Je suis Aaron dans son appartement. Il rejoint le salon et pose nos valises.
- Je vais devoir te laisser. J'essaierai de ne pas rentrer trop tard ce soir. En attendant, repose-toi.
Je n'ai pas envie qu'il parte, mais je ne peux pas le retenir. Je m'assois sur le canapé, épuisé. Il fait un pas vers moi et embrasse mon front avec une tendresse qui me fait du bien. Depuis mon accident, il est devenu froid. Je ne sais pas s'il cache ses sentiments pour se protéger ou s'il m'en veut. Il faudra que j'essaie de lui en parler.
- C'est ce que je compte faire.
Il me regarde en souriant. Sa main caresse mes cheveux.
- Tu ne seras pas seul tout l'après-midi, ne t'en fais pas. Miranda doit venir. C'est ma femme de ménage. Tu verras, elle est vraiment très gentille et dévouée.
- D'accord.
Cette visite ne me rend pas impatient. Je suis fatigué et j'ai envie de me retrouver seul. Mais je ferais mieux de ne pas le contrarier. Je réponds à son sourire avant qu'il ne s'éloigne.
- Même si je ne suis pas là, tu es ici chez toi.
Il me tourne le dos et disparaît dans le couloir. J'entends la porte d'entrée se refermer derrière lui. Je suis maintenant seul.
Je reste dans la même position et finis par m'assoupir. Les cachets font toujours leur petit effet.
Je me réveille à peine quelques minutes plus tard. Mes yeux examinent les lieux. Je n'aime pas cet endroit beaucoup trop tape à l'œil à mon goût. Tout y est luxueux et je ne veux même pas savoir le prix de cet appartement. Je suis de plus en plus en train de me dire que nous ne jouons vraiment pas dans la même catégorie. Je ne suis qu'un barman lambda, alors qu'Aaron est le PDG d'une grande entreprise. Je n'arrive pas à comprendre ce qu'il me trouve.
Comme je déteste rester inactif, je quitte le canapé. Je me traîne jusqu'à la grande baie vitrée pour contempler la vue. Elle est vraiment splendide. Je ne peux pas lui enlever ça. Et je comprends pourquoi Aaron se sent bien ici. Il doit avoir l'impression de dominer le monde.
La douleur décide de se manifester. Je presse une main contre ma blessure en m'approchant de ma valise. Je la laisse au sol et m'agenouille pour l'ouvrir. Je trouve rapidement ce que je suis en train de chercher. J'ai besoin de prendre mes médicaments. Je vais bientôt ressembler encore une fois à un zombie, mais ce sera toujours mieux que de me tordre en deux.
J'entre dans la cuisine pour prendre une bouteille dans le réfrigérateur. Rien de tel que de l'eau bien fraîche pour se désaltérer. Après avoir passé du temps à chercher un verre dans les nombreux placards, je finis par en trouver un. Je le remplis, le pose sur le comptoir, et sors la plaquette de petits cachets orangés. J'en fais tomber deux dans le creux de ma main, puis les avale sans réfléchir. Sentir l'eau glisser le long de ma gorge m'apporte un premier soulagement.
J'entends la porte d'entrée claquer. Ça doit être Miranda. Je ne pensais pas qu'elle serait là aussi tôt. Je pose le verre vide dans l'évier et retourne au salon pour l'accueillir. Je ne suis peut-être pas dans ma meilleure forme, mais je dois rester poli.
Une femme s'avance vers moi. Elle me regarde d'un air bienveillant. Je la trouve tout de suite sympathique, même si je ne la connais pas.
- Bonjour. Vous devez être Derek.
Je suis étonné qu'elle ait déjà entendu parler de moi.
- Bonjour. Je suis enchanté de vous rencontrer.
Elle s'approche encore un peu et me serre dans ses bras. Je suis étonné par ce geste, mais je lui rends son accolade, un grand sourire aux lèvres.
- Monsieur Craster m'a parlé de vous. Je suis très contente qu'il se soit enfin posé avec quelqu'un. Il était grand temps qu'il se calme un peu.
Elle pose son sac sur le grand buffet noir laqué. Je reste silencieux. D'habitude, je suis plutôt avenant. Là, je ne sais vraiment pas quoi lui dire.
- J'ai appris pour votre accident. Mon patron a eu vraiment très peur pour vous. Vous devriez aller vous reposer. Vous avez une petite mine.
Sa remarque m'arrache un rire. Je grimace un peu à cause d'un pique de douleur.
- Je ne fais que ça. Je n'aime pas rester sans rien faire.
Elle me dévisage avec un sourire. Mon attitude a l'air de l'amuser.
- Sur ce point, vous êtes identiques. Monsieur Craster est une personne très active, lui aussi.
Je suis dérangé qu'elle ne l'appelle pas par son prénom. Aaron se montre un peu trop formel, parfois. Elle ne perd pas de temps. Je la vois commencer à ranger ce qui traîne dans le salon. Je constate qu'Aaron agit parfois comme un enfant gâté. Il ne respecte pas son travail et se dit que, de toute façon, il y aura toujours quelqu'un pour passer derrière lui.
- Vous avez besoin d'aide ?
Elle rigole en écoutant ma question. Elle me fait un clin d'œil avant de se rendre à la cuisine.
- Pas dans votre état. Ça ne serait pas raisonnable. Et puis, je suis payée pour ça. Vous pouvez partir vous enfermer dans une pièce à l'écart. Je risque de faire un peu de bruit.
Je n'insiste pas. Je préfère l'écouter sans la contredire. Une fois dans la chambre, je suis accueilli par un grand miroir. Je n'ai pas envie de me regarder. Pourtant je ne résiste pas. Miranda a raison, je fais vraiment peur à voir. Les cernes, que j'ai sous les yeux, me donnent un air malade. Je n'arrive plus à affronter mon reflet.
Je m'assois sur le lit, puis me déchausse avec difficulté. Dès que je me penche un peu, la douleur devient insupportable. Je gémis et des larmes perlent dans mes yeux. Les paupières fermées, je pleure silencieusement. Je commence à en avoir marre de souffrir. Mais, je sais que dans cette histoire, j'ai eu de la chance. J'aurais pu y rester ou pire, finir handicapé à vie. Je ne m'en suis pas si mal sorti, finalement.
J'attends que la crise passe. Je dois patienter un long moment pour ressentir les premiers effets des antalgiques. Mes dernières larmes sèchent sur mes joues et je les essuie d'un revers de main.
Je m'allonge sur le lit en faisant bien attention de ne faire aucun mouvement brusque. Je fixe le plafond et je comprends pourquoi Miranda préférait que j'aille m'isoler. Elle vient tout juste d'allumer l'aspirateur.
Aaron ne doit pas te voir dans cet état. Il a déjà assez à penser avec son travail. Il ne faut pas que tu deviennes un boulet pour lui.
La douleur s'estompe très nettement. J'ai de nouveau cette forte envie de dormir. Je succombe à l'appel du sommeil, des questions plein la tête.
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Double Je - Derek (Tome 2)
عاطفيةMa vie a brutalement changé. Le jour où j'ai sauvé cette femme, elle a pris un virage à 360 degrés. Je ne pensais pas tomber amoureux de cette inconnue. Je ne savais pas qu'elle cachait un lourd secret. Elle a fini par tout avouer. J'ai voulu m'éloi...