La Nature de Roxane, tome 2 : Traqués

Chapitre 1

- Je t'en prie, maman ! Je suis plus forte que n'importe qui dans ce village.

- Là n'est pas le problème. Je te rappelle que ton hybride de père veut ta mort. Tu aurais à peine le temps de cligner des yeux qu'il t'aurait déjà arraché le cœur.

Je ris amèrement. Mon hybride de père ? Ce n'est pas moi qui ai couché avec et donné naissance à deux filles, dont une hybride et l'Élue ! Je regrettai mes paroles aussitôt après les avoir pensées. Ma mère étant un loup-garou avait la capacité de lire dans les pensées. Je me sentais d'autant plus mal étant donné que ce n'était pas le moment de remuer le couteau dans la plaie. Je me contentai alors de la fixer froidement. Nous pouvions être deux à jouer les têtes de mule.

- Tu crois qu'il est assez stupide pour me faire cette faveur ? Tu sais aussi bien que moi qu'Aiden prendra tout son temps pour me torturer si jamais il met la main sur moi.

Son regard se durcit, elle serra les poings et la mâchoire.

- Donc d'après toi, au mieux tu te fais tuer sur le champ, au pire il prendra son temps pour t'achever. Désolée, mais je refuse que ma fille soit exposée au danger encore plus que ce qu'elle ne l'est. Tu n'iras nulle part, Roxane, conclut-elle sèchement en se plaçant entre la porte et moi.

- Je suis on ne peut plus exposée au danger quotidiennement ! Tu ne crois pas que tu en fais un peu trop ? Ce n'est pas comme si j'avais l'intention de me jeter dans la gueule du loup, une fois dehors ! Je veux seulement rendre visite à Clara, m'empiffrer de glace, faire une overdose de chocolat et déblatérer des propos incohérents, comme au bon vieux temps.

Au mot « overdose », ma mère s'est figée. Sur le coup, elle devait s'imaginer autre chose, mais après tout, qu'est-ce que cela pouvait bien me faire ? Je ne risquais absolument pas de mourir pour cause de surconsommation de drogue ou tomber en coma éthylique. En effet, seuls la décapitation, les dagues en argent en plein cœur ou me faire brûler vivante, je ne risquais pas grand-chose. Quoiqu'en y pensant, cela laissait un large panel de possibilités à mes ennemis.

Lorsque je captai le regard de ma mère qui signifiait clairement qu'elle n'était pas convaincue, je m'empressai d'ajouter :

- Ne pense même pas à me sortir l'excuse vue et revue « ce n'est pas bon pour la santé ! », parce que tu sais aussi bien que moi que mon métabolisme vampirique brûle toutes les calories.

Je me tus, et le silence plana entre nous de longues secondes durant. Ma mère n'était pas du genre à fléchir facilement et moi non plus. Mon père, le seul que j'avais toujours connu, endossait souvent le rôle d'arbitre pour mettre fin à nos disputes. Sa mort avait créé une sorte de rupture dans ma vie, bouleversant encore plus ma vie. Il me manquait énormément. C'était une des raisons pour lesquelles je voulais voir Clara. Depuis les révélations qui m'avaient été faites à propos de ma famille, je ne parvenais plus à me confier à ma mère, et je gardais tout pour moi. J'étais comme un ballon de baudruche que l'on gonflerait trop. Je risquais d'exploser à tout moment. Sauf que la tristesse, la rancœur, la douleur, la peur, la haine et la rage polluaient l'air de mes poumons et enserraient mon cœur dans un étau inflexible.

- Ma puce... (Ma mère posa sa main sur mon bras et serra légèrement. Ce contact m'apaisa instantanément. J'aurais aimé me laisser aller contre elle, mais elle reprit la parole aussitôt.) Je m'en veux horriblement, et jamais je n'aurai la conscience tranquille. Si tu savais à quel point je regrette toutes les décisions que j'ai prises dans ma vie. Je sais pertinemment que c'est à cause de moi que tu endures tout ça, que si je ne t'avais pas conçue, tu n'en serais pas là. Mais, je t'en prie. Tu es la seule famille qu'il me reste. Ne me laisse pas.