La Traque

Prologue

Aujourd'hui je fête mes trente ans. Je suppose qu'une femme vous racontant sa vie en ayant qu'une trentaine d'année peut paraître peu accrochant.

Il se trouve que j'ai vécu une période difficile lorsque j'étais petite. Mes parents sont décédés lors d'un accident de voiture. Vous savez à quel point cela est fréquent ?

Le conducteur était davantage concentré sur son téléphone que sur la route. J'aurai aimé vous raconter comment cela s'était passé, vous décrire l'horreur de l'impact, le bruit assourdissant de cris mêlés aux fracassements de par-choque à par-choque. Malheureusement -ou heureusement- il m'est impossible de me souvenir de cela. Seulement des yeux, des yeux couleur de flamme. Je ne saurai jamais à qui appartenait ce regard mais il m'avait apaisé. Sa main essuyait mes larmes, elle était fine est délicate. Une main d'une mère, mais pas la mienne. Elle me chantait une berceuse, dans une langue que je ne connaissais pas.

Le reste de l'accident était flou, je m'étais réveillée à l'hôpital, mon frère à mon chevet. Il n'avait que 12 ans à l'époque. J'étais la seule survivante. Mon frère ne faisait pas partie du voyage, il était resté à la maison ce jour-là, pour jouer à des jeux-vidéos. C'est probablement cela qui l'avait sauvé.

Nous avions été recueillis par notre tante Juliette, une vraie perle. Elle nous avait toujours fait rire, même dans les situations où nous étions prêts à nous effondrer, en manque de nos parents. Elle dégageait une aura incroyablement chaleureuse. J'ai encore l'image de Tatie, le nez farineux, les boucles blondes devenant blanche au fur et à mesure que la bataille de farine se poursuivait.

Notre tante nous avait permis d'avoir une enfance et une adolescence saine, emplie d'amour.

Tout a dérapé après ce maudit stage de fin d'étude. Il y a eu tellement de trahisons, de pleurs, de violences et de morts autour de moi.

Mais le principal est que je suis encore là, entourée de mes amis et de ma famille. Enfin ce qu'il en reste.