Fébrilement, je poussai la porte de verre du café, dont les banquettes d'un rouge délavé et au confortable rembourage m'ouvraient des bras accueillants.
J'aperçus sa singulière silhouette lovée sur un siège, dos à moi. Sans un bruit, je le rejoignis.
Le regard rivé sur ses mains moites, qui s'enroulaient autour d'un café fumant, il ne sembla pas remarquer ma présence. Alors, lorsque je me raclai la gorge afin d'attirer son attention, il réprima un sursaut.
- Jimin m'a dit que ce serait toi. Je savais que tu viendrais à un moment ou un autre, de toute façon. Je ne sais pas vraiment comment réagir par rapport à votre combine. Je sais pas si je dois vous en vouloir de me contraindre à te voir. Parce que… je t'avoue que je n'en avais pas vraiment envie, mais il m'a convaincu. Donc vas-y. Dis-moi ce que tu as à me communiquer, je n'ai pas l'intention de rester quatre ans ici.
Sa voix rauque m'avait tant manquée et, bien que ses paroles fussent dures de sens, mes lèvres s'écartèrent en une moue heureuse.
- Je te dirais bien que c'est de réponses dont j'ai besoin.
Ses yeux quittèrent sa tasse pour rencontrer les miens.
- Alors je t'écoute. Si tu veux des réponses, pose-moi tes questions. Plus vite on commence, plus vite ce sera fini.
- Pourquoi tu es parti comme ça ?
- Je te l'ai dit.
- Je veux la vérité.
- Ça l'est.
- Arrête Yoongi.Il soupira bruyamment afin de souligner le profond agacement que cette discussion, pour le moment stérile, engendrait. Les doigts tapotant le bois usé de la table, il ouvrit la bouche avant de se raviser et de la clore à nouveau.
- Yoongi, s'il te plait.
Ma jérémiade lui extorqua seulement un haussement d'épaules indifférent. Jamais je n'aurais pensé geindre de la sorte pour une raison aussi niaise. Cependant, Suga avait créé chez moi une telle addiction que toutes notions de dignité ou d'honneur masculin semblaient s'être évaporées.
- Putain, lâchai-je d'un ton las, je vais pas me mettre à genoux… Ça te coûte quoi de me donner une raison par rapport à notre rupture ?
- Notre… rupture ?Le mot chut de ses lèvres, rougies par les morsures à répétition, comme s'il l'entendait pour la première fois de son existence. Je ne sais pas si je me fis des idées, mais j'eus la folle impression qu'il pâlit.
- Ouais, pour moi, quand mon copain se barre en me disant qu'il n'est pas une aberration de la nature comme moi, j'interprète ça comme étant une rupture.
- Je t'ai… blessé ?
- Nan ! Bien sûr que nan ! J'adore me faire insulter par le mec que j'aime !
- Tu… m'aimes ?
- Mais putain, Yoongi ! Tu es devenu con en trois jours ou ça se passe comment ?Durant les derniers jours, mon état d'esprit était passé par plusieurs phases. Tout d'abord, immédiatement après son départ, j'avais été accablé par un désespoir sans précédent, qu'avec le recul j'avais du mal à comprendre. Puis une forme de culpabilité s'était développée, me poussant à revisionner mentalement la moindre seconde passée en sa compagnie et à laquelle j'aurais pu prononcé un mot déplacé. Enfin, ma tristesse s'était muée en une colère impuissante qui ne se dirigeait même pas contre Suga, pourtant à l'origine de cette pagaille sentimentale.
Tandis que le petit brun perdait son regard dans le vague, je me saisis de ses mains, couvertes de ses manches rayées trop longues.- Yoongi. Explique-moi juste ce qu'il se passe dans ta tête. J'en peux plus. Je ne peux pas rester comme ça. Je suis pitoyable sans toi. Alors oui, ce que tu m'as dit m'a blessé, mais je te connais suffisamment pour savoir quand tu mens. Quand tu joues un rôle qui n'est pas le tien. Donc ça m'énerve, je ne peux pas te le cacher, mais c'est même pas de ta faute. C'est celle de notre putain de société qui considère l'homosexualité comme une maladie et qui m'empêche de t'offrir la relation que tu mérites. Et dans ces moments-là, je hais tellement être idol. Je voudrais pouvoir sortir avec qui je veux, en l'occurrence toi, quand je veux, en l'occurrence maintenant, sans qu'on me rapproche quoi que ce soit. Et pour ça, j'aimerais tellement me barrer à l'étranger.
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Lost In Busan - Suga & Namjoon
FanfictionQuand je l'ai vu assis, seul, dans ce café, j'ai voulu tout lui pardonner. Et je pense que je l'avais déjà fait. Cependant, je me refusais la faiblesse de lui pardonner en un claquement de doigt. Il m'avait tant fait souffrir pendant ces derniers j...