaient dorés et ressortaient bien sur la couleur beige de la porte. Il posa sa main sur la porte puis un cercle magique aux écritures incompréhensibles apparut, ouvrant la porte d'elle-même. Nous entrâmes dans un immense couloir pourvu de nombreuses portes. Le palais possédait les mêmes couleurs que la salle précédente, donnant un côté un peu luxueux. Après une vingtaine de minutes de marche qui me paraissaient interminables, le garçon aux oreilles de chien reprit la conversation.
-Toutes les portes que tu as vues jusqu'ici étaient les dortoirs. Ou plutôt une partie. Ce sont les dortoirs féminins du personnel du QG. Pour les hommes, ils sont à l'opposé, dit-il posément.
J'étais impressionnée. Dire qu'un couloir comme celui-ci ne représentait qu'une fine partie du QG.
-Mais le QG doit être immense !, dis-je, une expression d'étonnement s'affichant sur mon visage.
-Mais heureusement, on a quelque chose pour y remédier, dit-il avec un grand sourire.
Il se dirigea vers un des murs de la salle. Je ne compris pas tout de suite son geste puis regarda au sol pour voir un rond de marbre se transformer en un cercle lumineux. Le loup-garou se tourna vers moi pour m'expliquer la situation.
- Ce cercle magique est en fait un téléporteur. Comme tu as pu le remarquer, le QG des dragons est immense, c'est donc pour cela que nous avions mis en place un système qui nous permet d'aller à l'autre bout du palais instantanément ! Génial non ?, s'exclama-t-il comme si il était l'inventeur de cette petite merveille.
Des étincelles apparurent dans mes yeux devant cette invention.
-Je veux trop essayer !, m'excitais-je.
Je me précipitais telle une gamine sur l'engin, faisant tomber mon guide comme une carpe. Celui-ci, rouge de colère, s'exprima avec des grognements :
-Dit-donc, ça va pas de pousser les gens comme ça ? Tes parents ne t'ont jamais appris comment se comporter en public ou quoi !
Je tournais la tête, prête à riposter :
-Ne traite pas mes parents de la sorte !, m'emportais-je.
Alors que les poings allaient agir d'eux même, un petit sourire sarcastique s'afficha sur le visage de mon adversaire.
-Alors, madame va se battre comme les bébés ? T'es vraiment qu'une gamine, fit-il en soupirant.
Ses dernières phrases se répétèrent dans ma tête. Agirais-je comme une gamine ? En même temps, ce n'était pas comme si je n'avais encore que 800 ans l'espace d'un instant. Me dire que ma paisible vie avec ma famille était terminée n'était pas quelque chose que l'on pouvait oublier avec de simple parole. Alors que mon interlocuteur s'attendait à une réplique de ma part, je lui répondis simplement par un visage triste, ce qui changea son expression.
-Ça ne va pas ?, prononça-t-il en voyant qu'il avait dit quelque chose de mal.
Mes larmes me montaient progressivement aux yeux.
-C-Co..., bégayais-je. Comment peux-tu dire cela alors qu'il y a à peine quelques minutes j'avais encore une vie normale avec des parents, des amis, et...
Je vis une goutte tomber sur le sol de marbre. Mes larmes tombèrent toutes seules sans que je ne puisse me contrôler. Je fermais les yeux, repensant aux derniers instants passés avec ma mère avant de continuer :
-De toute façon, je... je veux rentrer chez moi !, hurlais-je de toutes mes forces.
Soudain, je sentis quelque chose de chaud sous mes pieds. Je rouvris les yeux et découvris avec stupeur le cercle de pierre briller. Je vis le visage du garçon-chien apeuré tout en murmurant un « Oh mon dieu... », avant qu'il ne disparaisse totalement de mon champ de vision.
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Eldarya - Cristallisation !
FantasíaPacifica Latmika, jeune dragonne encore couvée par ses parents, voit un jour sa paisible vie partir en fumée. D'un seul coup, une nuit tout à fait banale se transforme en un massacre sans précédant. Et c'est bien par cette tragédie que tout commença...