Chapitre 15

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Luc m'offre sa veste pour me réchauffer. Mes habits sont trempés, c'est vrai que je grelotte. Le soleil chauffe, mais ce n'est pas comme ça que je vais sécher. Luc a pensé à amener une serviette, et il s'allonge dessus. Tant pis. Je retire mon chemisier, puis mon jean. Du coin de l'oeil, je vois Luc me reluquer. Ah, sympa le jeu de mots. (Luc... reLUQuer... ok ma gueule)
Je pose mes habits sur mon sac, et m'allonge sur la serviette. Luc n'a pas cessé de me mater. Je le regarde en haussant un sourcil.
-Tu veux une loupe?
Il rougit et baisse les yeux. Je souris.
-Pardon, bredouille-t-il. J'ai juste pas l'habitude de...
Il me jette un coup d'oeil.
-Moi non plus.
Interrogatif, il me regarde. On est allongés l'un en face de l'autre sur la serviette, avec à peine dix centimètres entre nous.
-J'ai pas l'habitude de ça. D'avoir quatre mecs qui rient avec moi, se chamaillent pour être assis à côté de moi et se baladent torse nu devant moi sans aucun complexe.
Luc m'observe sans rien dire.
-Je ne sais pas ce qui a changé.
Je me tourne sur le dos et observe le ciel. Le regard de Luc me brûle, je sais qu'il regarde ma poitrine, mais je me contente de sourire.
-Et avec Hugo?
Je ricane.
-C'était un connard qui m'a manipulée et...
Et il tombait à pic. A peine la chasse au mec ouverte, en voilà un qui me tombait dans les bras. Qu'est ce qu'il avait dit, à la fête? Elle m'avait dit que ce serait facile, c'est injuste.
Oh bordel. Dites moi que ce n'est pas Olivia qui a poussé Hugo vers moi. Je décide d'en avoir le coeur net, et j'envoie un texto à ma Best. Puis je me tourne vers Luc, qui n'a pas cessé de me regarder.
Finalement, on finit par parler de nous un peu, de nos goûts surtout, il me dit qu'il dessine depuis qu'il est tout petit. Et de fil en aiguille, je finis par parler de la chasse au mec, ce jeu stupide que j'ai inventé avec Olivia. Luc pose sa tête sur son bras en souriant.
-C'est pour ça que tu m'as embrassé?
-Euh... je sais pas. Je suis désolée, Hugo venait de me faire son coup dégueulasse et tu étais tellement gentil avec moi que je... enfin...
-Pardon de t'avoir repoussée comme ça. J'ai... du mal avec les filles.
Je le regarde longuement.
-Pourquoi, quest ce qui t'es arrivé? Au lycée, on dit que... Que tu repousses toutes les avances des filles parce que tu as eu un souci avec une fille.
Il roule sur le dos. Je pose mon regard sur son visage, ses joues qui ont l'air si douces, ses lèvres délicieuses, ses yeux marrons très sombres dans lesquels règne la tristesse.
-J'avais... une petite-amie. On vivait une sorte de... passion interdite. Si nos parents l'apprenaient, on était fichus.
-Et ils l'ont appris?
Il a un rire amer.
-Si seulement! Un jour, on avait décidé de sécher les cours. On est partis sur ma moto et...
Je sens qu'il a du mal à parler, qu'il s'apprête à me révéler quelque chose qui le hante sans doute depuis des années.
-Elle a voulu faire comme dans les films.
Sa voix est douloureuse.
-Elle s'est levée sur la moto et moi, j'ai... je l'ai regardée. Parce qu'elle était belle, que je l'aimais et qu'elle riait aux éclats.
Il tourne un regard désespéré vers moi.
-Une seconde, pas plus! La moto à cogné contre quelque chose et Alicia à valsé. Je m'en suis sorti avec une cicatrice mais elle, elle est...
Il étouffe un sanglot et je vois une larme couler sur sa joue.
-Elle est morte. Ses parents ont demandé à mes parents de les dédommager. C'est pour ça que mes parents me détestent. Ils m'ont déshérité et ne me considèrent plus comme leur fils. Et je les comprends. J'ai... j'ai tué Alicia!
Il se met à pleurer. Je pose ma main sur sa joue et lui embrasse le front.
-C'était un accident, Luc...
-Si je n'avais pas levé les yeux... Elle serait encore en vie.
-Et peut être aussi si elle ne s'était pas levée, si vous n'étiez pas partis en moto, et sûrement si vous ne vous étiez pas rencontrés.
-Je me le dis souvent. Elle aurait été plus heureuse sans moi.
-Ça m'étonnerait.
Je lui souris gentiment. Il a vraiment l'air perdu, et je comprends pourquoi il met des râteaux à toutes les filles.
-Je pense qu'Alicia aurait été mieux sans moi.
-Pourquoi? Tu regrettes de l'avoir rencontrée?
Il ferme les yeux et secoue la tête.
-Je l'ai tuée...
-Luc, s'il y a un chose dont je suis sûre, c'est que tu n'es pas un assassin. Moi... moi aussi j'ai perdu quelqu'un.
Il me regarde, et c'est à mon tour de fermer les yeux et de sentir les larmes affluer.
-C'était il y a trois ans. Quand je me suis levée le matin, je n'ai même pas pensé à lui dire quelque chose d'autre que salut. J'aurais...
Ça fait mal de parler de ça. Après toutes ses années...
-J'aurais voulu lui dire plein de choses. Mais dans la journée, on est venu me chercher au collège, et on m'a dit que... Que ma soeur était morte.
Luc ferme les yeux. Je sens les larmes couler sur mes joues.
-Ma mère a décidé de partir et pour effacer sa douleur, mon père a sombré dans l'alcool. Ils n'ont jamais voulu me dire comment elle était morte.
-C'était ta petite soeur?
-Non. C'était ma soeur jumelle.

La chasse au mecOù les histoires vivent. Découvrez maintenant