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Mes pas faisaient craquer la neige sous mes pieds nus. Ceux-ci étaient frigorifiés et insensibles. J'étais tellement pressée de les rejoindre, que j'en avais oublié de mettre mes chaussons avant de sortir. Leurs familles n'habitaient pas loin, alors nous nous amusions souvent ensemble.

Je regardais autour de moi, contente que la ruelle où j'habitais paraisse aussi propre. J'avais l'habitude de voir de la couleur : le ciel bleu, l'herbe verte, la route de terre, les cerisiers roses... Mais ce jour-là, même le ciel n'avait plus aucune couleur : il était d'un blanc crème, éblouissant et étourdissant.

Je les aperçus, à quelques mètres de moi. Il étaient en train de se rouler dans la neige, le sourire aux lèvres, emmitouflés dans plusieurs couches de vêtements tachés de blanc.

Le plus grand était le premier à se relever, des cristaux de glaces recouvraient ses cheveux bruns. Il aidait son ami à se remettre debout. L'autre, plus petit de quelques centimètres, possédait des cheveux blonds comme le blé.

Quand ils m'aperçurent, leurs sourires retombèrent aussitôt : était-ce à cause de ma robe légère et de mes lèvres bleutées ? Ils accoururent vers moi. Heureuse de les voir, je leur souris. Mes dents s'entrechoquaient, faisant répercuter en moi des tremblements violents.

Le plus petit, Michel, ignora mon élan de tendresse : il retira subitement sa veste pour couvrir mes épaules transparentes. Je frissonnai en sentant un vent glacial caresser mes jambes nues. Le brun, Daniel, s'appliquait à me réchauffer en me frottant vigoureusement pour me cajoler, tandis que Michel se baissait afin que je monte sur son dos.

Je passai mes bras autour de son cou, et posai ma tête sur son omoplate. Le visage angélique de Daniel était barré d'un sourire tendre et doux. Il posa une main légère sur mon dos pour s'assurer que je ne tombe pas en arrière.

Michel se releva. Je sentis ma tête tourner. Daniel caressa doucement mes reins, dessinant un rond des bouts de ses doigts. Des tremblements parcoururent mon corps tout entier et mon cœur s'accéléra.

Cela se produisait souvent quand Daniel était proche de moi. C'était comme être sur le point de tomber dans le vide, l'impression était la même. Ma main se sentit attirée par la sienne et nos doigts s'entremêlèrent : les siens étaient brûlants, les miens glacés.

Je fermai doucement les yeux, bercée par la mélodie que fredonnait doucement Daniel à mon oreille, et les pas rapides de Michel, qui s'aventurait dans l'allée endormie, pour se diriger vers ma maison. Ma grande maison...

L'allée des souvenirsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant