23 juin 2011- 6h12Quelque part dans l'Illinois
Là où résonnait le triste silence de la Route 14 à quelques kilomètres de Inverness, des pas discrets mais pourtant déterminés brisèrent cette sérénité. Une ombre tentait de se démarquer du bitume qui se réchauffait au fur et à mesure que le soleil se levait.
Grosses chaussures noires de l'Armée américaine aux pieds, collants déchirés, genoux écorchés et veste en jeans frottant contre le sac à dos. Seule et fugitive depuis maintenant 31 heures, Dolores savait qu'il lui était désormais impossible de revenir en arrière. Les dés étaient lancés, le destin était trafiqué.
Un son progressif se faisait entendre, celui des pneus contre le goudron gris. La jeune fille balança ses cheveux blonds en arrière pour guetter le véhicule en approche. Elle redirigea son regard vers le devant de son chemin. Même dos au bruit du moteur elle pouvait deviner à quelle distance il se situait. Et quand il fut à une cinquantaine mètres, elle put sentir le véhicule ralentir. Elle ne voulut pas se retourner une seconde fois. Elle savait qu'il lui restait environ une quinzaine de kilomètres, soit 3 heures de marche, avant d'arriver à la petite ville d'Inverness ; elle réalisa alors que cette voiture n'était peut-être pas une mauvaise chose pour sa fuite.
Elle afficha son plus beau sourire, se retourna; avança vers la voiture sans pouvoir bien apercevoir le conducteur quand elle fut assez proche elle fit un petit signe timide du bras et toqua trois coups contre la vitre. Un homme, qui était en train de fouiller dans le vide poche se redressa, elle lança :
"- Bonjour, pourriez-vous m'aider s'il vous plait ?"
*
21 juin 2011- 19h45
Palatine, Illinois
Deux ou trois cachets contre le mal de tête, un pour le sommeil, et deux contre les idées noires. Tel était le repas de Dolores chaque soir, souvent accompagné de quelques noix. Accoudée à l'évier, la tête enfouit dans les mains, elle se répétait inlassablement que ça irai mieux. Elle sursauta lorsqu'une main ouvrit la porte de la salle de bain sans prévenir. Une grosse masse de chaire rentra dans la petite pièce et alluma l'eau de la douche. Cette dame ronde, nue, qui faisait part de ses rondeurs, c'était sa mère.
"- Putain Maman ! Tu pourrai frapper avant d'entrer, et attendre qu'il n'y ai plus personne, tu ne vois pas que je suis pas habillé...
- C'est bon, t'es en sous vêtements, qu'est ce que ça te fais que je te vois comme ça ? demanda Mme Storm qui se glissa sous l'eau chaude.
- Ca me gène c'est tout...
- Oh c'est bon, t'es sortie de mon corps, j'ai bien le droit de voir ma fille à poils quand même. T'es à moi, je fais ce que je veux de toi ! lança la mère d'un rire gras."Juste avant de sortir de la salle de bain et de laisser sa mère nettoyer ses grosses formes désagréables, Dolores tenta d'attraper une brosse à cheveux qui trainait sur le rebord de la baignoire. En la saisissant, la jeune fille reçue une claque sur les fesses.
"- Maman arrête !
- On a plus le droit de rire ici ? Oh l'adolescence !"Et Dolores claqua la porte avant de descendre dans le salon. Son père lui ordonna de mettre la table car "personne ne foutait jamais rien dans cette maison à part lui". Elle posa les trois assiettes sur la petite table de la cuisine, sortis les couverts du tiroir, mit le sel, le poivre à leur place, prit du frigo les vieux restes du début de semaine.
Le mal lui montait à la tête, et elle savait que si elle ne faisait rien la dépression reviendrai si ce n'était déjà pas le cas... Entre une mère un peu trop tactile, pas très pudique, un père à bout de nerf, impulsif, sans gène et une maison vide remplie de cris, Dolores sait pertinemment qu'une minable petite vie lui était destinée mais ce n'était absolument pas ce qu'elle souhaitait, ni même ce qu'elle méritait.
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Psycho Killers
Mystery / ThrillerC'est bouleversant de se rendre compte, un jour, qu'on ne peut rien changer à la minable vie que le destin nous a promis. On prie secrètement le ciel de nous réserver un avenir meilleur sans jamais réellement prendre son courage à deux mains et fair...