Chapitre 3

31 0 1
                                    

Rien que de lire les questions m'avait donné mal à la tête. Je n'étais pas seulement déprimée en fait, j'étais tout simplement déprimante !

Le m. Raving qui m'avait laissée une autre chance n'était autre que celui que je connaissais l'an dernier, et pas l'espèce de colérique sur les nerfs qui craquait au moindre de mes écarts, aussi grands soient-ils. Il avait essayé d'être gentil et je n'étais même pas capable d'avoir la moyenne, je n'imaginais même pas dans quelle colère il allait encore partir.
A cette idée, une minuscule larme perla au coin de mon œil, et coula sur ma joue sans que je ne réagisse.

"Alice ? Pour... Pourquoi pleures-tu ?" me demanda mon professeur, chuchotant presque. Il tira une chaise, la plaça à côté de la mienne et m'ôta mon stylo des mains. "Tu veux que je... Enfin je peux t...» Reprit-il bafouillant. Me prendre dans vos bras monsieur ? Avec plaisir... "Bon allez je t'aide pour cette fois mais tu ne le dis pas aux autres ok ?" Dit-il finalement, ramenant son regard incertain sur le mien. Après mon approbation, nous nous penchâmes sur ce petit contrôle. Un peu plus tard, il me fit remarqué qu'à m'entendre j'avais assez faim pour manger la table. Dit-il au moment où son ventre hurle à la mort comme pas permis ! Un fou rire nous prit tous les deux et permis de renouer les liens que je croyais perdus. Je ne pensais plus à rire ni à m'amuser ces derniers temps, et je dois avouer que ça m'avait plus manqué que je ne le pensais. Nous dûmes travailler pendant encore une bonne heure, et il ne me laissa pas partir avant d'être certain que tout était rentré dans ma petite tête.

Après lui avoir dit au revoir, je rentrais chez moi, remarquant qu'il était déjà tard. Tout en me préparant une assiette de pâtes toute simple, je songeais à ma soirée. M. Raving avait été adorable... Il ne m'avait posé aucune question, rien dit de désobligeant, mais ne m'avait pas laissée seule et ne m'avait pas simplement dit de rentrer chez moi. Il était resté, avait essayé de me faire rattraper une partie de mon retard, et ayant affaire à une élève pas trop bête qu'il connaissait déjà, c'était aller plus vite qu'il ne l'aurait cru.

Trop fatiguée pour faire quoi que ce soit d'autre, je me préparais à dormir. Une grimace tordit mon visage alors que je me glissais sous les draps, j'avais bien assez travaillé ce soir !

En me réveillant d'un sommeil sans rêve, j'avais pris ma décision, j'allais essayer de faire un effort. Pour commencer, j'essayerai d'être à l'heure pour ma première heure, maths. Je détestais cette matière mais la prof était toute gentille et me laissait plus que tranquille. Ne rêvons pas, je n'allais pas me mettre à avoir les meilleures notes du jour au lendemain. Mais j'avais déjà suivi ce chapitre l'an dernier, je ne devrais pas avoir trop de mal à me remettre au niveau.

L'an dernier, mes profs voyaient une élève entourée, agréable, toujours dans les meilleurs de sa classe. Cette année, les rares fois où je finissais une heure, ils me voyaient comme un cas désespéré, qu'il était inutile de tenter de repêcher.

Après avoir essayé d'arranger mes cheveux, je descendais dans la cours de l'établissement, j'attendais maintenant à côté du rang de ma classe. Etre à l'heure était devenu si rare que j'en oubliais ce que c'était d'attendre son cours avec ses potes dans le froid du matin. Les potes.... Ca me manquait un petit peu. Mais mes camarades de classes ne pourraient pas comprendre pourquoi je ne voudrais pas les inviter chez moi, ni pourquoi je ne supportais pas qu'on me parle de tout ce qui approchait une famille. Ils seraient surement trop immatures pour comprendre ce que je vis, surtout que je n'étais pas prête de leur raconter mes petits soucis.

Tout en ruminant, je surpris le regard étonné de ma prof de maths et le sourire de m. Raving, qui ne m'avaient jamais vu en cours avant 10 heures. Sans un mot, je me calais sur le pas de ma classe et entrais dans ma salle de cours. C'est fou ce qu'une heure de cours peut vous paraître longue quand vous avez l'habitude d'en dormir plus de la moitié. Mais je tins bon ce premier jour. Tout ce passa plus ou moins normalement, j'ouvris pour la première fois mes cahiers, encore vierge après un trimestre de cours. Avant de rentrer chez moi, je m'assurais de ne pas avoir oublié mon article. Le sentir contre ma cuisse me rassura et je pénétrais enfin mon studio. Et pour la première fois depuis longtemps, j'ouvris mon agenda pour me mettre au boulot, comme je l'avais constaté aujourd'hui, j'avais du retard à rattraper !

Une semaine, puis deux se déroulèrent ainsi, mes profs prenaient peu à peu confiance en moi, et moi de même. Je passais plusieurs soirées en compagnie de m. Raving pour faire le point dans mon travail, toutes matières confondues. Mes lacunes se comblaient sans vraiment de problème, j'avais déjà étudié tout ça l'an dernier, ce n'étaient que de lointaines révisions en somme.

Un de ces soirs, m. Raving leva la tête de ce devoir de géographie qui l'ennuyait tout particulièrement, et me proposa d'aller boire quelque chose au café du bas de la rue. Devant mon incrédulité, il retira hâtivement son invitation. J'éclatais d'un rire franc face à sa gêne et acceptais, avant de prendre ma veste. Cette soirée me marqua tout particulièrement, je ne sortais plus du collège que pour des courses ou autre broutille. M. Raving ouvrit la porte et me fit entrer dans le bar galamment. Je lui souris et tirais l'une des deux chaises d'une table reculée.

La conversation allait de bon train, même si nous ne parlions jamais de lui ni de moi. Cette situation me convenait parfaitement, mais je me doutais qu'elle ne durerait pas. Mes intuitions se confirmèrent quand il perdit son sourire et me regarda dans les yeux en silence pendant quelques secondes.

« Quelque chose ne va pas ? Lui demandais-je.
- Tu ne m'as jamais rien dit sur toi, tu sais ?
- Je ... Oui enfin j'ai conscience de ... mais ... » bafouillais-je. Je ne savais plus où me mettre. Pourquoi ce soir, alors que tout se passait très bien ? Je savais bien que cette situation ne durerait pas...
« Cela fait un certain temps que tu as retrouvé ton petit sourire mais je sais bien qu'il s'est passé quelque chose. Je ne comprends pas, on se tutoie et pourtant je ne sais rien de toi ! Alice, ça commence à faire un moment que ça ne va pas, n'est-ce pas ? Je ... J'aimerai vraiment faire quelque chose pour toi, tu sais...
- Tout va bien François..., ne t'en mêle pas je t'en prie... Merci pour ce soir, à lundi. », Je quittais la salle sans un mot, je l'entendis se lever après moi et sentis son regard triste me suivre tandis que je zigzaguais entre les tables pour atteindre la sortie. Ce soir-là je rentrais chez moi abattue, me souvenant à la fois des raisons pour lesquelles j'étais tombée amoureuse de cet homme et de celles qui m'en avait éloignées.

Réapprendre à vivreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant