Fantômes sous mer, partie 2

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Laissant l'analyste à ses réflexions, le chef de quart fit prévenir le commandant aussitôt et cadra toute l'équipe de quart sur cet hypothétique sous-marin et l'habitude née de l'entraînement intensif prit le dessus. Aussi, lorsque le commandant arriva au Central Opération, on put le mettre au courant de la situation de façon limpide.

Ne perdant pas de temps, le pacha ordonna que l'on se concentre sur ce bruiteur et que l'on soit sûr qu'il s'agisse bien d'un sous-marin. Fouchet pouvait sentir le regard du pacha braqué sur lui et ses écrans. Aussi décida t'il de ne pas démérité et se concentra encore plus sur ce qu'il voyait et entendait. C'est alors qu'il remarqua que d'autres bruiteurs firent leur apparition. D'abord un, puis une dizaine de nouveaux contacts apparurent en un très cours laps de temps.

L'analyste lâcha le possible sous-marin, à chaque fois pour identifier chaque nouveau contact et à chaque fois son diagnostic était le même : bâtiment de commerce. En mauvais état.

Seulement cinq minutes étaient passées depuis l'arrivée du dernier bateau de commerce lorsque l'un des élaborateurs vit que tous les contacts naviguaient dans la même direction et à la même allure : c'était un convoi.

Accompagné, apparemment, par un sous-marin.

Ayant eu l'information, le pacha, assis sur le siège du périscope d'attaque, prit la décision de remonter pour pouvoir jeter un coup d'œil par le périscope. Cette manœuvre ne serait pas de la plus grande discrétion, mais s'il s'agit d'un convoi militaire, il leur faudrait absolument identifier la nation armant ce convoi et en savoir plus, afin de transmettre les informations à Paris.

Et ainsi, quelques instants plus tard, le Diamant se trouvait à quelques mètres sous la surface de l'eau et hissa son périscope d'attaque ; arrivant à bloque, le commandant commença à regarder tout autour de sa position.

Le Diamant naviguait dans les eaux polaires par un mois de juillet, et bien qu'il fût pas loin de 03h30, il faisait jour et le commandant pu voir les bâtiments de commerces. Ces bâtiments étaient relativement grands, possédaient deux grues de chargements, l'une à l'avant, l'autre à l'arrière, leur block passerelle se situait au milieu. Ils étaient atrocement rouillés, comme s'ils avaient passé plusieurs années sous l'eau avant d'être renfloués juste à l'instant. Se concentrant un peu plus, le commandant put voir les énormes pavillons à l'arrière de chaque navire : un pavillon rouge, à croix noires et blanches avec dans son quart haut gauche la croix gammée nazi dans un disque blanc.

Le pacha eut un mouvement de recul. Il ne comprenait rien à la situation. Comment ces bateaux, rouillés comme ils l'étaient pouvaient bien naviguer ? Et ces pavillons ? Certain d'avoir mal vu, il regarda à nouveau au travers du périscope. Confirmant ce qu'il avait contemplé et aperçut un bâtiment nettement plus petit que les autres. Il n'eut aucun mal à le reconnaître. Il s'agissait d'un sous-marin allemand datant de la seconde guerre mondiale, tout aussi rouillé que les autres, avec en plus un conglomérat d'algues et de sédiments un peu partout sur sa coque.

Réglant l'agrandissement au maximum, le commandant parvint à voir des silhouettes floues au sommet du kiosque du sous-marin. C'est alors qu'il ressentit un frisson lui parcourir le dos, suivi d'une perle de sueur froide. La peur étreignant son cœur. Et vit le sous-marin changer brusquement de cap et foncer droit sur eux.

Affalant subitement le périscope, le commandant hurla plusieurs ordres à la fois. Et avec une dextérité et une discipline nées de l'entraînement, l'équipe de quart fit plonger le sous-marin jusqu'à son immersion maximale, fit sonner le branle-bas-de-combat et s'apprêta pour une possible confrontation.

Alors que le Diamant se stabilisait en immersion, Fouchet entendit un claquement sec dans l'azimut du sous-marin épave. Il tira la manche de son chef qui se pencha dessus. Ils n'eurent pas longtemps à attendre pour comprendre de quoi il s'agissait : la porte d'un tube venait de s'ouvrir et une torpille fonçait sur eux.

Fouchet hurla l'alerte torpille et fit exactement ce que l'on attendait de lui : chanter les azimuts de l'arme de mort.

L'équipage du Diamant initia des procédures d'évitement, tira une torpille afin de perturber l'ennemi, et tous sentirent leur cœur s'étreindre par l'énormité de la situation. Ils étaient en guerre contre un ennemi inconnu.

Les deux torpilles à l'eau se perdirent en mer sans faire de victime. Fouchet put entendre leurs explosions. Pourtant, la peur refluait de son esprit ; ses compagnons avaient plusieurs années de navigations et d'entraînements derrières eux ; aussi, aucun ne céda à la panique. Le second-maître Fouchet décida de ne pas leur faire honte et s'attela à sa tâche avec encore plus d'ardeur.

Le commandant décida de remonter en immersion, afin de pouvoir lancer des missiles sur les bâtiments de commerce et forcer le sous-marin ennemi à se débusquer, car, après son tir, ce-dernier avait purement et simplement disparu. Le retrouver était une priorité. Une fois celui-ci éliminé, le reste du convoi serait facile à identifier et à couler le cas échéant.

Ils n'eurent pas longtemps à attendre.

L'ennemi réapparut dès lors qu'il lança à nouveau une torpille sur le Diamant. Cette fois, l'équipe du sous-marin français était prêt. Ils réagirent promptement et lancèrent aussi une torpille dans l'azimut de l'arme ennemie puis manœuvrèrent afin d'éviter la torpille adverse.

Le professionnalisme dont firent preuve les marins français leur sauva la vie plusieurs fois durant les deux heures qui suivirent. Et leur ténacité fut finalement récompensée lorsque leur troisième torpille parvint à atteindre sa cible. Ainsi, tous au Central Opération purent entendre l'explosion, suivis du craquement caractéristique de la coque du sous-marin adverse en train de se disloquer suite à la violente explosion.

Des vivats fusèrent partout à bord. Le Diamant venait de vaincre son premier adversaire dans une lutte à mort, après avoir été pris par surprise. Restait maintenant à identifier la nature de l'ennemi, de prendre des photos et de les envoyer à Paris.

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