Trophy Boyfriend (Leigh)-(Rosalya)

Chapitre 2 : Plan

Le jour de la rentrée, je décidai néanmoins de faire bonne figure devant les autres. Je choisis un pull en cachemire près du corps d'une teinte rose (bonne pour mon moral). J'y assortis un pantalon noir et une paire de bottes à talons carrés. Je tressai mes cheveux sur le côté pour qu'on puisse voir ma nuque. Et je me maquillai très légèrement : du mascara et un peu de fard rosé, pas plus. Je me souris dans le miroir, attendant le moment où je devrais écouter tout le monde parler des vacances, du ski, de la neige ou de soleil et de combien d'argent ils avaient reçu. La journée n'allait pas être facile. Il fallait que je remonte la pente.

Je fis semblant. Semblant d'avoir été très occupée pendant deux semaines. Je crois que je dupai même Iris. Mais Mylène, elle, savait tout et en cours, je ne comptais plus le nombre de petits mots qu'elle tentait de me faire passer discrètement. Quelque part, je me sentais bête, bête à pleurer d'avoir été aveugle à ce point et de ce que j'avais provoqué à la fête de noël. Je me sentais bête de m'être laissée embrasser la première fois par un tocard, bête de ne pas avoir vu qu'il avait grandi et qu'il n'était plus le gentil garçon qui m'avait dépannée tant de fois quand j'étais en rade devant le distributeur du collège. Et pire que tout, je me sentais bête d'avoir été surprise dans cette situation par mon père.
Je ne répondis à aucun des petits mots de Mylène. Mais à la pause, je me décidai à rentrer dans l'antre du diable. J'avais un plan.

La salle réservée au journal de l'école était plutôt petite et à la pause du matin, il n'y avait personne, les deux ou trois chroniqueurs travaillant plus volontiers entre midi et deux heures. Mais j'étais quasiment sûre d'y trouver la rédactrice en chef autoproclamée : Peggy Devos, spécialiste des petits scoops en tout genres, qui incarnait parfaitement l'expression «les murs ont des oreilles». Si tout ne paraissait pas dans le journal, les secrets de beaucoup de monde étaient tombés dans ses oreilles de fouine on ne savait comment et s'étaient répandus comme des traînées de poudre malgré tout, bien que rien n'eut été immortalisé noir sur blanc. Comme le fait que Guillaume Deleau, de la 1èreS2, soit bi ou comme le fait que Daniele Casagrande et Stéphane Monier s'étaient envoyés en l'air contre la porte de l'internat des filles comme des bêtes sauvages un lundi matin entre huit heures et neuf heures. 

Mes attentes ne furent pas déçues : stylo Bic à la main, téléphone portable en évidence sur la table, calepin bien ouvert, journaux divers éparpillés sur le vieux bureau couvert de graffitis qu'elle occupait, Peggy était fidèle au poste, travaillant sur un article à propos du nettoyage de la cour par les élèves. Je souris en remarquant que sous cet angle, son nez couvert de tâches de rousseur, qu'elle tenait au dessus de son calepin, paraissait vraiment long...

En temps normal, je n'aurais pas fait ce que je m'apprêtais à faire. Pactiser avec quelqu'un comme Peggy pouvait se transformer en épée de Damoclès mais aujourd'hui... Je n'avais plus grand chose à perdre. 

- Salut Peggy... 

L'intéressée leva brusquement la tête, m'offrant son regard sombre et suspicieux. 

- J'ai dit salut...
- Qu'est ce que tu veux, Rosalya ?
- Ben... Je voudrais te demander un service...

Les yeux sombres s'illuminèrent d'un coup.
Je n'étais pas du genre à tourner autour du pot très longtemps mais la brutale franchise de Peggy me fit baisser les yeux.

- Quel genre de service ? Et fais vite parce que je dois boucler l'article sur la sortie à la cité des sciences en plus de celui sur le nettoyage.
- Tu connais Dylan Reyes ? Tu sais...
- Je connais tout le monde à Sweet Amoris, familles incluses, me coupa-t-elle, vexée.
- Oui... C'est génial... En fait... Je ne sais pas si je dois t'en parler...
- Tu es venue pour ça, non ?
- C'est vrai... Mais... Oh elle va me tuer...
- Écoute, quoi que tu aies à me dire, une journaliste ne cite jamais ses sources. Et je suis journaliste. Je n'en vis pas encore mais ça va venir.