Chapitre 4

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De toutes parts, les flammes léchaient les arbres et progressaient vers moi à une allure effrayante. Deux dagues armaient mes mains. Je ne reculai pas, me contentant de scruter les ténèbres, cherchant l'ennemi. Un mouvement dans les feuillages embrasés, des brindilles qui craquaient, les flammes qui crépitaient, la fumée qui m'étouffait.

Un homme surgit. Son visage était impossible à distinguer mais l'éclat argenté de la lame qu'il tenait me sauta aux yeux. La Dague d'Hafnium. La seule arme capable de tuer Aiden. Mon ennemi.

Mon père.

Je fis quelques pas en arrière, afin de mettre un maximum de distance entre cet homme effrayant et moi. Mais bientôt, le brasier lécha mon dos, me rappelant que j'étais prisonnière. Mon assaillant continuait sa progression, imperturbable, comme poussé par des mains invisibles. Ses yeux s'embrasèrent quand une douleur destructrice me déchira les entrailles. Mes poumons étaient en feu. L'air me manqua brusquement et la souffrance se propagea dans mon corps à la vitesse de la lumière. Je n'eus même plus la force de tenir mes couteaux, qui tombèrent à mes pieds, le bruit de leur chute étouffé par mon tourment intérieur qui faisait rage en moi.

A travers le rideau obscur qui obstruait ma vue, je parvins à distinguer que mon agresseur avait comblé les quelques mètres qui nous séparaient. Je sentis des mains fortes agripper mon cou fragile mais la douleur ne fut rien en comparaison de l'enfer dans lequel j'étais immergée. Je ne tenais debout que grâce à la poigne de fer qui m'enserrait.

Une détonation retentit, mais j'étais incapable de savoir si elle provenait de la forêt ou si c'était moi qui explosais.

- Le temps est ton ennemi, entendis-je comme un murmure.

Dernier éclat de lumière. La lame menaçante jaillit devant mes yeux mais il m'était impossible de bouger. Mes pieds ne touchaient même plus le sol néanmoins le feu diminua quelque peu d'intensité dans mon corps, me permettant de pousser un long grognement peu commun à mes habitudes. Mes os craquèrent subitement et se brisèrent sous le poids d'une soudaine volonté de combat. Je ne me laisserai pas faire. Mais à nouveau, l'obscurité vint tarir cet élan de volonté éphémère.

Une secousse retentit dans mon corps, suivie d'une gifle magistrale qui éclata sur ma joue. L'air frais et pur revigora mes poumons et mes multiples fractures me ramenèrent brutalement à la réalité. Je ne me souvenais pas exactement ce qu'il m'était arrivé, sinon que je m'étais déchaînée contre les arbres alentours allant jusqu'à me briser les os, emportée par une ardeur démoniaque.

La présence de ma mère et de Lucy se fit sentir à mes côtés, ce qui me rassura aussitôt.

- Qu'est-ce qui t'a pris, Roxy ? s'enquit Lucy, hors d'elle. On a mis plus d'une heure pour te retrouver ! Comment as-tu fait pour t'enfoncer autant dans la forêt ?

- Je... Je ne sais pas. Excuse-moi d'être partie comme ça, j'avais besoin de prendre l'air.

- Et te casser bras et jambes ? Qu'est-ce qui s'est passé ? s'empressa d'enchaîner ma mère. Qui est-ce qui t'a fait ça ?

J'avais honte de lui dire que je m'étais infligée moi-même ces blessures. Elles me prendraient pour une folle. Mais je ne pouvais pas m'inventer un agresseur imaginaire, elles n'auraient pas abandonné sans lui avoir fait la peau.

- Je... Personne ne m'a fait ça.

- Alors comment expliques-tu tout ceci ? Les arbres sont déracinés, les fougères arrachées, tes vêtements déchirés et tes membres, n'en parlons pas !

La Nature de Roxane, tome 2 : TraquésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant