Chapitre 10

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Quelques jours de quotidien passèrent. Nathalie continuait de rentrer tard du travail et était sans cesse au téléphone. Erinn, quant à elle, passait le plus clair de son temps à lire et à travailler ses devoirs. Elle avait toujours été plutôt studieuse.

Un soir, alors qu'Erinn travaillait à son bureau et que sa mère avait les mains prises dans la pâte brisée qu'elle était en train de préparer, on sonna à la porte.

- Va ouvrir ma chérie, je suis occupée ! cria Nathalie à Erinn.

Erinn dévala l'escalier. Elle prit une respiration et se força à sourire, voulant prendre un air poli. Sans doute encore les voisins à qui il manquait toujours un ingrédient pour faire la cuisine. Quels casse-pieds ceux-là ! Un jour, elle leur enverrait la facture de tout ce qu'ils leur avaient emprunté (et vidé par la même occasion). " Qu'ils aillent faire les courses une bonne fois pour toutes ! " se disait-elle en ouvrant la porte.

- Bonjour Mademoiselle. Ta mère est là ? Je suis le capitaine Clark et voici le lieutenant Marais de la police judiciaire. Nous aimerions lui parler.

Erinn tira une tête de six pieds de long.
Elle s'attendait à tout, sauf à ça. Que voulaient-ils à sa maman ?

Les deux hommes portaient un képi et étaient vêtus d'un uniforme bleu marine sur lequel on pouvait lire " POLICE " en lettres capitales blanches.

Le lieutenant était blond, les cheveux courts et portait une légère barbe vieille de trois jours tout au plus. De fines tâches de rousseur peuplaient ses pommettes et son front.
Le capitaine quant à lui, avait les cheveux encore plus courts, presque rasés, bruns avec un petit bouc au niveau du menton. Ce dernier était plutôt maigrichon et n'inspirait pas vraiment confiance à Erinn. Elle cria :

- Maman, c'est pour toi !

Nathalie se rinça les mains, les sécha à l'aide d'un torchon et accourut dans l'entrée.

- Oui ? C'est pourquoi ?

Nathalie déglutit en voyant les policiers sur le pas de la porte.
" Pas maintenant ! Pas encore... " pensait-elle. Elle se revoyait deux semaines en arrière quand Pierre était venu sonner chez elle pour lui annoncer la mort de son ex-conjoint.

- Erinn, file dans ta chambre s'il te plait.
- Euh... D'accord.

Erinn fit mine de partir mais s'arrêta en bas de l'escalier derrière le mur pour écouter. Et si cela avait un rapport avec la conversation téléphonique de sa mère l'autre soir ?

- Bonsoir Madame, commença le capitaine Clark, nous venons à vous pour vous parler de la mort de votre ancien conjoint, M. David Mercier.

Le lieutenant prit un air plus grave et continua à la place de son collègue :

- Pouvons-nous entrer ?

Nathalie tendit le bras gauche vers le salon pour leur faire signe d'entrer et de s'asseoir sur le canapé. Les policiers s'installèrent sur le sofa. Il reprit :

- Alors voilà, ce n'est pas facile à annoncer mais après une enquête plus approfondie de la mort du père de votre fille, il s'avérerait que son décès soit en fait un meurtre et non un accident " anodin ".

Nathalie s'assit sur le canapé, sous le choc. Elle ne répondit pas.

- En effet, les marques de pneus et les indices laissés sur le lieu de l'accident amènent à penser qu'une voiture sur la voie inverse lui soit rentré dedans. Les caméras montrent une trajectoire organisée et préméditée de la voiture du tueur. Elle est quasiment impossible à effectuer accidentellement. Nous sommes en train de chercher le conducteur de la voiture afin de voir si celui-ci était sous l'emprise de l'alcool ou non. Nous pensions jusque là que c'était votre mari qui était soûl et qui avait terminé sa course dans le fossé, s'étant endormi sur le volant. Des traces d'alcool récentes avaient été retrouvées dans le foie de M. Mercier lors de son autopsie et la cause de sa mort était quasiment certaine pour nous. Veuillez nous excuser de cette conclusion trop hâtive que nous avions faite suite à sa mort.

Il prit une inspiration et conclut :

- De nouveaux éléments nous ont fait rouvrir le dossier mais nous ne pouvons pas en dire plus pour le moment...

Nathalie resta bouche-bée. Ses soupçons se confirmaient. C'est vrai qu'elle s'y attendait plus au moins mais l'entendre de la bouche d'un policier qui était venu jusqu'à chez elle pour le lui annoncer le rendait plus concret. Et plus... cauchemardesque aussi. Elle finit par ouvrir la bouche.

- Êtes-vous sûrs ? Enfin... Je veux dire cela est-il vraiment concret ? Et si l'autre automobiliste n'avait juste pas fait... exprès ? S'il était juste fatigué ou drogué ?
- Il semblerait que ce fut un coup prémédité. Jusqu'à présent, toutes les preuves le confirment en tout cas, affirma le blond.
- D'accord. Je dois vous avouer qu'un de vos collègues avec qui je suis amie m'en avait déjà plus ou moins parlé...
- Ah oui ? Qui donc ? questionna le blond.
- Pierre Branchard.
- Il m'avait dit qu'il vous préviendrait, affirma le brun. J'étais au courant. C'est moi qui lui ai demandé. Je préférais qu'il vous en parle un peu avant pour éviter de trop vous choquer si cela s'avérait être concret.
- Merci. J'espérais tout de même que cela ne prenne pas forme et que vous fassiez erreur je l'avoue.
- Je comprends.

Il marqua une pause.

- De ce fait, reprit-il, nous aurions quelques questions à vous poser.
- Allez-y, répondit-elle.

À ce moment là, Erinn débarqua en furie dans le salon. Des larmes lui coulaient le long des joues et son visage était devenue écarlate.

- T'étais au courant et tu ne m'as rien dit ??? hurla-t-elle. Mais pourquoi ? Pourquoi m'avoir caché un truc aussi grave ??
- Attends ma chérie je vais tout t'expliquer !

À fleur de peauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant