Je sais pas pourquoi, mais au début de Demi morte, comme j'avais rien de personnel à raconter, j'avais tout plein de digressions qui me venaient toutes seules et qui m'encombraient le ciboulot. Des broderies, mais bien ficelées, style percutant. Pas un mot de trop, pas un mot qui manque, pas un mot mal placé. Des répétitions bien fagotées, ternaires si possible, avec du vocabulaire bien choisi, une syntaxe bien travaillée. Le tout raconté bien peinard à l'abri d'une apaisante troisième personne, avec tout plein de métaphores bien enfilées. Une digression : suffisait d'inventer un nouveau personnage, avec un bel attribut bien visible, une Ferrari par exemple, ou un bel accessoire pas banal, comme un nœud papillon en bois, et d'introduire quelques péripéties bien senties, comme une panne d'essence, en hiver, sous la pluie, sans oublier les détails qui claquent, côté vocabulaire juridique par exemple, ou bien un chien qui passe...
Maintenant, c'est de moi qu'il s'agit. Alors je flippe. Plus aucune digression qui vient. Du brut de décoffrage. J'oublie les verbes. J'ai les négations qui trébuchent, le vocabulaire qui se relâche, les mots qui manquent, la phrase qui flanche. Ça tombe comme ça tombe. Plus l'envie. Pas le temps. Ça urge. Et quand ça urge pas, je suis tellement crevé : au lieu de reprendre, de réfléchir, de peaufiner, je pionce !
Alors là, désolé, mais à part l'avion, où j'ai dormi comme un loir pendant qu'Hector et Dylan ont passé le voyage à discuter avec Francine, j'ai absolument rien à raconter. Eux, peut-être, mais c'est à peine s'ils tournent seulement la tête quand je leur pose une question.
Sauf la voiture, à l'arrivée, si vous y tenez : Ford Taurus noire, moteur V6. Ou le motel, gracieusement offert par l'ami Hector. Route 408, à la sortie de Monterrey, direction Los Angeles. Un motel normal, avec ses coursives et son gardien de nuit glauque, dont on pige à peine un mot sur quatre.
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DEMI MORTE
General FictionCette grand-mère ignoble, cette infâme salope nous possède tous à notre insu. Non contente de dévorer sa famille comme ses amants, elle s'apprête à nous ajouter à son festin. Wattpadiennes, Wattpadiens, il va falloir nous en débarrasser. Mais je n'...