Case 406

XIII

Tout ce bruit me donnait mal à la tête. Après la nuit torride que je venais de passer, après mettre bourré la gueule et drogué tel un toxicomane, puis coucher avec l'homme parfait pour ensuite m'enfuir tel un lâche, j'arrivais à peine à tenir sur mes deux jambes.

Mon crâne était rempli de souvenir. La nuit avait été douce à certain moment, et sauvage à d'autre. Ses moments où il me chuchotait à l'oreille en me caressant de ses longs doigts doux et fin «Je contemple une œuvre, un art sans fin.» Ça paressait tellement niais, jusqu'au moment où il me retournait brusquement et devenait sauvage avec son petit sourire sur le côté. Seigneur, qu'avais donc fais-je pour l'avoir collé à ma peau ? C'est tellement physique. Je ne pouvais pas m'arrêter de penser à lui, ça m'était impossible. Mon corps frissonnait rien qu'au souvenir de son touché délicat sur mon cou.
J'étais dans le couloir, marchant lentement jusqu'à la salle où on était forcé à séjourner 30h par semaine quand soudain je fus brutalement jeté dans une triste salle vide.

«Quel est ton putain de problème Tomlinson ? criais une voix que j'avais reconnue instantanément. Après des mois à me harceler, je te donne ce que tu voulais, et tu pars ? Tu pars sans rien laisser derrière toi ? criait-il encore plus fort.
-Ne hurle pas ! Tout le monde pourrait entendre ce que tu racontes.
-Ce n'est pas mon problème à ce que je sache. Tes collègues ne sont pas au courant que tu te drogues peut être ? Où que tu couches avec les suspects des affaires en cours ? ricana-t-il sèchement. Tu voudrais peut être que j'aille avertir ton patron sans doute ?
-Harry, commençais-je, laisse-moi en placer une.
-Qu'est ce qu'il y a ? Tu vas me sortir une stupide excuse ? Tu crois que je suis qui ? A coucher avec moi puis partir sans laisser de trace ? Tu voulais quoi ? Non mais je rêve. »

Des cries m'appelant résonnaient  dans le couloir, il fallait que je parte. Mais il fallait que je m'explique en premier lieu avec cet homme. Seulement, expliquer quoi ? Pourquoi je n'avais rien laissé ? A la suite d'un dernier regard, il tourna le dos après un bruyant soupir et sortit de la pièce en claquant la porte d'une extrême force.
Je sortis à mon tour après quelque minute et me rendait à ma destination initiale.

«-T'étais où T?
-Juste partie prendre un peu l'air, répondis-je brièvement.
-Le boss te cherche, Mr. Styles est arrivé et il voudrait que tu l'interroges.
-Comment ça ?
-Il a été convoqué pour un interrogatoire sur le meurtre de Kaila Borns.»

Pourquoi les mauvaises choses s'accumulaient comme ça dans ma vie ?

*

J'entrais dans la salle, dossier et preuve en main. J'étais plus sûr de moi que la dernière fois, mais pas autant que je l'espérais. Je désirais juste pouvoir faire mon rôle correctement, et mentir sur chaque émotion que j'éprouvais.

«Mr Styles, où étiez-vous la nuit du 25 ?
-Chez moi.
-Étiez-vous en compagnie ce soir-là ?
-Non, j'étais tout seul ce soir-là.
-Vous n'avez donc pas d'alibi. Qu'avez-vous donc fait ?
-J'ai étudié.
-Vous êtes vaste Style, développez.
-Que voulez-vous que je développe dans "j'ai étudié" ? ricana-t-il.
-De quelle heure à quelle heure par exemple. Ça serait une avancé déjà.
-Après être sortie des cours, je suis partie au café vers 18h10 puis je suis rentré chez moi à 20h environ. Je me suis détendue, j'ai mangé et je me suis remis à étudié avant de partir me coucher à 00h passé. »

Je regardais chaque trait de son visage, essayant d'apercevoir ses émotions, la vérité, et le mensonge. Je savais qu'il mentait sur un point, il l'avait fait exprès. Il n'était pas partie à 20h, mais 20h30. Je ne pouvais rien dire, puis ça ne changeait pas grand-chose. C'était une sorte de pique destiné à moi. Il savait que j'étais au courant que c'était faux, c'était un genre de test pour lui. Savoir si j'allais dévoiler un quelconque fait. Mais je n'allais rien dire, et ça lui causait une joie. Je pouvais l'apercevoir à son faible sourire qu'il essayait de cacher.

Puis la vague idée de savoir qu'il était coupable me traversait l'esprit. C'est vrai, je n'avais pas été là la nuit du 25, je n'étais pas là à le surveiller au coin de la rue avec un café à la main essayant de l'apercevoirà travers les petites fenêtres du salon et de la cuisine. A essayer de voir sa silhouette traverser la pièce. Mais j'abandonnais vite cette réflexion.

«Vous êtes très précis je trouve.
-Je me souviens, ce soir-là mon film préféré passait à la télé. J'ai étudié devant. Je sais ce que vous me direz sur ce sujet mais peu importe, là n'est pas le problème je pense.
-Très bien. Expliquez-moi pourquoi vos empruntes sont trouvés sur cette objet, répliquais-je en montrant un sachet en plastique rempli, retrouvé la nuit du 25 après le meurtre de Kaila Borns ?
-Comment le saurais-je ? J'ai dit que j'étais chez moi.
-Vous savez Styles, c'est vraiment suspect toute cette chose autour de vous.
-Chose ?
-Oui, chose. Vous êtes tellement étrange. A me demander si je dois vous croire ou non.»

Et ce fut les seuls mots que je pus prononcer à cet instant là.