Regarde-moi

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Il voulut partir, mais je le retint. 

-Regarde-moi. S'il te plaît, regarde-moi.

Lentement, il se retourna; et me fit face. Une fois que je fus sûre d'avoir toute son attention, je reprit:

-Je t'aime. Et tu le sais. Tu es toute ma vie. Tu es tout ce qui compte pour moi. Tu fais partie de mon monde, de mon univers. Et ça a été toujours été le cas. Oui, depuis le premier regard que l'on s'est lancé. J'étais perdue et triste, même si je n'en laissais rien paraître, par habitude; et tu étais toi aussi dans cet état-là. Mais toi, tu voulais faire un effort. Alors, après qu'on se soit regardés quelques minutes, ou peut-être était-ce des heures, jaugeant la peine de l'autre; tu m'as parlé. Un simple mot: "Bonjour". Mais c'était dit si gentiment, avec tellement de sincérité, et en plus accompagné de ce petit sourire en coin qui te caractérise tant; que j'ai senti mon coeur faire un bond en avant. Rater un battement. Parce que, par ce simple sourire, tu avais réussi à me faire sortir de ma torpeur, de la peine que je ressentais. Alors, je t'ai souri. Et ce n'était pas simplement un de ces petits sourires de façade que j'offre aux gens qui m'entourent simplement pour les rassurer, non; c'était bien plus. Et tu l'as remarqué, parce que ton sourire s'est agrandi. Mon sourire, en cet instant, était un grand Merci. Merci, toi le passant que je ne connais pas, de t'être arrêté pour me regarder, d'avoir fait attention à moi; et enfin de m'avoir adressé la parole de cette façon. Oui, parce qu'il n'y avait nulle trace de pitié dans ta voix. Seule la sincérité transparaissait. Après ce qui avait duré peut-être des jours, perdue dans mes pensées les plus profondes, je t'avais enfin répondu. Je t'avais simplement dit "Bonjour!", mais ça voulait tout dire. Dès lors au fond de toi tu savais, comme je le savais moi aussi, que quelque chose venait de se passer. On savait que l'inconnu(e), en face de nous, ne l'étais pas tant que ça. Mais que c'était plutôt une âme perdue, tout comme la nôtre. Et parce que d'un simple regard, d'un sourire et d'un petit mot on avait réussi à comprendre tout ça, à le ressentir comme s'il s'agissait de nos propres émotions; on savait, toi comme moi, que l'on ne pourrait plus se quitter. Le coup de foudre, le vrai; totalement fulgurant, et profondément ancré en nous. J'ai su, dès lors, que tu serais essentiel à ma vie. Que j'aurais besoin de toi: de ton amitié, de tes conseils, de ton soutien, de ton réconfort, de ta présence, de tes bras auprès de moi... de ton Amour. Et aujourd'hui, où tout semble aller mal pour toi et moi, pour Nous, ce sentiment, je le ressent encore. Parce qu'il est véritable. Jamais il ne s'estompera, non. Jamais je ne voudrais qu'il le fasse, d'ailleurs. J'essaierais toujours de le retenir, quoi qu'il arrive. Parce que tu es mon âme soeur, et bien plus encore. Tu es une partie de moi. Avant de te connaître, il n'y avait que le néant, dis-je en montrant mon coeur. Je me sentais mal, je me sentais vide; il me manquait quelque chose. Et cette chose était en fait une personne: c'était Toi. Et ça l'est toujours. Alors, maintenant, réfléchis bien à tout ce que je viens de te dire. Réfléchis, et rappelle-toi. De toutes les belles choses qu'on a vécu, mais aussi de toutes les horreurs qu'on a traversé. Rappelle-toi de ça aussi, même si ça fait mal, et rappelle-toi pourquoi tu as réussi à surmonter tout ça; pourquoi moi aussi j'y suis arrivée. Et si tu cherches bien, tu verras qu'il n'y a qu'une seule réponse possible: Nous. Oui, Nous: Nous qui nous sommes soutenus, entraidés, réconfortés. Toi, qui m'a sauvé. Moi, qui t'ai aimé. Nous, qui avons vécu. Tout ça, je t'en prie, ne l'oublie pas. Parce que je t'aime. Je t'aime putain, et jamais je ne me le pardonnerais si je te laissai partir comme ça, simplement à cause de ça. Parce que tu l'as fait, et c'était mal; oui. Mais ce n'est pas la fin du monde. La seule chose qui le serais, actuellement, c'est que tu partes. Que tu me laisses seule. Je t'ai pardonné, bien que je ne pense pas qu'une telle chose nécessite un quelconque Pardon. Si tu partais, c'est là que tu pourrais, et même devrais, te haïr. Parce que ce serais la plus grosse connerie de ta vie. Ça n'aiderait ni toi, ni moi. Parce que tu sais très bien que tu as besoin de moi. Qu'on a besoin l'un de l'autre, et que s'éloigner ne ferait rien d'autre que nous détruire, plus ou moins violemment. Alors, une dernière fois, je te le dis, te le répète, te le demande: Regarde-moi. Regarde-moi et reste. Parce que je t'aime. Parce qu'on est pas "toi" et "moi", mais Nous. Je t'aime... finis-je, ancrant mon regard dans le sien, mon regard brouillé par les larmes qui coulaient lentement de mes yeux; et le forçant à voir que tout ce que je venais de lui dire, je faisais plus que le ressentir: j'en souffrais, oui je souffrais de le voir se détruire pour ce qu'il pensait avoir fait d'horrible, et qui ne l'était pas. 

Alors, il se mit lui aussi à pleurer. Ses yeux commencèrent à briller, son regard se voila, et les larmes finirent par poindre au coin de ses yeux. Et alors, enfin, il me prit dans ses bras. Ses bras, si chauds et accueillants, si forts et protecteurs. Il me serra contre lui, fort, si fort que je sentais son coeur battre près de mon oreille; et me murmura avec beaucoup de difficulté, comme au creux de mon âme: Je te regarde.




Inspirations d'ici et làWhere stories live. Discover now