Je regrette

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On me disait que j'étais cool, et c'était vrai. Tous ces gens qui me souriaient le matin, qui me regardaient avec admiration...
On ne m'a jamais rien dit de négatif, du moins pas en face. J'avais grandi populaire et j'avais appris à tout faire pour le rester, mais je n'ai jamais réfléchi par moi même, la voilà la vérité.
Tu ne sais pas comme je regrette de t'avoir tant blessé, tu ne sauras jamais à quel point j'en pleure la nuit.
On te disait idiote et asociale, personne ne daignait te regarder.
Et pourtant ce jour où elle m'a laissé tomber pour un autre, j'ai bien dû remonter dans l'estime de mes amis. Ça n'avait rien de personnel tu sais.
J'ai dû te rabaisser comme je l'ai fait, parce que j'avais besoin de me sentir aimé et admiré.
Je n'ai jamais voulu te faire tant de mal tu dois me croire. J'ai encore tous ces billets que je t'ai forcé à me donner, ils sont encore sous mon lit, et je n'ose plus les toucher. Ils me hantent, ces billets si tu savais seulement à quel point.
Je voudrais revenir en arrière, pourquoi ne puis-je pas remonter le temps ?
Le regard déçu de mes parents chaque matin, celui de mes anciens amis, celui de mes professeurs, je ne peux plus les supporter.
Je ne peux plus vivre en sachant que je t'ai tué. Je t'ai tué. Je t'ai poussé à bout si fort que tu as mis fin à tes jours.
Je ne mérite pas ma vie, puisque je t'ai retiré la tienne.
Je ne te demande pas de me pardonner, je prie seulement pour que tu m'entendes aujourd'hui, que tu m'écoutes, que tu vois mes larmes, que tu vois comme ma poitrine se convulse et comme je suffoque chaque fois que ton visage me revient en mémoire.
Je donnerai n'importe quoi pour que tu reviennes.
Tu étais belle, tout ce que je disais était faux.
Tu aimais lire, je m'en souviens, je me souviens de ce livre que je t'ai arraché des mains et que j'ai déchiré sous tes yeux.
Il est encore posé sur mon étagère, il me regarde avec dégoût, il me toise de ses pages abîmées.
Je me rappelle de tes cheveux si longs, que j'ai coupé d'un coup de ciseaux. Je les ai revendus ces cheveux. Ils étaient si beaux... Personne ne te l'a jamais dit je le sais, mais tu étais belle.
J'espère que tu me regardes de là haut, que tu m'écoutes, parce qu'aujourd'hui je vais te rendre justice.
J'espère que tu me vois sur le rebord de ma fenêtre, j'espère que tu me vois passer les jambes au dessus de la rambarde.
J'espère que tu me vois me laisser tomber, j'espère que tu me vois m'écraser lourdement sur le sol.
J'espère que tu entends mes os se briser sur ce sol fait de béton.
Et j'espère qu'à ce spectacle, tu souris, car c'est la dernière chose que ma misérable personne puisse t'apporter.

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