Chapitre 10 - Sa vraie valeur

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  L'après-midi était plutôt calme du côté de la cafétéria. Les cinquième année qui sortaient de leurs entretiens d'orientation en profitaient pour consommer une petite collation avant le repas qui allaient s'organiser d'ici moins de deux heures.

— Alors ? Qu'est-ce qu'ils t'ont dit ? s'intéressa Marek auprès de son amie.
— Que je devais revoir mes plans d'avenir.
— Il fallait que tu t'y attendes, Vilma ! Intégrer le Ministère de la Magie allemande avec des décolletés plongeants pour grimper les échelons, il y a peut-être mieux comme plan de carrière.
— Ne sois pas aussi amer, nasilla Vilma. À la guerre comme à la guerre, tous les moyens sont bons ! Mais ça serait une belle revanche sur la vie. La gamine des rues de Berlin à la tête du Ministère grâce à sa poitrine ! Je suis sûre que ça peut marcher ! Et puis autant profiter jusqu'au bout de ce système patriarcal et ouvertement sexiste !
— Et toi, Marek ?

Lyov était intervenu pour changer de sujet, entre deux gorgées de lait de licorne chaud.

— C'est vrai ça. Je n'ai jamais vraiment su ce que tu voulais faire, plus tard !
— Ça tombe bien, moi non plus . Les professeurs m'ont donné quelques idées. Comme j'ai de bonnes notions d'anglais et de russe, ils m'ont proposé traducteur, ou encore commercial international des produits magiques, voire douanier.
— Les 1m90 et tes 100kg de muscles aident beaucoup aussi dans ce genre de métier ! Ca dissuade assez rapidement les coups de pute !
— Surveille ton langage, Vilma. Il y a des première année ici.
— Oh, s'attendrit-elle. Tonton Lyov se soucie de l'éducation des plus jeunes.

Lyov préféra de pas répondre à cette tentative de provocation.

— Ce qui est bien avec toi, c'est qu'on n'a pas besoin de te demander ce que tu vas faire plus tard ! Vive la famille !
— T'es pas sympa, Vilma... !
— Tu vas arrêter de réagir comme ça à tout ce que je dis, Marek ?
— C'est toi qui me dis ça ?
— Vous commencez à sincèrement me gonfler tous les deux, à vous disputer tout le temps !
— Il faut remercier Emeric, ses idées lumineuses et son concept dépassé de l'amour éternel et romantique !
— Lyov !

Marek attrapa le bras de son voisin et le tira brusquement vers lui, juste avant qu'un sortilège ne frôle la tête de Lyov. Vilma sursauta et fit volteface sur son banc en tirant sa baguette magique. Mais la bande de Sergueï ne leur laissèrent pas le luxe de réagir promptement. S'engagea alors un terrible d'échanges d'éclairs de toutes les couleurs, les trois amis déviant les sortilèges sans avoir le temps de répliquer de leur côté. Tous les autres élèves, souvent plus jeunes et incapables d'intervenir, avaient commencé à fuir en criant. D'autres ne préféraient pas s'y frotter sans savoir ce que valait cette bataille.
Quand, tout à coup, un sortilège puissant explosa au plafond, démolissant les pierres qui leur tombèrent dessus.

— Vilma, pousse-toi !

La pluie de dalles et de poutres dégagea d'énormes nuages de poussière, dans un vacarme qui retentit dans tout le château. Prudents, les russes s'avancèrent quand les chutes de pierres se furent calmés et surveillèrent le brouillard, d'où pouvait jaillir un sorcier ou un sortilège offensif. Ils entendirent des toussotements parmi les roulements des gravats.
Sous la brume épaisse, Lyov se tira des décombres, les dents serrées, sa baguette dans sa main écorchée par endroits. Sa jambe écrasée par une pierre, il ne put que ramper en traînant cette fracture qui le faisait souffrir. Même si l'instinct de survie primait sur tout le reste, son regard était déformé par le prisme de la colère. Il se sentait trahi, attaqué de nouveau au sein-même de l'école. Mais il devait fuir. Lyov savait que les affaires de Russie ne plaisantaient pas et que l'avenir de son nom en dépendait.
Ses deux amis eurent plus de chance car ne ils s'étaient pas trouvés sous les chutes de pierre , cependant, des décombres fumants de poussière les séparaient désormais. Marek en toussa si fort qu'ils le repérèrent aussitôt. Sa grande carrure ne pouvait être manquée... Plus recroquevillée car agenouillée, après que son ami l'ait poussée, Vilma ouvrit les yeux. Elle chassa la poussière d'une main secouée, et aperçut alors avec effroi les russes que s'apprêtaient à faire pleuvoir sur eux de nouveaux sortilèges.

— Cor contritum !
— Marek !

Il s'agit d'un réflexe. D'une seule seconde. Et rien n'aurait pu détourner le sortilège. Sauf peut-être elle.
En entendant le cri de Vilma, Marek n'eut le temps de se retourner que pour voir la jeune Allemande recevoir le sortilège doré en pleine poitrine quand elle se dressa devant lui. La lumière dans l'écran de poussière donna l'impression d'un éclair en plein orage.
Le corps de la jeune fille tomba à terre, saisi de spasmes. Les yeux exorbités, elle avait l'impression que tous ses organes se comprimaient dans sa cage thoracique.

— Vilma ! Vilma !

Pris d'une terrible panique, Marek se précipita vers elle mais constata son état avec horreur, tandis que des gerbes de sang jaillissaient de la bouche de Vilma qui se roulait au sol. Persuadés qu'ils les avaient mis hors d'état de nuire, les russes détournèrent leur attention d'eux, plus préoccupés à retrouver Lyov.
C'est au même moment que débarquèrent Emeric, alerté par le bruit, et talonné par Sven, surgissant de la porte du côté. La grande silhouette penchée de Marek au-dessus du corps de Vilma lui agrippa le cœur. Il eut l'impression, l'espace d'une seconde, de rentrer de nouveau dans cette chambre de la cabane hurlante, lorsqu'il découvrit l'immense Wolffhart près du corps sans vie de Kate.

— Vilma !

Ce fut Sven qui se précipita le premier dans la pièce en ruines, blême en discernant sa petite protégée.

— Tiens bon, gamine ! lui dit-il, presque en larmes, en tombant devant elle.

Vilma sembla s'apaiser, mais sa poitrine la tiraillait toujours, les yeux écarquillés et du sang coulant sur son visage. Le visage défait de Marek se leva alors vers Emeric, qui préférait garder son sang-froid. C'est alors qu'il lut dans son regard sa détermination de se venger... Ils devaient sauver Lyov, et pour cela, ils devaient être capables de tout.

*** *** ***

— Retrouvez-le !

Partis à la poursuite de Lyov, qui avait réussi à s'extirper et à profiter du nuage de poussière pour prendre la poudre d'escampette en boitant, les russes avaient tout d'abord été guidés par les traces de sang que leur proie avait semé es derrière elle. Ces dernières avaient cependant fini par disparaître. Dissimulé dans l'ombre d'une niche en pierre, plaqué dos au mur, Lyov grimaçait. Chaque fois qu'il tentait de se concentrer sur les bruits et les voix à portée, sa jambe blessée sur laquelle il avait tenté de marcher le ramenait à sa souffrance.

— Dépêchez-vous de le retrouver ! Avant que les professeurs nous tombent dessus !

Lyov luttait pour ne pas s'écrouler, pour ne pas perdre connaissance, mais cette douleur était si forte. Il aurait voulu en crier, mais il les ravala pour garder sa présence secrète.
Quand soudain, de grands claquements de sabots se mirent à résonner dans les pierres du couloir. Et faisant volteface, les russes étouffèrent leur surprise d'apercevoir cet immense élan, prêt à les charger. Pris de frayeur, deux d'entre eux s'éloignèrent, peu rassurés, tandis que le troisième manqua de réaction et fut éjecté d'un violent coup de bois dans le ventre. L'animal semblait comme enragé, alors qu'il cavala vers les autres, après avoir donné un grand coup de sabot sur les dalles en renâclant de menace. Se ruant sur le second, il l'écrasa de tout son poids contre un mur.
Derrière, Emeric profita du chemin que lui avait frayé Marek pour trouver Lyov avant que les russes ne mettent la main sur lui.

— Lyov !

Reconnaissant l'accent britannique de la voix d'Emeric parmi le vacarme, Lyov sortit la tête tandis que le jeune sorcier accourait dans sa direction.

— Tu vas bien ?! s'inquiéta Emeric en observant le visage pâle de Lyov.

Ce dernier lui désigna sa jambe en piteux état.

— Il faut qu'on aille à la grotte !
— À la grotte ?! répéta Emeric, pas sûr d'avoir bien entendu, alors que le terrible combat de Marek contre les cinq russes faisait encore rage à quelques mètres d'eux.
— Il y a un portoloin, expliqua Lyov. Kahru l'a mis en place pour moi ! Pour m'enfuir ! On ne peut pas prendre le risque de rester là ! On ne sait pas combien ils sont réellement !

Sans chercher plus d'explication, Emeric approuva et attrapa le bras de Lyov sans lui demander son avis afin de le passer derrière son cou pour l'aider à avancer. Ils gagnèrent ainsi de la distance, galopant à travers l'école, devant les regards éberlués des élèves qui ignoraient encore ce qu'il était en train de se produire.
Mis à terre par Marek, Sergueï garda profil bas en espérant se faire oublier, tandis que ses camarades tentaient, tant bien que mal, de neutraliser l'élan incontrôlable. Il aperçut alors Emeric et Lyov s'éloigner en trottant, loin devant. Furieux, il commença à ramper pour s'échapper de ce traquenard. Mais Marek remarqua son mouvement et, d'un coup de dents, lui attrapa son vêtement par la nuque pour le dissuader de faire ça, le soulevant à la force de son cou massif.
Cela laissa le temps à Emeric et Lyov de s'enfuir. Sur le chemin inverse effectué, ils croisèrent les mêmes élèves qui avaient vu le jeune sorcier anglais arriver par le pont-levis, et, en constatant l'état de Lyov, certains commencèrent à devenir de plus en plus anxieux. Emeric, quant à lui, restait focalisé sur leur objectif, sans ressentir la moindre fatigue en portant la moitié du poids de Lyov. Comme si la situation lui conférait une force inhabituelle . Il essayait de ne pas considérer la colère qui tambourinait dans son cœur, celle d'avoir laissé Vilma ainsi blessée dans la cafétéria détruite. Comme Marek, lui aurait également désiré prendre sa revanche et leur faire payer, mais il devait rester concentré sur sa tâche : sauver Lyov.

— On ne pourra jamais descendre ça avec ta jambe ! s'exclama-t-il après avoir passé le pont-levis, en observant le bref chemin en pente assez abrupte.
— Utilise la magie ! Trouve un moyen !
— Je n'ai pas ma baguette. Et même si je me métamorphose, et toi aussi, je ne pourrai jamais te porter jusqu'en bas ! Tu es trop lourd ! Enfin, je veux dire... !
— Ca va, c'est pas le moment !

D'un geste précipité, Lyov attrapa sa baguette et la tendit à Emeric, qui le regarda avec des grands yeux.

— Je ne peux pas l'utiliser ! C'est ta baguette !
— On n'a pas le choix ! articula Lyov. T'es le plus intelligent de nous deux, alors trouve une solution !
— Elle ne me répondra peut-être pas ! Chaque baguette choisit son sorcier ! En plus, elle est en bois d'acacia ! C'est extrêmement sélectif !
— On n'a pas le choix ! répéta-t-il en martelant ses lettres, avant de lui fourrer sa baguette dans sa main.

Emeric ne se fit pas prier et capta les pulsations de la baguette de Lyov entre ses doigts. Il n'avait pas l'habitude de manipuler une baguette autre que la sienne. Et celle-ci lui renvoyait des sensations si différentes. Plus lourde, elle semblait réfractaire à se laisser faire si aisément. Il la pointa en direction de leur gauche, vers une descente de neige très pentue. Se souvenant de l'article des sports magiques nordiques, il fit fondre la poudreuse pour la regeler ensuite, aménageant ainsi une piste de glace jusqu'au lac encore gelé.

— Je vais descendre en premier ! expliqua Emeric en déposant Lyov. Dès que j'arrive en bas, attends mon signal et descends assis ! N'utilise surtout pas ta jambe ! Je te réceptionnerai.

Lyov accepta le plan d'un hochement de la tête et assista alors à la descente assurée d'Emeric, dont il n'aurait jamais cru une telle gestion de l'équilibre. Il devint un petit point rouge et noir, tout en bas. Lyov devina ses gesticulations et se traîna alors sur la pente pour s'y laisser glisser. Lancé à pleine vitesse, il craignit pour son arrivée, quand Emeric pointa sa propre baguette vers lui.

— Aresto momentum !

Sa glissade ralentit jusqu'à ce qu'il s'arrête pile devant les pieds d'Emeric. Il aperçut le bras du sorcier britannique trembler.

— Ça va ? souffla-t-il, à bout de forces, épuisé par la douleur que lui procurait sa fracture.

Mais quand Emeric déplia ses phalanges, ils constatèrent avec effroi que l'intérieur de sa main était brûlé .

— Ta baguette ne m'aime pas, je crois. Mais vite. Ne traînons pas !

Il attrapa de nouveau Lyov pour l'aider à marcher sur le lac gelé.

*** *** ***

Au château, le chaos était de mise. Tout le monde avait fui les lieux, tentant d'alerter des professeurs, mais les choses se produisaient si vite que personne ne pouvait intervenir décemment. Personne ne se serait attendu à apercevoir un élan enragé s'en prendre à cinq russes désemparés, blessés pour certains, et tentant de le neutraliser.

— Vinculum !

La corde qui jaillit de la baguette magique de l'un de ses assaillants s'enroula avec rudesse autour du cou de la bête et commença à l'étrangler. L'animal se débattit, de plus en plus paniqué, manquant d'air et battant des sabots. Jusqu'à ce qu'il n'en puisse plus et s'écroule à terre. Réaction de survie, la magie s'annula et Marek retrouva sa forme humaine, la corde l'étranglant toujours. Son visage avait viré à l'écarlate.

— Vous, surveillez-le, leur ordonna Sergueï. Je me charge de Miloslavski. Radimir, Vasily, vous venez avec moi.

Malgré le sang qui battait dans ses tempes, Marek avait entendu ses mots et tenta d'un dernier geste, mais le lien autour de son cou se serra davantage. Sa vision se blanchit sur les russes qui s'éloignaient, bien décidé à en finir. Peut-être mourrait-il sur cet échec ? Celui de n'avoir pas pu protéger Vilma, de n'avoir pas pu les retenir assez longtemps avant qu'ils n'atteignent Lyov ?
Il était à deux doigts de perdre connaissance, quand un puissant sortilège écarta les deux russes restant, les éjectant au sol ou les plaquant au mur.

— Marek !

Le sortilège annulé, le jeune homme inspira une grande bouffé d'air salvatrice et Kahru, qui avait accouru, lui attrapa l'épaule tandis que d'autres professeurs s'occupèrent de ses agresseurs.

— Que s'est-il passé ?!
— C'est... C'est Sergueï ! Il... il... veut tuer... il veut tuer Lyov !

*** *** ***

— Où sont-ils passés ?!
Sergueï commença à enrager avant de distinguer deux points, très lointains, sur l'étendue de glace, qu'il pointa de sa baguette magique.
— Là ! Par-là ! Ils sont en bas !

*** ** *** **

— Ralentis, je... je n'en peux plus !
— C'est pas le moment, Lyov !

Et tournant la tête pour vérifier leurs arrières, Emeric aperçut de loin des gens descendre la même pente qu'ils avaient emprunté.

— Ils sont derrière nous ! pressa-t-il.
— On n'y arrivera jamais !
— Monte sur mon dos !
— Hein ?!
— Monte sur mon dos !
— Tu es construit comme une brindille ! Tu ne tiendras jamais ! J'ai le double de muscles que toi !
— On doit essayer !

Peu convaincu, Lyov accepta cependant la suggestion. Mais après une trentaine de mètres, Emeric chancela, déjà épuisé :

— Ça ne va pas être possible ! s'exclama-t-il la voix aiguë et sifflante. Vite ! Continuons !
— Ils vont nous rattraper, susurra Lyov entre ses dents, tourmenté par la douleur.
— On y est presque !
— Ils courent ! Nous, on boitille ! Ils... ils vont nous avoir !
— Lyov. Ta gueule ! On va y arriver ! Ce n'est pas le moment ! On peut y arriver ! Ce n'est plus très loin !

Mais Emeric ravala bien vite ses paroles quand un sortilège passa à quelques mètres d'eux. Les russes étaient encore trop loin pour viser correctement, mais cela n'empêcha pas Sergueï de crier :

— Miloslavski !

La fuite misérable du duo le faisait ricaner. Il savait qu'ils ne faisaient pas le poids, l'un blessé, l'autre désarmé. Il les tenait à sa merci. Aussi, il arrêta la poursuite avec ses camarades et décida de continuer seul. Il aspirait à cette gloire. Sa famille lui avait tant promis s'il accomplissait cela. Peut-être était-ce l'opportunité de sa vie. Se débarrasser d'un Miloslavski lui ouvrirait tant de portes...
Sergueï s'amusa alors à les bombarder de sortilèges pour les terroriser, tandis qu'ils continuaient de fuir de leur possible. Quand le pied d'Emeric fit craquer la glace, de plus en plus fine. Il ne manquait plus que ça... ! Et les circonstances étaient mal choisies pour réfléchir à tête reposée s'il était préférable de mourir de la main de Sergueï ou d'hydrocution dans cette eau gelée !

— Tu ne pourras courir longtemps, Miloslavski !

Sa voix indiquait qu'il se rapprochait. Bientôt, il ne pourrait plus manquer ses cibles. Mais Emeric refusait de voir la fin en face, tandis qu'il continuait de porter Lyov, qui se laissait traîner de plus en plus, peinant à garder conscience. Alors, d'un geste risqué, il attrapa la baguette magique de Lyov, glissée dans la poche de la cape de ce dernier, et fit volteface. Peu lui importait que la baguette refuse de lui prêter allégeance et qu'elle ne fasse exploser des cloques dans sa main. Emeric ne fuirait plus. Il était prêt à faire face.

— Confundus !

Mais il avait trop tardé et le sortilège n'était pas assez puissant quand il n'était pas lancé avec sa propre baguette. Sergueï le détourna sans difficulté avec une pointe d'amusement.

— Petrificus totalus !

De nouveau, le sortilège rebondit sur le bouclier éphémère de Sergueï, qui remarqua alors que du sang commençait à goutter de la main tremblante d'Emeric, teintant de rouge l'immensité de glace.

— Abandonne, lui lança-t-il en russe. Ce n'est pas contre toi que j'en ai. Écarte-toi et tu auras la vie sauve.

Emeric ne sut si le grondement qui résonnait en lui résultait de sa colère... Comme si la glace, sous ses pieds, s'était mise à vibrer.

— Non, trancha-t-il, les dents serrées, et les doigts fermement refermés sur la baguette de Lyov.
— Bien. Si tu en as décidé ainsi...

Sergueï leva son bras armé, quand une gigantesque créature perça la glace, jaillissant des flots glacés en explosant la surface. La tête du Léviathan, la peau recouverte d'écailles bleues et vertes luisantes, était aussi grosse que la taille d'une pièce à vivre. Et ouvrant la gueule pour lâcher un cri qui retentit à des kilomètres à la ronde, on pouvait alors observer deux rangées de dents acérées, aussi grandes que des bras, alors que les grandes épines à l'arrière de son crâne se déployaient.
Sonné par le hurlement grave et résonnant dans la bête, Emeric tenta de garder pied à terre et accourut vers Lyov, les yeux écarquillés, pour l'attraper au passage et se dépêcher de rejoindre les rives. Ce qui ne fut pas le cas de Sergueï, si impressionné et terrifié, qu'il en resta médusé, ses yeux se levant vers cette tête qui le dominait, dix mètres plus tôt. Le Léviathan ne lui offrit pas la chance de s'enfuir ; d'un geste vif et violent, il happa le jeune homme de ses crocs et, sa proie attrapée, replongea dans l'immense trou dans la glace qu'il avait lui-même formé.
Son immersion provoqua d'importantes vagues, qui commencèrent à faire ondoyer dangereusement la glace, la craquant par endroit, de plus en plus fort.

— Vite, Lyov ! Vite !

Mais alors qu'il prononçait ces mots, Emeric lui-même savait qu'ils ne pourraient parvenir jusqu'aux rives à ce rythme. Il devait ruser. Il balaya d'un regard aiguisé les étendues craquelées de glace, jusqu'à trouver un bloc qui semblait plus large, plus épais, plus résistant que les autres.

— Viens !
— Où... où tu vas ?! se haussa Lyov, qui ne comprenait pas ce changement de direction.

Ensemble, ils sautèrent d'iceberg en iceberg, se méfiant des vagues, Emeric restant précautionneux vis-à-vis de la jambe de Lyov. Mais le Léviathan pouvait revenir à tout moment...
Quand ils furent parvenus à l'endroit prévu, Emeric redéposa Lyov sur le sol et décida d'utiliser une dernière fois sa baguette magique en se retournant vers le point où le Léviathan avait surgi.

— Offensio unda !

Une petite décharge blanche, d'apparence inoffensive, jaillit de la baguette. Mais quand elle toucha sa cible, l'onde de choc fut telle que les vagues gagnèrent en hauteur. Jusqu'à atteindre plusieurs mètres de haut.

— Accroche-toi !

La lame circulaire finit par rafler leur iceberg si fort qu'il fut projeté à pleine vitesse vers les rives. Certains morceaux de glace autour d'eux se brisaient, se retournaient, mais Emeric rassembla tout son courage pour espérer que le leur résiste jusqu'au bout. Et quand leur radeau de glace percuta les berges, ils furent tous deux projetés en avant, roulant dans la neige à moitié fondue. Mais ni Emeric ni Lyov n'écopa de plus de blessures qu'ils n'en avaient déjà.
Reprenant chacun leur souffle, ils observèrent un temps le lac morcelé et le château de Durmstrang au loin d'où s'échappaient encore des cris de panique. Puis, quand ils échangèrent un regard, tous les deux se mirent à rire nerveusement, avant que Lyov ne s'écroule le dos dans la neige, épuisé par cette course poursuite et sa jambe fracturée, encore plus en piteux état qu'avant. Emeric, quant à lui, rééquilibra ses lunettes, dont les montures avaient été pliées sous l'à-coup.

— Je... je vais quand même chercher le Portoloin, souffla Emeric, ses membres commençant à lui rappeler avec douleur tous les efforts qu'il venait de fournir. Tu dois quand même aller à Vydra Bol'nice...

*** *** ***

L'hospitalisation de Lyov fut de courte durée et les choses reprirent leur cours à Durmstrang. Les autres russes de la bande de Sergueï furent expulsés de l'établissement à l'issue d'un conseil disciplinaire intransigeant. Quant à la disparition de leur leader, elle passa comme accidentelle ... Ce qui était en partie vrai ! Au fond, Emeric aurait préféré qu'il en soit autrement et, malgré son inimitié, la mort de Sergueï l'affectait. Car il savait que la tentative d'assassinat sur Lyov n'était pas une lubie personnelle, mais émanait d'un ordre qui lui était bien supérieur. Emeric doutait cependant qu'il aurait pu le sauver d'une manière ou d'une autre. Le Léviathan l'avait fait de façon complètement inattendue... !
Cependant, les russes ne furent pas les seuls à passer devant le conseil disciplinaire. Sans surprise, ce fut également le cas d'Emeric et de Marek. Face à eux, Stendger, droite, les fixait avec ses yeux glaciaux . Le professeur Richter observait l'échange avec austérité, assis à côté, tandis que Kahru restait un peu à l'écart, sa main frottant sa barbe fournie.

— Je croyais avoir été claire, mister Beckett.
— Oui, professeur.
— Mais vous avez outrepassé sans autre mesure mon avertissement. Vous rendez-vous compte de la taille de votre affront ?
— J'en ai conscience, professeur.
— Et cela vaut aussi pour vous, mister Majorczyk
— Oui, professeur, bredouilla Marek, légèrement penché.
— La transformation en Animagus est un processus strictement encadré par des lois et qui ne peut être usé à loisir. Vous métamorphoser au sein même de l'école, pour violenter des camarades qui plus est, dans le cas de mister Majorczyk, est prohibé. Et vous le saviez, mister Beckett.
— Je le savais, oui, affirma Emeric, qui ne baissait pas les yeux. Mais sans cela, je serai probablement mort en bas d'une tour. Et Lyov le serait également. Je n'avais pas d'autre choix. Sinon, croyez-moi professeur, j'aurais agi autrement.

Stendger soupira en s'appuyant sur le dossier de son siège capitonné.

— Je ne peux pas laisser vos agissements impunis. Sinon, tous les élèves de Durmstrang se mettront à croire que devenir Animagus est à leur portée et qu'ils peuvent tous se le permettre. Je n'essaie pas d'imaginer comment vous y êtes parvenus, tous les deux, mais nous savons tous, dans cette pièce, qu'il s'agit d'un exercice extrêmement dangereux qui peut amener de graves conséquences. Vos camarades doivent comprendre que cela va à l'encontre des règles, que ce soit celles de l'école ou celle de ce pays, voire de l'Europe entière.

Cette fois, Emeric trouva bon de ne pas répliquer.

— Vous aurez tous les deux trois soirées de retenue la semaine prochaine. mister Majorczyk, vous irez avec le professeur Richter. Quant à vous, mister Beckett, le professeur Kahru s'occupera des vôtres.

Cela rassura presque Emeric, qui éprouva de la pitié pour Marek qui allait devoir passer ces soirées en compagnie de leur enseignant en forces du Mal, ce qui n'était guère réconfortant... ! Le polonais en blêmit. En revanche, il ne sut ce que pouvait lui réserver Kahru.
Il se ressassa la question pendant trois jours, et la posa à Vilma, quand il lui rendit visite à l'infirmerie de Martha. La jeune fille resterait alitée pendant au moins deux semaines, faute d'être hospitalisée comme Lyov à Vydra Bol'nice. À la différence du russe, Vilma n'avait pas de quoi payer des soins à la hauteur de son mal et avait donc refusé cette option, préférant être soignée par Martha, quitte à devoir y rester plus longtemps.
La jeune sorcière, qui avait subi un maléfice qui avait endommagé une partie de ses organes internes, restait encore pâle, malgré l'amélioration de son état. Emeric, Marek et Sven, moins bourru qu'à l'habitude, se succédaient à son chevet pour ne jamais la laisser seule plus de six heures et pour lui rapporter des nouvelles de l'école, des cours et de Lyov.

— Je n'ai pas envie que Kahru me fasse nettoyer son amphithéâtre sans baguette, rapporta Emeric à Vilma, un midi. Quand tu vois ce que les roumains mettent sous les planchettes... ! Ça ne donne pas envie !
— Tu n'as pas à t'inquiéter, lui sourit Vilma, allongée. Kahru t'apprécie. Au pire, il te fera lire quelques bouquins en te forçant à les apprendre par cœur ! Mais en répétant que c'est pour ton bien !

Emeric ricana doucement et, après un temps de silence, demanda alors d'une voix plus basse.

— Comment ça va, toi ?
— Oh, écoute ! Mon estomac a tellement été amoché que j'ai toujours envie de vomir chaque fois que je mange quelque chose, mais ça va ! Martha m'oblige quand même. Je ne la connaissais pas si pugnace !
— Les plus forts caractères sont là où on s'y attend le moins.
— Je n'aurais pas été plus d'accord avec ça, Bäumchen.

Elle le couva d'un regard tendre et Emeric devina qu'elle le désignait.

— Je n'ai pas un fort caractère, Vilma, rougit-il.
— Si je pouvais le faire, je te frapperai. Félicite-toi que je sois clouée au lit !

Après quelques rires légers, elle poursuivit :

— Tu as du caractère, Bäumchen, n'en doute pas. Mais comme tu l'as dit, il ne se voit pas forcément au quotidien. Mais tu es fort. Tu as protégé Lyov au péril de ta vie, tu as accompli des choses extraordinaires. Tu as réussi à devenir Animagus en moins de trois mois et tu sais même voler à présent ! Mais surtout... tu as réussi à me résister ! Ah ah ! Non, Bäumchen. Ne pense vraiment pas le contraire. Et ne laisse pas les autres te laisser le croire...
— Merci, Vilma, chuchota-t-il, un peu embarrassé par tous ces compliments, en rajustant ses lunettes.
— Petit arbrisseau devient grand ... ! Que c'est émouvant !
— Tais-toi ! rit Emeric.
— Mais ne rêve pas, t'en restes encore au stade buisson !

Il repartit le cœur plus léger, prêt à affronter sa retenue du soir avec plus de sérénité. L'amphithéâtre de Kahru le soir était plus glauque qu'il ne se l'était imaginé, avec ces grandes ombres qui s'étiraient sur le mur de fond. En bas, son enseignant de sortilèges l'attendait... avec un plateau de thé. Étrange manière de recevoir un élève en retenue ! se dit Emeric. Même à Poudlard, les professeurs, bien que britanniques, ne prenaient pas cette peine !

— Professeur Kahru ?
— Ah, Emeric ! s'exclama-t-il, arraché de sa lecture, alors que sa cuillère tournait toute seule devant lui, dans sa tasse. Je ne t'avais pas entendu arriver. Je t'en prie, rejoins-moi.

Il lui présenta une chaise qui se recula d'elle-même pour lui permettre de s'installer.

— Un peu de thé ? lui proposa-t-il en soulevant la théière à l'aide de sa baguette magique. Il n'est peut-être pas aussi bon que chez toi, mais c'est tout ce que j'ai à te proposer.
— Volontiers. Merci, professeur.

Quand Emeric eut accueilli la tasse fumante entre ses mains, il osa alors marmonner :

— En quoi consiste ma retenue, professeur ?
— Je n'ai aucune retenue en perspective pour toi, soupira Kahru.
— Comment cela ?
— Je n'en ai guère l'envie. Ça irait à l'encontre de mes principes.
— Mais le professeur Stendger...
— Le professeur Stendger devait montrer l'exemple et bien que je respecte sa décision, je ne compte pas l'appliquer dans ce cadre privé.
— Pourtant, cette retenue est justifiée. J'ai désobéi aux règles que vous m'aviez énoncées...
— Est-ce que tu y tiendrais, à cette punition ?

Cela fit rire doucement Kahru avant qu'il ne reprenne d'un ton plus sérieux :

— Elle n'est, selon moi, pas méritée. Certes, tu as enfreint des règles très importantes. Mais tu as respecté quelque chose de primordial : tes convictions .
— Je ne vous suis pas, professeur...
— Tu as œuvré pour le bien, pour ce qui te semblait juste. Sans faillir. Peu importaient le danger ou les règles. Et je dois défendre cela. Sûrement pas le réprimander. En revanche...

Il leva sa tasse de thé à hauteur de menton.

— ... ne t'avise pas d'éventer cela !
— Je m'y engage ! sourit Emeric en retour.

Tous deux avalèrent alors une gorgée.

— Pas trop déçu de rentrer à Poudlard dans trois semaines ? lui demanda Kahru en fronçant ses sourcils broussailleux.
— Déçu, ce n'est pas le bon terme, nuança Emeric. Je serai triste, c'est certain. Durmstrang m'a beaucoup appris. Et je regrette d'être le seul à en profiter alors que ce genre d'échange pourrait être bénéfique pour beaucoup d'autres élèves. Nos écoles sont des microcosmes et nous n'avons pas toujours le regard tourné vers l'extérieur. Alors que, lorsque nous serons adultes, nous devrons considérer le monde des sorciers dans son entier. Je m'étais déjà fait la réflexion l'année passée, avec les élèves de Salem.

Kahru s'amusa de son discours, déjà lui, très mature.

— Mais je ne peux pas nier que Poudlard me manque aussi. J'y ai tous mes repères, mes amis... Non. Je ne regrette rien. Vraiment pas.
— Ravi de le savoir, dans ce cas. Et peut-être repartiras-tu avec un prix dans tes bagages !
— Un prix ? s'étonna Emeric.
— Celui de duelliste de la promotion. Tu n'as eu que des victoires pour le moment, me semble-t-il.
— D'autres aussi sont très bons, rougit-il, embarrassé. Il suffit que je n'en perde rien qu'un seul la semaine prochaine et je peux y renoncer !
— Je te fais confiance pour gagner.
— Je n'ai pas envie de gagner, professeur. Je veux juste... Je ne sais pas. Je ne suis pas là pour étaler ce que je sais faire. Mais pour apprendre. Ça m'a appris à me battre et cela me suffit.
— Tu iras loin dans la vie avec un tel état d'esprit. Eh bien... à toutes tes réussites futures, Emeric !
— Merci, professeur.

*** *** ***

Arriva le soir des derniers duels de l'année, avec une certaine effervescence. Beaucoup observaient Emeric du coin de l'œil dans la grande salle aménagée à cet effet. Les attentes étaient nombreuses et il y avait de quoi.

— Si tu avais été à Durmstrang depuis quelques années, tu aurais largement remporté le titre de champion de l'école ! s'exclama Vilma en consultant le tableau des scores, sur lequel le nom d'Emeric avait été enfin correctement calligraphié et non écrasé en bas, comme ajouté au dernier moment.
— Vous ne vous débrouillez pas trop mal non plus !
— Mouais, grommela Marek, peu convaincu. J'aurais peut-être plus de chance sur ma forme d'Animagus.
— Tu nous l'as si bien montré ! ricana Vilma.

De son côté, Lyov paraissait bien silencieux, se contentant d'observer les autres élèves qui commençaient à se défier les uns les autres. Sa réflexion fut interrompue par un gant bleu. Celui que lui tendit Emeric, brodé avec une clé d'ut.

— Un petit duel ? lui proposa l'anglais. En souvenir du premier ?

Lyov accueillit cette invitation avec un sourire carnassier.

— Tu vas finir en miettes, brindille !
— Eh bien, montre-moi !
— Oh oui ! s'enthousiasma Vilma en frappant frénétiquement dans ses mains . J'ai toujours rêvé de revoir un duel de vous deux sans que vous ayez besoin de vous entretuer !
— Ne t'avance pas trop ! lui conseilla Marek, amusé. Tu ne sais pas ce qu'il peut se produire ! Si cela se trouve, ça va finir comme la dernière fois. Tu crois que ça existe, des cartes de fidélité chez Martha ?

Emeric et Lyov s'avancèrent alors vers une piste de duels libre, mouvement qui fut suivit d'emblée par quelques élèves et professeurs dans la salle. Personne n'avait oublié leur terrible affrontement en début d'année. Puis, après s'être déchargés de leurs capes respectives, ils se firent face, se saluèrent puis s'éloignèrent pour rejoindre un bout et l'autre de la piste. Lyov avait les pieds bien ancrés dans le sol, la posture solide, tandis qu'Emeric gardait des bras souples, prêts à réagir, sa baguette de pommier bien en main.

— Confundus !

Le bouclier d'Emeric avala le premier sortilège de Lyov, qui fut suivit d'un second, puis d'un troisième, envoyés simultanément. Il sentait néanmoins que le russe était légèrement moins vif qu'avant : sa blessure à la jambe y était sûrement pour quelque chose. Il profita alors d'une brèche pour glisser une formule :

— Lepus auribus !

Lyov ne parvint à l'esquiver et recula d'un pas sous l'impact. Bien qu'il ne le blesse pas, l'enchantement métamorphosa ses oreilles, poussant et se garnissant de poils blancs, devenant celles d'un lapin. Les rires des spectateurs lui plurent assez peu et Emeric savait qu'il allait là décupler la force de combat de son adversaire, qui allait lui faire payer cet affront au centuple. Il redoubla ses attaques qu'Emeric eut cette fois plus de mal à contenir.

— Cogitatio !

Faisant tourner sa baguette autour de sa tête, Emeric sembla alors se diviser en plusieurs clones, comme une cellule se dédoublant. Ils furent trois à se battre contre Lyov, cependant, Emeric devant diriger ses reflets en même temps, il avait bien moins de réflexes. Il tenta de semer le doute chez Lyov en alternant les places avec ses clones, esquivant les sorts de son adversaire, agacé et toujours furieux d'être affublé d'oreilles de lapin.
L'un de ses reflets partit en fumée quand un sortilège le frappa en pleine poitrine. Il n'en restait plus que deux.
Quand tout à coup, le regard d'Emeric croisa celui de Lyov entre deux sortilèges. Il sut alors, à cette seconde. Qu'il l'avait démasqué. Il aurait pu se protéger, profiter de ce temps de latence pour envoyer un nouveau sortilège. Mais peut-être n'en avait-il pas envie...

— Expelliarmus !

La main d'Emeric lâcha sa baguette, projetée plus loin, hors de portée. Et n'étant plus contrôlé, son deuxième reflet s'évanouit à son tour. Ravi de sa revanche, Lyov étira un nouveau sourire :

— Tu as perdu, gamin.

Des applaudissements saluèrent la fin du duel avant que le résultat ne soit reporté sur le tableau.

— C'est balot, Baümchen ! regretta Vilma. Lyov te repasse devant ! Tu peux dire adieu à ton prix, maintenant ! Qu'est-ce qui t'a pris ?! T'étais si proche !
— Ce n'est pas grave, Vilma... Je t'assure.

Et il le pensait vraiment. Lyov avait peut-être une réputation à réparer auprès de sa famille, afin de prouver qu'il restait un membre digne. Mais Emeric, lui, n'avait rien à prouver à personne. Et sûrement pas à lui-même. Car il connaissait désormais sa vraie valeur . Et il n'avait pas besoin de prix pour savoir cela...  

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