2nd chapitre

292 18 2
                                    

Au second jour, l'air ambiant paraissait encore plus glacial que le jour précédent. Les premiers rayons du soleil réussissaient difficilement à percer l'épaisse couche de nuages gris que le vent absent ne pouvait chasser, et qui s'accumulaient au-dessus de Carohaise. En haut des remparts de la fière forteresse, sur les chemins de ronde, des chevaliers aux aguets soufflaient entre leurs mains, veine tentative de les garder au chaud. Il faisait si froid pour un mois de Mai que pour peu, on eut allé chercher des manteaux en peau d'hermine et de renard. Malheureusement, le siège empêchait l'approvisionnement et les hommes n'étaient pas préparés à la morsure du froid.

Tôt dans la matinée, les femmes du château eurent alors pour ordre d'aider du mieux qu'elles le pouvaient. Certaines eurent l'idée d'aider en cuisine en préparant du potage pour réchauffer et ragaillardir les futurs combattants, d'autres récupérèrent les peaux des animaux que l'on dépeçait pour le repas dans le but d'en faire des vêtements chauds.

Comme tous ses sujets, la jeune Guenièvre n'avait trainaillé au lit ce matin là. Aidée de plusieurs suivantes et dames, elle s'était empressée de s'habiller convenablement, et aussitôt, elle alla quérir son père. Le seigneur Léodagan préparait avec ses chefs de guerre les différents plans afin de bouter les hommes de Gorre hors de Carmélide. Il était hors de question de mettre en danger femmes, enfants et brave gents.

Fort plongé dans sa stratégie, il n'entendit pas sa fille passer les portes de la salle suivie de deux de ses dames. Avec prestance, Guenièvre avança et s'ajouta au cercle d'hommes en armures.

- Père, que comptez-vous faire ? Je hais de ne rien savoir, cela me concerne également !

D'un seul homme, les sept chevaliers relevèrent la tête, ébahis de la présence de la jeune femme.

- La place d'une femme n'est pas ici ma fille, retournez en vos quartiers, répondit le père, l'air grave.

- Je ne partirai pas sans que vous ne m'ayez répondu. Quelles sont les intentions de mon futur époux ? se borna Guenièvre en posant à plat ses deux mains sur la table jonchée de plans.

Léodagan soutint le regard ferme de sa fille, laissant s'installer un lourd silence dans la salle. Aucun de ses hommes n'osa parler.

- Il veut la Carmélide. Et vous.

Ses plus grandes craintes confirmées, Guenièvre s'accrocha à la table en bois pour ne point fléchir, les jointures de ses doigts blanchissantes.

- Vous ne pouvez décemment pas encore envisager de me marier à lui ! Qu'en est-il de la politique désormais ?! se courrouça la jeune femme.

- Je ne puis défaire ma parole comme bon me semble, mais soyez assurée que jamais il n'aura la main sur vous de force, ni sur la Carmélide.

- Qu'est-il arrivé des engagements ? Il n'honore pas les siens, et les bafoue ! Vous pouvez tout aussi facilement défaire votre parole !

- Vous êtes promis à lui et Dieu me garde de le faire ! Par contre, un autre homme aurait tôt fait de vous ravir à lui. Mais il n'est temps à penser à cela ! Maintenant partez et allez vous cacher avec vos dames au cœur du château.

- Je n'irai pas me cacher telle une biche effrayée par le loup ! s'exclama sa fille avec véhémence.

Au fond d'elle, une grande terreur se propageait tel un poison. La peur de ne plus voir son père, la peur de le perdre, la peur de voir le royaume où elle avait grandi détruit sans qu'elle ne puisse rien faire. Tout cela devenait soudainement si réel. Pourtant, elle se devait d'être forte, il le fallait.

La légende du Roi Arthur - 7 jours pour rêver l'impossibleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant