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Quand tout s'est arrêté pour la première fois, j'étais avec mon père. Il m'avait prévenu, dorénavant, tous les douze jours, tout s'arrêterait pendant deux minutes et vingt-quatre secondes. Les bus, les voitures, le métro, la télé, les avions, les animaux, et les humains. Tous resterait figé pendant ces deux minutes et vingt-quatre secondes. Sauf l'Horloger, et moi.

L'Horloger, c'est mon père, il dirige le monde depuis qu'il a créé la Volex. Cette montre magique qu'il chérie tant, pour la simple et bonne raison qu'elle a le pouvoir d'arrêter le temps l'espace de quelques instants. Deux minutes et vingt-quatre secondes.

Au commencement des ces pauses temporelles, je ne comprenais pas bien pourquoi mon père faisait ça, j'avais beau lui demander la raison de cette décision, il ne me répondait jamais. Jusqu'au jour où il estima que j'avais atteint l'âge de savoir.

« - Suzanne ? Viens ici.

- Oui papa ?

- Le jour est venu, annonça-t-il, de tout t'expliquer.

- Il était temps, je t'écoute.

- Comme tu le sais, tous les douze jours, j'enclenche un arrêt partiel du temps...

- Oui, ça je sais, mais pourquoi ? demandai-je.

- Durant ces deux minutes et vingt-quatre secondes, j'enclenche

une mise à jour. J'empêche tous les organismes vivants de s'enrayer.

Quelque chose clochait...

- Alors pourquoi arrêtes-tu les machines si tu ne remets à jour que les oragnismes vivants ? demandai-je.

- Mais enfin Suzanne, répondit-il, si je n'arrête que les organismes vivants, et pas les machines, comment vont-elles être contrôlées pendant ces deux minutes ? Imagine que j'enclenche une pause pendant qu'un avion est dans le ciel. Si je n'arrête que les organismes et pas les machines, l'avion continuera de voler mais sans pilote... et que risque-t-il de lui arriver ?

- Il s'écraserait... répondis-je gênée, désolé papa, c'était une question idiote.

Soudain, le regard de mon père s'assombrit.

- Ecoute chérie, jusqu'alors, pendant les pauses, je t'ordonnais de rester à la maison pour empêcher la découverte de ta différence par rapport aux pauses, mais maintenant que tu es assez grande, libre à toi d'être où tu veux lors des pauses, mais à une seule condition. Tu dois faire semblant d'être figée.

- Mais pourquoi ?

- Pour ton bien. Personne ne doit découvrir ça. »

Je n'avais jamaois désobéi à cette règle, jusqu'au jour où...

00 :00 :00

Je sortais de la station de métro quand l'alarme retentit, c'était le signal pour annoncer une pause. Comme me l'avait dit mon père, je restais là, en haut des marches, immobile. Comme d'habitude, je regardais autour de moi, pour voir si quelqu'un pouvait déceler dans mon regard, le secret que je protège. Mais non. La seule personne qui se trouvait dans mon champ de vision était un jeune homme, d'une vingtaine d'années. Son regard était fixé sur la une du journal qu'il venait d'acheter.

00 :01 :56

J'avais une crampe à la jambe, et elle faisait horriblement mal. Je devais tenir pendant les 28 secondes qu'il restait.

00 :02 :24

Ouf ! Il était temps. Je commençais à masser ma jambe endolorie quand j'apperçus derrière moi le jeune homme qui ne bougeait pas d'un poil. La pause était pourtant finie...

00 :02 :35

Sur le trottoir, personne ne bougeait... Mais que se passait-il ? La pause ne serait-elle pas encore finie ? Impossible. Elle dure deux minutes et vingt-quatre secondes. Cela fait exactement deux minutes et trente-cinq secondes que le monde entier restait figé.

01 :57 :43

Une heure, cinquante-sept minutes et quarante-trois secondes. Et le monde restait figé, sauf moi. Et papa, mais il n'était pas à la maison. Je la cherchais partout, même dans le bureau, pièce où, en aucun cas, je ne dois mettre les pieds. Je cherchais la raison de cette pause interminable quand quelque chose, dans le bureau de mon père, attira mon regard. Un tableau. Mais pas n'importe lequel :une reproduction parfaite de la Volex. A moins que...

01 :58 :02

Mais oui ! C'était ça la solution ! Je me souviens d'une des histoires que me racontait mon père quand j'étais petite...

« Un jour, un horloger, qui avait fabriqué une très belle montre, décida de la montrer à tout le monde. Il en était tellement fier qu'il n'arrêtait pas de parler de sa nouvelle création. Mais un jour, un habitant de la ville décida qu'il fallait s'emparer de cette fameuse montre pour que l'horloger arrête d'en parler.

L'horloger, qui avait été mis au courant de ce complot, demanda à son ami le peintre de créer un tableau dans lequel il pourrait y cacher sa montre. Le peintre, ami très fidèle de l'horloger accepta sa requête, et il fît le plus beau tableau qu'un horloger puisse rêver !

La montre était posée sur le sable, et derrière elle, la mer d'un bleu intense. Un peu plus loin sur la plage, on pouvait apercevoir de la verdure. La montre au cadran en or, et au bracelet de cuir avait une particularité. En effet, les aiguilles de la montre n'étaient en fait que des oiseaux s'envolant à chaque minute !

Depuis que le peintre avait peint ce tableau pour son ami l'horloger, plus personne n'avait tenté de voler cette si belle montre. »

02 :02 :24

L'histoire que me racontait mon père était en fait son histoire ! Et dire que je viens seulement de le comprendre... La Volex ne se trouvait donc pas à son poignet comme il l'affirmait, mais cachée dans le tableau.

Il n'y a que la montre qui pourra donner une réponse à ma question : pourquoi le monde reste figé depuis deux heure et deux minutes ?

J'observais le tableau tout en me demandant si j'allais vraiment trouver des réponses en regardant la Volex, quand un détail attira mon attention. Sur le cadran originel, il n'y avait pas de molette sur le côté pour changer l'heure, alors que sur la montre du tableau, elle en possédait une. L'Horloger l'aurait-il rajoutée récemment ? Mais pourquoi aurait-il fait ça ? Cela n'avait aucun sens. Alors cela ne voulait dire qu'une chose... la Volex a été volée.

3.4.2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant