BUFFALO, NEW YORK, 1886
La première fois que j'avais vu un fantôme, j'avais dix ans. C'était celui de ma mère.
* * *
Il neigeait le jour où ils enterrèrent la mère d'Edith Cushing. Des grands flocons humides pleuraient dans un ciel de plomb. Le monde n'avait plus de couleur. Habillée pour un deuil dans un manteau noir et un chapeau qui encadrait son visage blanc, la petite Edith se pencha en arrière. Son père, derrière elle, l'entourait avec ses bras. Les autres proches en deuil portaient des grands chapeaux noirs, des voiles noirs, des manteaux et gants ébènes, et des bijoux forgés avec les cheveux de leur propre défunt. Les habitants de Buffalo possédaient tous un habit pour pleurer. Ils lançaient des poignées de terres et de roses sur les tombes fraîchement creusées.
Le cercueil en obsidienne contenant le corps de la mère d'Edith luisait. Les porteurs l'emmenèrent jusqu'à son dernier lieu de repos, un monument érigé dans l'espoir du repos éternel pour les membres de la famille Cushing. Des tourbillons de pleurs enveloppaient les générations de morts.
Le corps ratatiné de sa mère avait été si noire qu'elle semblait être morte dans un incendie... ou alors, Edith avait entendu Mme Cook le décrire de cette manière à DeWitt, leur majordome. Elle avait été choquée par cette horrible révélation, mais il n'y avait aucun moyen de confirmer que les paroles de Cook soient vraies. Dans la maison des Cushing, personne ne lui avait parlé de sa terrible perte ; toutes les servantes se taisaient quand elle entrait dans une pièce. Elle se sentait aussi invisible qu'un fantôme ; elle voulait et avait besoin de quelqu'un sur qui compter, et lui raconter une histoire ou chanter une berceuse. Mais les domestiques gardaient leur distance, comme si la petite maîtresse portait malheur.
Dans le cimetière, Edith repéra Alan McMichael et sa sœur, Eunice. Alan avait un ans de plus qu'Edith, une tête blonde et des joues roses. C'était un de ses compagnons pour tout et n'importe quoi. Ses yeux bleus-gris, la seule source de lumière dans ce cimetière, trouvèrent son regard et fixèrent Edith, presque comme si il lui tendait la main.
Mais Edith avait seulement perdu sa mère, ce qui était nouveau et déconcertant. Cœur brisé. Ses yeux se mouillèrent de larmes qui ne voulaient pas couler. Elle ne voulait pas en faire une histoire ; les enfants bien élevés ont été vus et non entendus, même lorsque leurs mondes tombaient. Alan, la regardant, semblait être le seul qui comprit sa douleur insupportable. Des larmes brillaient dans ses yeux.
Le choléra avait emporté sa mère. Une mort horrible, agonisante et lente. Alors le père d'Edith commanda un cercueil et lui demanda de ne pas regarder. Il n'y eut pas de dernier baiser, pas de dernières paroles, pas d'adieux.
* * *
Et ce fut ainsi jusqu'au soir où elle réapparut. Trois semaines après sa morts.
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Crimson Peak
Fanfiction" Mais l'horreur... L'horreur, c'était par amour. Guidés par un tel amour, nos actions sont laides, démentes, pleines de sueur et de regrets... Cet amour nous consume et nous meurtrit, nous entraîne et nous fait chavirer. C'est un amour monstrueux...