Chapitre 4

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Petit avertissement, ce chapitre contient une scène un peu violente (ça reste soft, mais si vous êtes sensibles au sang, je préfère prévenir). Bonne lecture !

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Monsieur Lauvet rajuste ses lunettes et hoche la tête.

"Très bien, je compte sur toi pour l'aider à s'orienter."

Je reste figée, Alban lui-même a l'air désarçonné. Mon coeur se serre... Non, je n'ai aucune raison de me sentir déçue ! Je devrais me sentir soulagée au contraire qu'elle ait pris ce rôle ! Je ne sais pas si j'aurais pu supporter d'entendre les murmures moqueurs si monsieur Lauvet m'avait désignée. Et puis devoir passer du temps avec lui, seuls, alors que j'arrivais à peine à aligner trois mots en sa présence ? Lui servir de guide quand il pensait clairement que j'étais pathétique ? Non merci, j'avais déjà suffisamment réussi à m'humilier pour les dix ans à venir, au moins.

"Je ferais de mon mieux, monsieur..."

La voix de Céline dégouline d'hypocrisie, j'en ai la nausée. Les yeux de toute la classe sont braqués sur elle et elle se dandine de plaisir, ravie d'être le centre de l'attention une fois de plus.

"Alban, il y a une place libre à côté de Céline, va t'asseoir à côté d'elle. Céline, tu partageras tes notes avec lui le temps que je prépare des photocopies.

- Bien sûr, monsieur Lauvet !" Elle roucoule presque, battant des cils trop vite pour que ça soit naturel.

Alban a l'air sur le point de dire quelque chose mais referme sa bouche et va s'asseoir à ses côtés. Je m'interdis d'espérer qu'il soit déçu que ça soit elle et pas moi. Monsieur Lauvet toque au tableau, réduisant au silence les bavards.

"Vous aurez tout le temps de faire connaissance pendant la récréation. En attendant, ouvrez vos livres page 17, s'il vous plaît."

Je me plonge dans les exercices, essayant d'ignorer les regards appuyés de Katia et la vision d'Alban et Céline blottis l'un contre l'autre pour partager le même livre. Le cours de maths ne dure en réalité qu'une heure, mais j'ai l'impression que le temps s'étire mollement jusqu'à l'éternité. La cloche sonne enfin, un soupir de soulagement m'échappe.

"N'oubliez-pas qu'il y aura un contrôle mardi prochain"

On entend à peine la voix de monsieur Lauvet par dessus les raclements de chaises et le brouhaha des conversations. Comme attirés par un aimant, mes yeux se dirigent vers Alban. Nos regards se croisent, or et argent, et il me sourit, ouvrant la bouche comme pour dire quelque chose... Puis le dos de Céline remplit mon champ de vision. Elle lui attrape le bras, pressant ses seins contre lui.

"Alban, tu viens ?"

Je ne veux pas en voir d'avantage. Je fourre mes affaires dans mon sac et je fuis, aussi vite que mes jambes veulent bien me porter. Je ne comprends pas ma réaction, je le connais à peine ! Moins qu'à peine... Nous sommes étrangers l'un à l'autre. Et pourtant j'ai les entrailles qui se tordent, une douleur terrible dans la poitrine comme si on y avait planté un poignard d'obsidienne...

"Ambre !"

Katia m'appelle, l'inquiétude dans sa voix palpable, mais mes émotions sont trop chaotiques pour que je puisse lui faire face. J'ai besoin de m'isoler, de me retrouver seule avec moi-même pour pouvoir comprendre pourquoi je me sens aussi... Aussi trahie. Aussi abandonnée.

Partout dans les couloirs, les élèves se tournent sur mon passage, quelques uns me pointent du doigt en murmurant à l'oreille de leur voisin. Les larmes commencent à couler malgré moi le long de mes joues. Il faut que je me cache, que je me calme, que je reprenne le contrôle de mon souffle ! Mais tous les couloirs sont saturés de monde, leurs conversations résonnant comme le roulement d'un tambour sur les murs carrelés...

l'Étreinte des TénèbresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant