Trophy Boyfriend (Leigh)-(Rosalya)

Chapitre 8 : Favour

A : Rosalya
A : 18h55
Je suis invité à une soirée samedi 16. M'accompagnerais-tu?

Plus je lisais ce message, plus je me faisais pitié. Est-ce que ça suffisait pour inviter une fille ? Est-ce que ça suffisait pour qu'elle dise oui, surtout quand on s'était conduit comme un abruti ? J'avais de gros doutes. Et j'avais tellement peur d'un refus. Si je prenais mon courage à deux mains et que je lui proposais de venir mais qu'elle disait non...
Je me dis avec amertume que j'aurais peut-être obtenu un "oui" avant d'ouvrir la bouche la première fois...

Avant de presser sur le bouton 'Envoyer' de mon téléphone, je fermai le clapet et serrai l'appareil entre mes doigts crispés. Je le cachai sous un coussin et repris ma lecture mais à chaque jupon ou chaque corset, je superposai Rosalya au dessin. Cette fille ne voulait pas sortir de ma tête. Je la croisais dans la rue, elle me servait d'inspiration dans mon travail, j'entendais même  prononcer son nom dans ma propre voiture ! Si j'avais cru à toutes ces balivernes, j'aurais appelé ça le destin. Mais en réalité, c'était plutôt une malédiction.

Quelques jours plus tard, la robe achevée, une robe habillée en satin avec une pointe de fuchsia dont le décolleté était bordé de petites perles brodées et rehaussé d'un peu de dentelle noire, j'en étais pleinement satisfait. Ce n'était pas la première fois que je travaillais en imaginant une personne bien spécifique mais c'était bien la première fois que l'une des tenues pour ma collection personnelle avait été pensée pour une femme particulière. Le vêtement n'irait pas au plus grand nombre, autant par les mensurations que par le style... 

Je plaçai la tenue dans une boîte d'un joli gris pâle. C'était là que ça se corsait. En effet, il me fallait maintenant un mot. Une invitation explicite. Mais qui ne lui donnerait pas de faux espoirs car je savais bien qu'après tout cela, je devrais arrêter de la voir.

Car je décidais de court-circuiter ce "destin", ce fil invisible et pourtant bien présent, presque palpable, qui me reliait à elle encore et toujours. Combien de fois aurais-je été forcé de la croiser sinon? Combien de fois aurais-je été mal à l'aise en sa présence? Combien de fois aurait-elle cherché à me voir? 

Il fallait arrêter cela, et j'étais décidé à le faire. Mais de la manière la plus douce possible, pour ne pas la blesser.

Une fois le mot glissé à l'intérieur du paquet, je le refermai pour ne plus y penser et je le fis livrer chez elle, à son adresse, assez tard pour qu'elle soit rentrée du lycée, assez tôt pour ne pas tomber sur ses parents. Ses parents... J'étais si désolé d'y songer mais je reconnaissais malgré tout que les parents n'avaient pas à contrôler la vie de leur progéniture à leur guise. 

Toute la soirée, j'eus la peur au ventre. Je me laissai complètement envahir par une angoisse malsaine, par l'attente interminable d'une réponse positive - ou d'un refus, comme si elle avait le droit de vie et de mort sur ma personne. J'étais conscient que c'était exagéré, mais le caractère inédit de l'événement et la signification que je donnais à cette soirée me faisaient autant de bien que de mal et j'avais la sincère conviction que c'était là la seule façon pour moi d'en terminer avec Rosalya. L'inviter à cette soirée. Mais lui faire comprendre que je ne pouvais pas donner plus. Elle ne chercherait plus à me voir et aurait quand même le souvenir d'une soirée hors du commun. C'était le mieux que je pouvais faire.

Je restai à fixer mon téléphone, poussant le volume de la sonnerie au maximum pour ne pas manquer sa réponse. Alors qu'à minuit, l'écran affichait toujours zéro message reçu, je me forçai à éteindre l'appareil pour la nuit mais j'eus du mal à trouver le sommeil et le lendemain matin, les yeux comme brûlés par la fatigue, la première chose que je fis fut de me jeter sur mon portable. Aucun message.