Mes prunelles s'attardent sur la ligne sensuelle de ses muscles. Ils frémissent sous mon regard. Voilà un homme taillé pour le combat qui ne doit pas s'encombrer souvent de belles paroles.
Ses magnifiques iris vertes toujours fixées aux miennes, il s'empare de mon poignet. Ses doigts s'enfoncent dans ma chair, me font presque mal, mais mon sourire se fait encore plus sarcastique. Furieux, il dépose, sans aucune délicatesse, mon téléphone portable au creux de ma main. Je ressens le contact de sa peau contre la mienne jusque dans mes entrailles. Il me paralyse. Son humeur, tout comme la mienne, ne va pas en s'améliorant. L'animal sauvage est de mauvais poil, pourtant c'est sans le moindre signe d'émotion qu'il me chuchote :
— Du calme, ma colombe...
Son visage est si proche du mien... Sa chaleur me transperce de part en part... Je dois reculer, m'éloigner de lui, de ses effluves entêtants. L'odeur qui se dégage de lui est un savant mélange de café fort et de sueur, le tout associé avec une touche boisée. Mes sens sont aux abois... Mon cerveau ne paraît plus apte à la moindre pensée cohérente. Aussi, quand il reprend la parole, il me faut quelques secondes pour assimiler ses mots.
— J'aime les femmes à fort tempérament, celles qui ont du mordant, pas celles qui aboient sans raison.
Sans rien ajouter de plus, il me tourne le dos et retourne à son jogging. Je l'observe disparaître, la bouche toujours ouverte et la rage au cœur.
Mon portable vibre et me ramène une fois de plus à la réalité.
— Faye ? Faye ?
La voix de Swann est dégoulinante d'inquiétude, mais encore secouée par ma mésaventure, je passe mes nerfs sur elle.
— Qu'est-ce qu'il y a ? Pourquoi me harcèles-tu comme ça ?
Elle lâche une série d'injures en français. Je ne comprends absolument rien à sa langue maternelle. Agacée, je la laisse faire et mords nerveusement ma lèvre inférieure. Elle finit par se calmer et pousse un long râle :
— Tu n'as décidément aucun état d'âme. Fais-moi penser à négocier férocement lorsque je démissionnerai.
Les mots de Swann résonnent à mon oreille sans réellement m'atteindre. C'est comme s'ils étaient à des milliers de kilomètres de moi et me parvenaient en échos flous et incompréhensibles.
— Ou mieux, j'écrirai un livre spirituel du genre « Comment ne pas tuer sa sorcière de boss ? ». Aucun doute, il se vendra à des millions d'exemplaires si tous les patrons n'ont rien qu'un dixième de ton caractère.
Si je suis la plus importune des chefs, Swann est, quant à elle, la reine des persifleuses. Le sarcasme est un domaine dans lequel elle excelle, une seconde nature. À tel point qu'il est parfois compliqué de savoir si elle est sérieuse ou non.
— Tu ne vas pas t'y mettre toi aussi ! C'est la journée mondiale des chieurs ou quoi ?
— Ça, ça s'appelle le quotidien, chérie ! Des chieurs, il y en a tous les jours, et partout. Attends une minute : moi aussi ?
Comme je ne réponds pas, elle enchaîne :
— Faye ? Qu'est-ce qui s'est passé ? Qui as-tu rencontré ?
— Personne.
— C'est pour ça que tu as ignoré mon appel. Balance ! C'était qui ?
— Personne, insisté-je.
— J.Lo ? Shakira ? Tu as pensé à prendre une photo au moins, ça pourrait t'éviter Kayne !
Agacée qu'elle me mitraille avec ses questions, je lui offre ce qu'elle veut. Du moins, à moitié.
— Ce n'était pas une star. C'était un joggeur, tout ce qu'il y a de plus normal, et de plus emmerdeur. Voilà, tu es satisfaite ? Maintenant, je pense que tu as mieux à faire...
— Waouh.
Ce genre d'exclamation, si inhabituelle chez elle, me met mal à l'aise. Pince-sans-rire, elle enchaîne :
— Tu as rencontré un mec... C'est pour ça... Tu es deux fois plus irritable – ce qui, à 7 heures et demie du matin est assez affligeant – parce que tu as eu un contact avec un individu du sexe opposé.
Je ne sais pas si elle est suspicieuse ou tout simplement blasée. Swann n'a jamais eu de relations sérieuses. Elle insiste toujours sur le fait que l'amour est une forme de soumission qui restreint nos libertés. Pour le coup, nous nous entendons bien là-dessus : l'amour ne vaut aucun détour.
— Au vu de ta réaction, je suppose que Monsieur n'a pas dû se laisser attendrir par ton joli minois. Comment est-ce qu'il était ? Le type relou ? Obsédé ? Pervers ?
Ça, c'est la définition d'un homme pour Swann. Mais l'inconnu que j'ai croisé en est très loin.
Grand, téméraire.
Solide.
Insubordonné.
Voilà les mots qui le décriraient. Ceux que son visage, son corps et ses yeux arborent avec tant de facilité. Il était comme un étendard que l'on plante fermement dans le sol pour dire à l'ennemi qu'on ne s'inclinera pas.
Je secoue la tête, je dois me reprendre. J'inspire profondément à plusieurs reprises, mais sans parvenir à respirer pleinement. Même après son départ, un poids continue à peser sur ma poitrine. Mon esprit, rétif, est encore avec cet homme.
— Exaspérant, dis-je en m'accrochant à cet aspect de sa personnalité comme si cela pouvait empêcher ma langue de lâcher la vérité.
— Autrement dit, il ne t'a pas laissée indifférente. C'est une première. Je peux le rajouter dans ma liste d'expérimentations tendant à prouver que tu es humaine. La vache... siffle-t-elle.
Elle prend une longue seconde de pause, comme si elle se rendait compte que quelque chose d'énorme était sur le point d'arriver et qu'il lui fallait mettre ses pensées en ordre.
— Peut-être même que c'est l'homme de ta vie et qu'il va tellement kiffer te faire l'amour qu'enfin je pourrais prendre des vacances !
C'est trop tard, les mots ont franchi ma ligne blanche. De nouvelles images indécentes m'assaillent. J'imagine sans aucune difficulté mon corps contre le sien, ses mains fermes sur ma peau et les sensations vertigineuses d'une union torride, passionnée, sauvage, à en crisper les doigts de pieds... Rah ! Swann !
Il faut que je récupère le contrôle de mon corps. J'essaie de faire le vide dans ma tête, d'oublier la sensation de ses bras puissants autour de ma taille, de ses doigts sur ma peau nue... Je dois faire abstraction de son regard...
Respire, Faye... Respire...
Ma faiblesse me rend folle... Ma colère s'attise un peu plus encore et, lorsque finalement elle explose, c'est contre moi-même qu'elle se dirige.
PUTAIN ! Mais c'est pas vrai ! Reprend toi bordel ! Tu as un objectif ! Concentre-toi sur ta carrière... Chasse l'homme préhistorique de tes pensées et avance !
— Swann ?
— Oui, chérie ?
— Tu es officiellement virée ! déclaré-je avant de raccrocher.
Ça doit être la 300ème fois que je prononce cette phrase et son ricanement à l'autre bout du fil en dit long sur ma sincérité.
Une brise fraîche me parcourt la nuque, j'inspire profondément et, fin prête, je me remets à courir, prête à m'épuiser pour l'oublier et faire face à mon avenir.
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Bonjour les loulous,
Nous sommes désolées d'avoir mis autant de temps à vous postez ce chapitre :(
Nous espérons qu'il vous plaira tout de même :)
En média, l'une des chansons préférées de Faye ( et que nous aimons nous aussi particulièrement )!
Bisous Bisous
Fanny & Kessy
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Off The Grid
RomansaUne star montante du mannequinat, un joueur de poker de renommée mondiale... Rien en commun ? Et pourtant... Ils sont jumeaux et partagent un lourd secret. Il est garde du corps, ancien militaire de carrière et engagé auprès des jeunes en difficult...