4

606 40 5
                                    

Dès que l'internat ouvrit ses portes, je me ruai à l'intérieur pour rapatrier mes affaires dans ma valise et la transporter jusqu'à la chambre de Mani. Dinah n'était pas trop d'accord avec ce que je comptais faire, mais je pense que me voir me rapprocher de Normani était difficile pour elle. Depuis la maternelle, nous n'avions que l'une et l'autre, nous refusions de nous faire d'autres amis. Mais il était temps que cela change, même si j'adorais Dinah du plus profond de mon cœur, nous avions toutes les deux besoins de voir de nouvelles têtes. Cela ne nous empêchait quand même pas de rester ensemble : elle était ma meilleure amie et le resterait.

Alors que j'avais quasiment terminé de ranger mes affaires, j'entendis la porte s'ouvrir derrière moi et je me crispai.

― Qu'est-ce que tu fais ? demanda Ally en regardant ma valise.

― Elle s'casse, elle nous aime pas.

La voix de Lauren était étrangement cassante, c'était comme si elle se mettait un coup à elle-même en disant cela. Je levai la tête pour essayer de croiser son regard : en vain, elle fixait le bout de ses chaussures comme si c'était à elles qu'elle s'adressait.

― Putain Lauren, qu'est-ce que tu lui as fait ? cria Ally en se rapprochant de la brunette.

― J'ai fait comme toi, je lui ai dit que c'était mieux pour elle de changer de chambre.

― Camila, t'as pas à partir je t'assure. Me laisse pas seule avec elle s'il te plaît...

― Désolée Ally, mais une copine a une place de libre dans sa chambre. Je préfère vous laisser entre vous avec vos problèmes. J'ai rien à faire là-dedans, moi.

― Lauren, aide-moi, murmura Ally en se tournant vers celle-ci.

― T'aider à faire quoi ? Si elle veut partir, qu'elle se casse. Pourquoi tu cherches du soutien auprès de moi ?

La voix de Lauren était encore plus agressive que lors de l'altercation de la veille. Ma première impression, qui avait été qu'Ally détestait Lauren, se révélait fausse : ça semblait maintenant être l'inverse. Mais quelque part, je sentais que sa colère m'était destinée. Elle n'osait même pas me regarder, et d'un côté ça m'arrangeait parce que ses yeux m'auraient foudroyé sur place.

― Je cherche du soutien chez toi parce que tu veux aussi qu'elle reste.

― N'importe quoi, tu deviens folle Brooke.

― Je te connais par cœur, Lauren.

― T'as pas le droit de me dire ça. T'es personne, t'entends ? Laisse-la se barrer et laisse-moi tranquille.

Ally ouvrit la bouche pour répliquer mais Lauren s'enfuyait déjà en claquant la porte. Il y eut un instant de silence durant lequel je fermai ma valise et la fis glisser au sol.

― Reste, me dit Ally.

― Sans façon.

― Lauren ne reviendra jamais vers toi tu sais. C'est pas son style. Si tu t'en vas... C'est pour toujours.

Sa remarque parvint à me stopper dans mon élan. La curiosité était tellement forte que je fus tentée de rester. Mais je me contentai de regarder tristement Ally.

― Trop tard, lui murmurai-je.

Et je tirai ma valise jusqu'à la chambre de Normani. Lorsqu'elle m'ouvrit, je fondis en larmes.

*

Point de vue de Lauren :

Ça faisait deux semaines que Camila avait quitté ma chambre. La relation entre Ally et moi était devenue plus explosive que jamais. Elle m'en voulait d'avoir fait partir Camila. Que pouvais-je lui dire ? Je m'en voulais aussi. Seulement, je ne voulais pas que Cabello soit coincée entre notre haine et notre orgueil, elle ne méritait pas ça. Cependant j'avais de plus en plus de mal à agir normalement. La relation entre Ally et moi me faisait souffrir bien plus que je ne daignais le montrer, et ne pas avoir Camila autour de moi m'affectait également. Je devais me retenir de la supplier de revenir chaque fois qu'elle venait me dire bonjour. J'avais d'ailleurs remarqué qu'elle ne me saluait jamais de son plein gré, c'était toujours sa copine blonde qui la poussait vers moi et elle s'avançait toujours en roulant des yeux, comme si elle était contrainte de venir me saluer. La voir réagir comme ça me faisait mal, d'autant plus que je la voyais tout le temps à l'internat flanquée de Normani, avec qui elle avait l'air de s'entendre à merveille. Je ressentais toujours une pointe de jalousie lorsqu'elles riaient ensemble au self ou lorsque Normani portait Camila sur son dos quand on se détendait sur la pelouse. Pour ma part, je restais avec une bande de mecs, tout simplement parce que j'avais grandement besoin qu'on me force à rire au lieu de parler. J'aimais leurs blagues, même lorsqu'elles étaient lourdes ou ratées. Ils étaient mes amis. Mais malgré ça, malgré eux, je me sentais plus seule que jamais. Croiser Camila, cette jeune fille qui avait réussi à me faire croire en une meilleure vie et voir qu'elle venait me dire bonjour contre son gré était douloureux. Partager ma chambre avec Ally, mon ex-meilleure-amie, et voir son regard plein de douleur me brisait. J'avais deux personnes qui tenaient à moi, et je me suis débrouillée pour les repousser, toutes les deux. J'ai déçu Camila, j'ai détruit Ally. Et je me haïssais pour cela.

Camren - colocataireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant