Debout à côté d'un banc je regarde les gens passer. Les rues se vident et se remplissent au rythme de la journée tel les vagues d'un océan. Je me plais à imaginer leurs vies.
Il est 8h02 du matin. Parmi ces adolescents qui entrent dans le lycée en traînant des pieds, combien se sont couchés à minuit passé parce qu'ils ont joué à la play, ont fait la fête ou ont veillé leur petit frère ou petite soeur malade ? Cette femme qui doit avoir dans la quarantaine. Elle fume une cigarette au volant de sa voiture en attendant que le feu passe au vert pour pouvoir avancer. Depuis quand s'est-elle mise à fumer ? A-t-elle des enfants ? Je l'imagine bien avoir un chat, peut-être angora, qui vient lui faire des câlins dès qu'elle rentre chez elle le soir, après sa dure journée de boulot. Je regarde ces gens passer, et moi, je reste debout à côté de ce banc et j'attends.
Il est 10h27. Les adultes sont au travail, les enfants et adolescents à l'école. Tout le monde est occupé. Les rues sont vides. Des pigeons picorent quelques miettes invisibles. Je regarde la vie défiler, et moi, je reste debout à côté de ce banc et j'attends.
Il est maintenant 12h36. Cette jeune femme énergique qui remonte d'un bon pas la rue. Elle va sûrement prendre son repas en ville. Dans quoi travaille-t-elle ? A-t-elle un bon patron ? Une patronne peut-être... Et ce couple de personnes âgées qui se baladent en profitant du soleil de midi. Sont-ils mariés ? Depuis combien d'années ? J'aime penser que ce soir, monsieur sera devant un match de rugby, un cigare allumé à la main tandis que madame lui tricotera une écharpe bien chaude en prévision de l'hiver qui s'annonce rude. Je regarde ces gens passer, et moi, je reste debout à côté de ce banc et j'attends.
Désormais, il est 15h12. Comme ce matin, peu de monde circule dans la rue, ma rue. Un chat dort paresseusement sur un rebord de fenêtre. Quelques étudiants qui bavardent sur la terrasse d'un café, ayant terminé les cours. Je regarde la vie défiler, et moi, je reste debout à côté de ce banc et j'attends.
Il est 17h49. Les cours sont finis pour la majorité. Les élèves ont envahis la rue. Des groupes circulent, des petits, des grands... Des âmes solitaires aussi. Ils profitent des magasins avant l'heure de fermeture. Il partagent leurs expériences de la journée, leurs dernières notes, leurs impressions sur les professeurs. Ils organisent des soirées, des "teufs" comme ils disent. Je les aimes bien les jeunes. Tout le temps à essayer de se faire remarquer par des coupes de cheveux toujours plus extravagantes, des vêtements toujours plus fluos. Ils ont un vocabulaire, des manières, des démarches à eux. Je regarde ces gens passer, et moi je reste debout à côté de ce banc et j'attends.
Puis peu à peu, les passants rentrent chez eux les lumières s'allument et moi je reste debout à côté de ce banc et j'attends toujours.
Il est maintenant 23h53. Personne dans la rue à part ces trois jeunes hommes, dans la vingtaine, qui discutent bruyamment dehors en buvant une bière sur le pas de la porte d'un immeuble de cette rue. Cette rue où je suis, reste et attends.
Les jours passent, semblables à celui-ci et personne ne me remarque. Pourtant je suis toujours là, debout à côté de ce banc et j'attends qu'on me voit.

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Ceux qui vivent sont ceux qui luttent
PoetryDes textes, des mots, des phrases... ce qui me passe par la tête