Chapitre 20 : Renouer les liens

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Debout au milieu d'une grande pièce, le regard perdu dans le vide, le teint pâle, Enoch n'avait plus rien du grand mage qu'il était il y a seulement quelques jours. Un collier d'où émanait une lueur verte, magique, était sanglé à son cou, attaché lui même à plusieurs chaînes en métal qui trouvaient leurs origines dans les murs en briques du jadis bâtiment de l'Église de la Lumière, désormais sous le contrôle d'Agnar et de ses troupes, comme l'entièreté de la capitale. Le nouveau tyran de la ville se trouvait face à son père, souriant, impassible.

« Tu te rends compte Papa ? On a pris notre première ville ! Si tu avais encore une once de conscience, tu aurais pu admirer le spectacle de la Haute Prêtresse de l'Eglise de la Lumière en train de hurler, le corps consummé par les flammes. Par tes flammes. Tous ces paladins... Me suppliant de les épargner. Je me demande comment réagira Silverberg en revenant. Il n'aura plus que son Dieu pour pleurer. N'es-tu pas fier de moi ? C'est ce que tu voulais ! Un monde où les démons et leurs descendance pourraient enfin vivre librement ! Sans se cacher ! Plus jamais ! »

Seul le silence lui répondit. Enoch ne bougeait pas, aucune émotion ne traversait son visage. Et pour cause. Le dispositif autour de son cou lui empêchait tout mouvement sans ordre de son « maître ». Ses actes, ses transformations, tout passait désormais par Agnar. Le démon que les Eglises avaient tenté d'abattre par tous les moyens s'était bêtement fait trahir par son propre fils. Ce dernier regrettait d'avoir fait appel à la force pour le maîtriser, mais au moins, il ne lui posait plus de problèmes.

« Je sais que tu es encore là, dit-il calmement. Qu'est-ce que ça fait d'être prisonnier ? Tu souffres ? Ce n'est que le début. Tu sais, j'ai imaginé des dizaines de moyens de tuer Balthazar, mais je veux voir son regard quand tu lui arracheras le cœur. Et après, peut être que je te redonnerais le contrôle. Je ne t'ai jamais porté dans mon cœur Papa, si je peux te détruire en même temps que lui... Je n'hésiterai pas, tu le sais ça ? »

Il fit signe à deux demi-élémentaires d'entrer, ils commencèrent immédiatement à défaire les chaînes retenant Enoch prisonnier. Le mage tourna la tête vers son maître, toujours impassible.

« Ramène-moi Balthazar. Vivant. Tue tout ce qui osera se dresser sur ton chemin. Tu as la permission d'utiliser ta forme démoniaque si tu en vois le besoin.

- Oui, maître. »

Il quitta la salle, guidé par un instinct qui lui était propre. Agnar le regarda faire, sourire aux lèvres. Son visage redevint rapidement sérieux. Il se tourna vers l'encadrement de la porte.

« Magnus ! »

Un demi-élémentaire de ténèbres ne tarda pas à apparaître, habillé d'une longue robe couleur charbon. Il s'inclina respectueusement. C'était le bras droit du demi-diable, il l'accompagnait dans toutes ses actions. Il était certes sous contrôle et par conséquent non-consentant, mais représentait un outil de travail précieux.

« Oui Maître ?

- Que les soldats ramènent tous les enfants humains de cette ville sur la place publique. Et exécutez-les. Je veux montrer à nos très chers amis que ne plaisante pas.

- Bien, Maître. »

Il se retira, laissant Agnar seul dans la pièce. Le demi-démon se mit à sourire, ravi. Enfin les choses prenaient la tournure qu'il voulait. Plus rien ne pourrait l'arrêter, il en était certain.

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Aranwen n'était définitivement pas à l'aise. L'elfe et ses deux compagnons, Shinddha et Viktor, patientaient devant la grande double porte en bois menant à la salle du trône, le temps que son père termine l'audience du jour, qui consistait en fait à une grande plaidoierie du peuple visant à améliorer leurs conditions de vie. La jeune femme tournait en rond dans la salle d'attente, nerveuse, sous les regards de ses deux nouveaux amis un peu perdus. L'inquisiteur de la Lumière restait digne, mais la chaleur des sous-terrais semblait le déranger quelque peu, tout comme Shin, qui baissa sa capuche, dévoilant sa longue chevelure noire et le reste de son visage. L'elfe et l'humain stoppèrent tout mouvement, choqués. C'était la première fois qu'ils voyaient son visage en deux semaines de voyage.

Royaume en Perdition | Fanfiction AventuresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant