Chapter 26 -Mike-

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L'avion survole la Seine nous arrivons sur Paris. Ange a été acceptée aux Beaux Arts, une grande école apparemment....

Brutalement je me rends comte que je ne me suis pas renseigné sur l'endroit on nous allons... De plus quelle langue parle-t-on ici? Certainement français, mais l'anglais est la langue officielle non?... En replongeant dans mes années primaires quelques cours me reviennent... Je vais m'en sortir.

Nous atterrissons après huit heures de vol, puis nous prenons un taxi auquel j'indique l'adresse qu'Ange m'a donnée. Le trajet se passe paisiblement cependant je remarque de légers cernes violâtres sous ses cils... Nous sommes exténués. L'automobile ralentit et nous dépose devant un portail imposant. J'appuie sur la sonnette et un homme me répond avec un fort accent français puis les portes s'ouvrent.
Je découvre en même temps que ma protégée l'immense construction en pierres anciennes et aux imposantes verrières.
Nous traversons l'allée principale jonchée de chênes centenaire, accompagnés par le parisien qui nous a ouvert la grille. Encore avec son accent à couper au couteau il nous adresse la parole :

"- Bienvenue aux Beaux Arts! Je suis Caleb Deschamps délégué principal! Vous êtes...?"

Donc toi t'ouvres au gens sans te renseigner avant? Okkkk

"-Mike Warscot et Ange Walker, nous venons de Londres." m'affirmé-je spontanément dans un français correct.

Je m'en sors pas si mal finalement. Toutefois Caleb reprend en Anglais.

"-Ho désolé! Oui je me souviens de vous. Rassurez vous, la plupart des étudiants parlent couramment anglais....

Sur la même tonalité, il continue la présentation de l'école et de ses activités pendant vingt bonnes minutes. Ange l'écoute attentivement, les yeux maculés de minuscules étoiles.
Je me recule légèrement et l'observe... Elle a l'air épanouie... Cela me... Comment dire? Je... Je n'arrive pas à mettre des mots sur ce que ressens...
C'est un sentiment pesant qui m'attrape à la gorge pour ensuite la nouer puis rebondit dans mon ventre.

J'observe de travers Caleb prendre le bras de ma protégée. C'est un homme qui présente bien, son tailleur bleu marine s'accorde avec sa chemise blanche au col dégagé et aves ses pompes en cuir marron à cinq cent balles. Sans ses fringues, il détient un charme dénué de toute originalité... Grand blond, pâle aux yeux verts serpent qui continuent de reluquer Ange, il est d'une banalité affligeante. Cela ne m'empêche guère de le mépriser.

Pour la première fois je me compare à quelqu'un, il représente tout ce que je ne suis suis pas... Cela saute aux yeux sans le connaître, c'est une personne normale avec une famille normale, des amis normaux, des études normales, un avenir normal, une vie normale. En sorte un humain bien dans son petit cocon de fils à papa. Une de ses personnes, se faisant rares de nos jours qui peuvent vivre sans craindre la vie justement...
Enfin, nous arrivons devant la chambre 272 de l'internat que nous allons occuper cette année. En effet l'école n'a pu nous prêter deux pièces, en revanche elle a mis à notre disposition un vieux lit à étage.
Une ou deux informations inutiles supplémentaires plus tard, Caleb nous laisse enfin seuls...

-

Aux beaux Arts les jours s'écoulent et les rires font maintenant partis de notre quotidien. Caleb et Ange se sont incontestablement rapprochés à mes dépends, chaque instant je l'observe se détacher de moi... Ma situation me fait souffrir, un moment à l'autre je devrai mettre un terme à ce cinéma...
Ma jalousie que j'accepte désormais envers Caleb rend mes sentiments envers Ange indéniables. Maintenant, j'ai trop conscience que le moindre échange avec elle sera une lutte contre ma volonté...

Car aujourd'hui je le sais, je l'aime.

Et il faudrait que je lui avoue avant qu'elle ne m'échappe.

Pressé, je zigzague entre les couloirs de l'école pour retourner à la chambre 272 ou j'y trouverai Ange. Lorsque j'entre dans la pièce je vois celle que j'aime assise sur son lit comme si elle attendait ma venue. Ma petite Ange me sourit et entame alors une conversation mimée qui ne tarde pas à assombrir involontairement l'ambiance :

*-Coucou, il faut que je te parle... C'est sur ce que tu m'as révélé il y a deux mois... Jamais je ne saurai si tu m'as menti pour Dan, comprends moi c'est mon frère... J'ai tellement de mal à croire ta version des faits. Mais si tu veux on oubli, on peut encore faire comme si rien ne s'était passé?*

Choqué, j'ai un brusque mouvement de recul en arrière, mon dos heurte une commode. Je reste physiquement de marbre, pourtant dans ma tête c'est le chaos. Une partie de ce que m'a dit Ange me perturbe, * Comme si rien ne s'était passé*... Mais merde à la fin!!! Son frère a ruiné ma vie et pire, il lui a détruit la sienne! Si aujourd'hui elle est muette c'est uniquement de sa faute! Mais pardon, madame est amnésique car elle n'a aucun souvenir de cette année là et c'est trop lui demander d'ouvrir les yeux, si seulement elle savait... Je reste anéanti, je n'ai plus aucune motivation, après tout cette relation ne mène à rien.
Au pire Ange n'acceptera jamais la réalité pour son salopard de frère, cette nana m'abandonnera, puis, en nouveau petit fragile, j'en souffrirai. Au mieux je resterai à ses yeux le bon copain qui a sûrement tabassé son frère... Rien de plus.
Si seulement quelqu'un pouvait tout lui expliquer...si seulement....si... Mais si!!! Pris dans un élan ahurissant je m'empare d'un des stylos du campus posé sur la commode recherchant activement le numéro de James.
Si elle ne me croit pas peut-être fera-t-elle confiance à son ainé? Je finis de noter le téléphone de mon ami, le frère jumeau de Dan... Encore à ce jour j'ai du mal à accepter que les frères d'Ange soient réellement jumeaux. Celle-ci m'observe un poil paniquée et curieuse de ce que j'ai inscrit sur le post-it jaune fluo. Je lui tend le papier d'une main tremblotante qu'elle agrippe entre ses doigts en retenant ma main.

"-Voilà Ange, malheureusement je ne peux ni t'obliger de me faire confiance ni rester près de toi si tu penses que Dan t'a dit la vérité. Alors, je vais rentrer seul sur Londres, en espérant que tu puisses rester étudier ici... Sauf si tu appelles ce numéro et que tu demandes à la personne qui décrochera de te raconter l'unique vérité. Je pars pour le prochain vole, adieu peut-être."

Je la prends furtivement dans mes bras et m'enfuie vite avant de changer d'avis... Sur le chemin d'un hôtel quelconque je suis remué par l'inquiétude, ma petite Ange va-t-elle appeler James? Chamboulé, le chagrin me submerge... Encore une sensation étrangère ; de l'eau salée ruisselle sur mes joues, ma mâchoire, mon menton, pour enfin venir mourir sur le béton.

L'ange muet (terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant