Chapitre 1

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Andrew Miller et moi étions d'excellents amis depuis bien longtemps, c'est d'ailleurs une des raisons qui me poussa a accepter les conditions singulières de l'emploi que l'on nous proposa, peu de temps après la fin de mes études de psychologie...

 J'ai toujours été un homme désabusé et je savais pertinemment que mon diplôme ne me permettrait pas de trouver d'emploi stable dès que j'en aurai besoin. Malgré tout, nous avions quitté nos foyers respectifs quelques mois après avoir reçu et encadré la preuve de notre réussite, sans réellement savoir ou aller. Un chantier laissé a l'abandon nous accueilli le temps de stabiliser notre budget, les vivres venaient souvent a manquer. Mais une lettre nous fut envoyée. Expliquant avec chaleur que nous avions été repérés par une agence qui, au vu de nos résultats, nous proposait un travail dont le salaire aurait fait saliver n'importe qui dans notre situation. Loin de nous faire penser a une arnaque, le papier semblait des plus sérieux et nous incitait même a demander une preuve officielle de l'existence de cette société, ce que nous fîmes. 

Une des conditions du contrat était de monter a Paris, ce qui signifiait pour nous quitter notre village Périgourdin pour la grande ville... L'inquiétude de ne pas pouvoir s'offrir les billets de train fut vite effacée par la certitude que tout nos frais seraient payés par l'agence. Un bon plan.

Le quinze mai nous arrivions a paris.

Les rayons de soleil se frayaient un chemin parmi les nuages et la température était des plus douces. La Gare d'Austerlitz ressemblait a une énorme gueule d'animal sauvage avalant la foule, les gens poussaient, criaient, le tout dans une ambiance étouffante. L'odeur de sueur et de parfum me montait a la tête, je me demandai un instant si je n'étais pas pris d'une fulgurante angoisse lorsque je fut obligé de m'asseoir pour ne pas tomber. Nous nous retrouvâmes sur un banc, Andrew me parlant gaiement de la sensationnelle vie qui semblait nous attendre ici et moi tentant de retrouver une respiration normale. Le monde ne me réussissait pas, je commençai déjà a regretter notre paisible campagne. 

Contrairement a moi, Miller a toujours été un meneur. Une de ces personnes qui vous faisaient taire d'un seul regard, une aura imposante se dégageait de lui et il aimait cette supériorité. Je pense que c'est pour cela que nous nous entendions aussi bien, il avait quelqu'un qui l'écoutais et qui acceptait qu'il commande et j'avais quelqu'un qui choisissait pour moi, qui savait ce qu'il faisait; j'ai toujours été perdu. Je savais que notre relation ne pouvait pas être qualifiée de saine, mais elle nous satisfaisait tout le deux. 

Nous avions convenu qu'une fois a Paris, nous partirions chacun de notre coté et que nous cesserions de partager notre logis, Andrew avait l'appartement que lui avait léguée sa défunte mère mais moi je ne savais absolument pas ou dormir. Je n'avais aucun contact et aucune connaissance, j'étais totalement livré a l'inconnu. Ma fierté m'empêcha de demander a mon ami de bien vouloir me loger chez lui pour quelques temps, la seule idée qu'il me restait fut de trouver un hôtel au  tarifs suffisamment bas pour que je puisse me l'offrir en attendant d'obtenir ma première paye.  

Le bruit de fond désagréable des voix autour de nous ne me permettait pas d'entendre ce qu'il me racontait, je ne faisais pas vraiment d'effort d'attention non plus. Lorsqu'il remarqua que je n'étais pas attentif a ses babillages, il se vexa et je vis sa mâchoire se crisper légèrement. Il se leva brusquement et me serra fermement la main avec un grand sourire que je savais totalement faux. 

" On se verra très bientôt j'espère, des que l'agence donne des nouvelles, lança t-il joyeusement. Bonne chance mon cher! Que la chance te suive! "

Il partit sans plus de cérémonie, me laissant seul pour la première fois depuis bien longtemps. M'assurant d'avoir retrouvé mon équilibre, je me levai et partit, en direction de la route. Pas certain que héler une voiture soit une excellente idée, je pris le partit de me renseigner au près des passants, ce qui se solda rapidement par un échec: les citadins me faisant rapidement comprendre qu'il étaient tous beaucoup trop occupés pour m'accorder quelques secondes de leur précieux temps. Les gens ne faisaient pas vraiment attention au obstacles sur leur chemin et je me retrouvai rapidement a essayer de trouver une sortie dans cette foule compacte. 

Chienne De VieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant