Un renouveau

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Une demi-heure s'est écoulée depuis les derniers mots échangés entre les deux passagers. Eugène toujours assis sur le siège d'à côté s'était endormi, tandis que la jeune femme était plongée dans la lecture de son roman.

La nuit ne tarderait pas à tomber. Les rues dans lesquelles passaient la diligence étaient agitées, on entendait du brouhaha, des cris, des pleurs, quelques pierres vinrent bousculer la diligence ce qui secoua un peu les passagers et qui sorti Eugène de sa sieste, apeuré.

_Que se passe t-il?

_Vous voilà réveillé. Avez-vous bien dormi, mon cher monsieur?

_Vous lisez encore? N'êtes-vous donc pas épuisée?

_Avez-vous une meilleure chose à me proposer, cher monsieur? Je sens bien que ma lecture vous ennuie.

_Non pas qu'elle m'ennuie mais j'aimerais bien discuter avec vous. Dites moi d'où vous venez!

Elle sourit. Elle glissa un marque-page entre les pages de son roman avant de le refermer et le déposer sur la table devant elle.

_Je suis désolée mais je peux rien vous dire. Il est hors de question que je puisses mettre la vie d'un civile en danger.

_Un civile? Vous parlez bien, ma chère dame. Je suis un civile et pas n'importe lequel. Je me suis battu tout seul toute ma vie pour en arriver là aujourd'hui, j'ai dû quitter ma ville natale, mon beau pays, bon c'est vrai qu'il n'y avait rien de vraiment particulier mais n'empêche c'était chez moi. Mes racines y sont, une partie de ma vie y est. Et tout ça pourquoi? A cause de tous ces conflits politiques qui n'en finissent pas. J'ai perdu tout espoir en l'avenir de ce pays.

_Es ce là la raison de votre présence dans cette diligence?

_Ca et aussi parce que je suis à la recherche de nouveaux plaisirs. J'essaye de redonner du goût et du sens à ma misérable vie.

_Vous vous dénigrez.

_Nous avions toujours été dénigrés. D'où je viens personne ne sait ce que c'est le respect de soi et la dignité. On nous les a pillés avant même que nous sachions qu'ils existaient.

_Qu'entendez-vous par "on"?

_Les hommes de la haute qui ravagent les villes à l'instant où nous parlions. Vous entendez tous ces cris? Que pensez-vous que c'est? Des pères, des enfants voire des femmes arrachés à leurs familles. Ces hommes n'ont aucune limite. Ils ont fait de leur quête du pouvoir une affaire universelle. Les victimes c'est le peuple.

Eugène parlait avec tant de conviction dans la voix qu'il en laissait la jeune femme sans voix. Il savait de quoi il parlait. Elle aussi d'ailleurs, c'est la raison pour laquelle elle montait sur Paris et qu'elle ne pouvait rien lui dire.

AdalineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant