6ème chapitre

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Au détour d'un couloir, une tornade blonde passa, faisant s'écarter toutes personnes qui oseraient se mettre en travers son chemin. De ses quartiers à l'aile du château où elle espérait retrouver son père et ses chevaliers, elle parcourut donc à grandes enjambés les dédales sans se préoccuper de qui que ce soit. Homme de Carmélide ou de Logres, ils se poussaient donc en admirant sa prestance et son courroux.

Guenièvre avait regagné ses appartements plus tôt suite à l'arrivée de Merlin et bien qu'elle fût éreintée, elle n'avait pu trouver à nouveau le sommeil réparateur qu'il lui avait été accordé auprès du roi Arthur. Son humeur n'en avait été qu'empirée et, seule dans sa chambre et avec ses pensées, elle n'avait pu que se ressasser les évènements de la veille. Méléagant qui s'introduisait dans le château et la rattrapait, leur confrontation, sa peur, son dégout. Puis la lumière dans les ténèbres en la personne de ce preux chevalier qui n'était autre que son roi. Repenser à ses traits avait ravivé une flamme qui s'était alors allumée au creux de sa poitrine à la vue de son sourire, douce, plaisante, aimable. Tout le contraire du brasier destructeur que déclenchait la haine qu'elle éprouvait pour le prince de Gorre. Et puis, la jeune femme se rappela la victoire d'Arthur sur Méléagant et la fuite des gallois, sa libération, le soulagement. Le prince de Gorre avait promis qu'il reviendrait, mais en attendant, elle était libre. Libre comme l'air, libre de décider de son avenir, libre de cette boule au ventre qui ne la quittait plus ces derniers jours. Désormais, elle savait toute l'importance de cette liberté et on ne l'y reprendrait plus. La jeune femme serait seule maîtresse de son destin, se promettant de choisir avec son cœur et avec l'aide de Dieu afin d'accéder à son rêve impossible. Même son père n'aurait mots dire.

Et un homme, aussi proche soit-il du roi de Logres, osait s'interposer alors qu'enfin, son cœur et son âme l'aiguillaient sur la bonne route ?!

Soufflant d'exaspération, Guenièvre évita une nouvelle fois avec agilité un domestique qui transportait un plat depuis les cuisines. Alors les hommes mangeaient donc ? En un quart de seconde, elle décida de bifurquer et courut presque jusqu'à la grande salle où, elle espérait, les chevaliers fêtaient et se rassasiaient suite à ce dur combat.

Un grand brouhaha s'élevait de derrière les grandes portes lorsqu'elle arriva devant et elle ne tarda pas à les pousser avec l'aide des gardes placés de part et d'autre. Plusieurs têtes se tournèrent vers elle mais la plupart des chevaliers restèrent indifférents à la nouvelle présence féminine. Ils continuaient de parler, rire, boire et manger à foison, remerciant sûrement Dieu d'être toujours vivants. De nombreuses têtes lui étaient inconnues et quand elle tendit l'oreille, elle décela même un petit accent différent de celui des siens. Étaient-ce les braves hommes venus de Logres donc ? Cela expliquerait qu'ils n'aient pas réagis quand elle entra.

Rapidement, Guenièvre croisa le regard de son père et elle s'avança sans plus tarder vers lui. Elle devait lui faire part de la situation. Elle était bien plus que capable de prendre soin d'un blessé seul, qu'il soit roi ou paysan. Les druides maitrisaient la magie, les femmes pouvaient apporter soins et réconforts, ainsi était fait le monde.

- Arthur est-il déjà bien portant que vous soyez ici très chère ? s'enthousiasma le seigneur Léodagan quand sa fille arriva à portée d'écoute.

- Je pourrais vous répondre, père, s'il m'avait été donné de rester à son chevet, rétorqua Guenièvre avec amertume.

- Et bien, qu'y a-t-il ? s'étonna-t-il en entendant son ton. Pourquoi n'avez-vous pu y rester ?

- Un druide m'a congédié, affirmant pouvoir s'occuper de lui à ma place, insinuant que je n'étais pas habilitée à le faire ! Jamais par le passé ne m'a-t-on humilié de la sorte ! s'offusqua la fille de Léodagan.

La légende du Roi Arthur - 7 jours pour rêver l'impossibleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant