Pendant des heures, on me laissa seule. La douleur dans mon crâne s'atténua d'elle-même et ne revint pas. Je bougeai à peine. Mes yeux se baladaient le long de la pièce comme pour en retenir chaque détail.
Je réfléchissais. J'avais appris à me méfier, peut-être pas encore assez. Tout me semblait surréaliste, impossible. Puis j'examinai mon bras dépourvu de toute cicatrice, je palpai mon épaule intacte qui, quelques heures auparavant pourtant était toujours douloureuse. Comme si rien ne s'était passé.
Parce que rien ne s'était passé. Et pourtant, je ne me rappelais que du cauchemar qu'avaient été ces derniers mois. C'en était presque humiliant.
La porte de la chambre finit par s'ouvrir après un long moment. Un homme trapu, vêtu d'une blouse blanche, entra, suivit d'une jeune femme habillée de la même manière que les deux individus qui m'avaient administrée le sédatif, un peu plus tôt.
L'homme, probablement un médecin, ne prit même pas la peine de me dire bonjour. Il lança d'un ton vigoureux :
"Bien, voyons : numéro 605, Héloïse, lut-il sur son dossier. Réveillée sans encombre... Parfait, nous allons procéder à quelques petits tests, tu veux bien ?"
Avant même que je puisse répondre, l'homme s'empara d'une petite lampe dans sa poche-poitrine et braqua le faisceau dans mon œil droit, puis gauche.
"Mh, bien, jugea-t-il.
-Ça vous dérangerait de pointer votre lampe ailleurs ? maugréai-je, surprise et aveuglée. Vous croyez pas qu'il est un peu tard pour ce genre de test ?
-Mademoiselle a mauvais caractère, remarqua le médecin. La séance chez le psy ne te fera probablement pas de mal.
-La séance chez le psy ? répétai-je. Comment ça ?
-C'est la procédure. Mais chaque chose en son temps, veux-tu ?"
Il nota quelque chose sur son dossier. L'infirmière qui l'accompagnait m'aida alors à me redresser. Elle s'assura que je tenais assise et je lui fis signe que j'allais bien. On me couvrit ensuite les oreilles d'un casque en m'ordonnant de leur indiquer de quel côté j'entendais les sons qui me parvenaient. Ce n'était pas un exercice pour me piéger, de toute évidence. On finit par me retirer le casque. Le médecin griffonna à nouveau brièvement sur son dossier avant de relever la tête vers moi :
"Bien ! On va passer aux tests moteurs."
J'esquissai alors péniblement un mouvement pour me lever. L'infirmière me saisit les épaules pour me forcer à rester assise.
"Doucement ma grande, on verra plus tard pour se lever, d'accord ?"
Je pinçai les lèvres et montrai à mon interlocutrice que je n'essaierai pas de me lever. Je payais à cet instant ma tentative avortée d'attaque contre Rosley.
"Je vais devoir rester allongée encore longtemps ? demandai-je avec une pointe d'agacement.
-Patience, numéro 605, répondit l'homme.
-Je m'appelle Héloïse, répliquai-je avec un claquement de langue", énervée d'elle appelée par un numéro.
Le médecin chassa ma remarque d'un revers de la main et concéda rapidement à ma réflexion d'un ton pressé. Il m'ordonna ensuite de réaliser des gestes simples avec les mains, comme plier un à un les doigts, les toucher avec les pouces. On me demanda après cela de réaliser des rotations du poignet, de l'épaule, de plier le coude, de tourner la tête d'un côté puis de l'autre. J'avais la désagréable impression d'être une marionnette, clouée dans un lit, réduite à exécuter les gestes qu'on lui ordonnait de faire.
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NIHILIA - II
HorrorJe m'appelle Héloïse. J'ai survécu à des zombies, des chasseurs, des cannibales et des psychopathes. Et je suis morte. Enfin, je le croyais. Cette histoire est le tome II de EPIDEMIA. Si vous ne l'avez pas encore lu, je vous déconseille de commencer...