Chapitre 2

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Elle atteint enfin la route. Elle était essoufflée par sa course et épuisée par la sollicitation trop intense que ses sens avaient reçu. Son regard se posa sur l'asphalte. Il semblait miroiter. Sa surface n'était pas stable. Elle craignait de s'y enfoncer. Elle attendit. Elle ne saurait dire combien de temps. Elle avait peur. Peur QU'ILS ne soient pas loin. Peur que le bitume l'engloutisse. Depuis peu tout semblait vivant. Les voitures passaient rarement et ne s'arrêtaient pas. Leurs phares paraissaient des yeux et leurs plaques d'immatriculation des bouches au rictus sévère. Ces visages la regardaient méchamment. L'angoisse se lovait de plus en plus autour de sa colonne vertébrale. Elle aurait aimé trancher sa tête à ce serpent de glace. 

Une voiture daigna enfin s'arrêter. Son conducteur était un vieil homme au teint bruni par le vent. Il ouvrit la fenêtre. Elle n'aimait pas ses yeux. Des yeux de corbeau. Mais elle n'avait pas le choix. Il fallait qu'elle parte. Elle s'approcha de la portière. Elle ne pouvait pas dire où elle voulait aller, elle n'avait aucune idée de l'endroit où elle se trouvait. Le vieil homme se pencha :

-Je vais à Linetown, est-ce là où vous voulez vous rendre ?

-Qu'elle chance ! C'est exactement là où je dois aller !

Elle avait oublié le son de sa voix. Elle la fit sursauter. 

-Alors entrez jeune fille !

Elle sourit. Cet homme la prenait pour une adolescente. C'était amusant de voir la faculté qu'on les vieilles personnes de prendre tout le monde pour des enfants. Elle se dirigea vers la portière. Le conducteur s'esclaffa :

-Montez plutôt devant mon enfant ! 

Elle accepta à contre-cœur. Elle n'était pas rassurée. Le serpent ne s'était toujours pas décidé à quitter son échine. Elle détestait voir la porte se refermer derrière elle. Le vieil homme tapotait nerveusement le volant avec ses doigts. Elle décida d'observer le paysage par la fenêtre. La nuit commençait à tomber. Les étoiles pour l'instant pâles dessinaient des tourbillons dans le ciel. Elle se mit à penser qu'il y avait peut-être des âmes qui tenaient à elle là-haut. Elle n'avait jamais cru à Dieu ou à n'importe quelle autre religion mais elle aimait parfois à imaginer qu'il y avait quelqu'un pour veiller sur elle. On devait être encore en automne. Le noir couvrait rapidement le bleu. Elle jeta un coup d'œil sur le cadran de la voiture. Dix-huit heure trois.  Elle ferma les yeux. Le noir. Tellement agréable. 

La voiture s'arrêta enfin. Le conducteur lui dit au revoir. Elle ouvrit la portière et lâcha un grand soupir de soulagement. Il n'y avait plus qu'à espérer qu'ILS ne l'aient pas suivi.

Elle ne savait plusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant