Jeanne

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Victoire ne semblait toujours pas vouloir récupérer la place qu'elle s'était attribuée l'an dernier et par conséquent, je devais quitter la mienne.

Premièrement, ça ne me dérangeait pas de lui rendre service mais après trois jours, ça me déplaisait déjà.

Il est vrai qu'être installée à côté de Jeanne devrait m'aider et me faire plaisir mais je n'ai jamais apprécié d'écouter les conversations des autres en faisant semblant de rien.

Durant cinquante minutes, je me suis donc tue et n'ai ouvert la bouche que pour ne poser que deux questions de vocabulaire à la professeure d'allemand ou pour échanger quelques mots avec ladite Jeanne quand mon stylo est tombé à ses pieds.

Lorsque la sonnerie a retenti, j'ai rapidement quitté la classe, dans laquelle je ne me sentais plus à mon aise et suis allée rejoindre celle d'anglais. Là-bas, mon ami, Lukas y était déjà installé et griffonait nerveusement sur son carnet.
Je lui ai fait la bise avant de prendre place à sa droite, comme à mon habitude.

   -Tu as l'air fatigué, Lukas, ai-je constaté à cause de son silence.

Il a hoché machinalement de la tête, ce qui a fait bouger ses jolies boucles brunes.

   -Oui, j'ai passé la nuit au téléphone, a-t-il expliqué en bâillant.

   -Je suis persuadée que c'était Sarah, ai-je directement deviné.

   -Non, c'était Jeanne Pirson, ma voisine.

Entendre ce prénom m'a surprise mais je n'ai posé aucune question car je ne savais pas comment il allait le prendre.
Ces deux-là vivent l'un en face de l'autre depuis trois ans et s'entendent très bien alors, je n'ai pas osé lui poser la question qui me tournait dans la tête à propos de la jeune fille. Ce n'était pas indiscret mais j'appréhendais la réaction de mon ami.

Mais le coup de fil nocturne dont il a parlé n'a pas quitté mon esprit de tout le cours.