Mais tu le fais exprès ou quoi ?! J'en ai marre, DEHORS!!!!" Hurla le prof de français. Je ramassais mes affaires de cours et sortis de la salle sans un mot. Ce n'est pas comme si c'était la première fois qu'il me renvoyait.
Je toquais à la porte du Principal, un vieux rabougri détesté de tout élève ou professeur de ce collège, et entrais dans son vaste bureau.
"Encore toi ? Tu commences à dépasser les bornes tu t'en rends compte ou pas ? Je sais que c'est difficile pour toi depuis le déménagement de tes parents mais tu profites trop de la liberté que les profs t'ont gentiment accordée" continua-t-il sans me laisser le temps de m'expliquer.Il me fixa d'un regard qui se voulait dur, mais n'obtenu pas la réaction voulue. Il ne l'avait jamais eue d'ailleurs, je soutenais son regard, indifférente.
"Tu es renvoyée pour trois jours, rentre chez toi." reprit-il finalement.Je quittais la pièce mais ne sortais pas le collège par la porte principale. En effet, j'habitais un des appartements du bâtiment administratif. Et il y avait une raison bien précise à cette adresse étrange pour une élève.
Si le Principal pensait que j'habitais au-dessus de son bureau à cause du déménagement de mes parents à l'étranger, c'est tout simplement parce que c'était la version "officielle" que j'avais divulguée.
Mes parents n'avaient pas déménagé, enfin d'une certaine façon si.Je tournais la clef dans ma serrure, jetai mon sac au sol, et m'écroulais dans mon lit comme chaque fois que je rentrais chez moi.
Et comme chaque jour, la même scène se déroulait dans mon esprit.
Tout ça parce que j'étais en pleine crise d'adolescence et que j'étais en colère contre tout le monde il y a quelques mois.Le jour où tout a basculé, je rentrais d'une journée que je n'avais pas réussi à appréciée, comme d'habitude...
Et apparemment, mon paternel non plus. Et ce qui arrivait chaque jour depuis qu'il avait commencé à boire, arriva. Il entra dans une colère noire en apercevant ma mère assoupie dans le canapé. Pourquoi ne travaillait-elle pas ? Pourquoi s'autorisait-elle un moment de répit alors que ses tâches interminables l'attendaient encore ? Ma mère avait toujours été la servante de mon père, mais c'était de pire en pire et la pauvre femme se tuait un peu plus chaque jour à la tâche.Un réveil brutal l'attendait, mon père enroula ses cheveux autour de son poignet et la traîna ainsi dans toute la pièce. Il la lâcha enfin pour la sermonner durement. Son épouse pleurait, mais au lieu s'apitoyer face à ses larmes, il la roua de coups, tous plus violent les uns que les autres. Et c'était là le spectacle auquel je devais assister chaque jour.
Voyant qu'il ne s'arrêtait pas, je compris que ce n'était pas son intention aujourd'hui. Du haut de mes 15 ans, je décidais enfin de m'interposer. Enfin, car m'étant une nouvelle fois disputée avec ma mère le matin même pour une broutille, j'avais décidé de la laisser se débrouiller, après tout, c'était son mari. Grosse erreur. La rage de l'homme qui se dressait devant nous n'en fut que décuplée. Il choisit de s'occuper de moi avant de finir avec sa femme.
Si son premier uppercut ne m'étala pas de suite au sol, les coups suivants s'en chargèrent sans problème.
Jamais il n'avait frappé aussi si fort que ce jour-là, comment ma mère pouvait supporter un homme de ce genre dans son lit depuis une dizaine d'année.
Ma vue se brouilla, la douleur que je ressentais dans la cage thoracique m'était familière, j'avais si souvent senti mes cotes se briser... Si souvent, trop souvent.J'entendais encore ma mère me dire que son époux n'avait pas toujours été comme ça, qu'il redeviendrait bientôt comme avant. Je n'y avais jamais cru, une ordure de sa trempe ne pouvait pas changer. Et tant pis pour nous.
Toujours au sol, mon père m'assena encore quelques coups de pied dans l'estomac.
J'avais remarqué depuis longtemps qu'il ne cognait qu'au niveau du T-shirt pour ne pas être accusé de maltraitance. Si seulement quelqu'un s'était rendu compte de ma situation... Si seulement, mais non.
Alors que je perdais connaissance, j'entendis les cris de ma mère s'intensifiés puis s'affaiblir petit à petit.Cette scène qui se rejouait sans arrêt dans mon esprit, me tuait peu à peu. J'avais ensuite ouvert les yeux au milieu d'un cercle de pompiers qui s'affairaient à me maintenir en vie.
Ils avaient réussi, mais pas ceux qui s'occupaient de l'autre femme sur le brancard voisin, dont les blessures étaient trop graves. Je mis un moment à comprendre que c'était ma mère. Assassinée. Par mon père, rapidement envoyé derrière les barreaux.
Depuis ce jour, rien n'était plus pareil, j'avais redoublé ma troisième, et j'avais perdu tous mes anciens amis. Le seul prof que je connaissais était le prof de français qui me haïssait tout particulièrement cette année, alors que l'an passé, j'étais presque amoureuse de lui. Presque ? Ce n'était plus une question à l'ordre du jour malheureusement.
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Réapprendre à vivre
RomantizmQue faire quand tout est détruit ? Quand il ne nous reste rien pour recoller les morceaux ? On dit souvent qu'une rencontre peut changer une vie. Et si c'était lui, ce prof qui nous surveille derrière son bureau ...?