Chapitre 01 - Une année.

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Printemps...

Je regarde l'agitation londonienne derrière les vitres teintées de la voiture qui me conduit à mon hôtel. Les klaxons, une dame qui râle car une voiture ne l'a pas laissé passer, un jeune homme un peu perdu qui vient d'étaler tous ses cours au beau milieu de Londres. Les boutiques sur la principale avenue ouvre leurs stores pour laisser entrer les clients. Tout ça est bien loin de ma campagne irlandaise où je n'entendais rien d'autre que les chants d'oiseaux et la tondeuse du jardinier. Et ma mère...

Mes parents. Ils m'ont littéralement foutu à la porte. Ou presque. Ils m'ont donné un an. Un an pour me remettre sur le droit chemin. Si au bout d'un an, je n'ai pas changé, je peux dire adieu à tout. Il est vrai que mon comportement ces derniers temps n'était pas des plus exemplaires. Je suis diplômé d'une des plus grandes écoles de commerce que j'ai associé à un diplôme d'ingénieur. J'aurais dû postuler pour le poste de directeur marketing il y a plusieurs mois de ça, alors que j'étais encore pleinement motivé. Cependant j'ai réalisé que je passais à côté de trop de choses.

Je suis resté dans les rangs toute mon enfance. Je suis sorti major de chacune de mes promotions avec des notes extraordinaires, j'ai toujours travaillé comme un dingue. Alors je crois que j'ai fait un burn-out. C'est le jour de mes 26 ans que je me suis rendu compte de tout ça. Alors j'ai commencé à écumer les bars, et en Irlande on ne rigole pas avec la bière. J'ai fait la fête plus qu'il ne le fallait et j'ai rencontré des filles, beaucoup de filles. Ce qui me vaut aujourd'hui une vraie réputation de sex-symbol. Et je me suis même quelques fois fait ramener par la garde irlandaise. Mais je me suis vraiment amusé pendant ces derniers mois.

Mais mes parents ne me supportent plus. Alors me voilà au beau milieu de Londres, une ville qui m'est totalement inconnue alors que nous ne sommes pas si loin. Cependant ils ne m'ont pas laissé totalement seul, William m'accompagne. William travaille pour mes parents depuis bien longtemps et je crois bien être plus proche de lui que de mon père. Il cède à tous mes caprices, mais il ne me juge jamais. Je sais que je pourrais compter sur lui ici.

Il se gare devant le Four Seasons Hôtel. Un grand palace londonien. J'y ai pris une chambre au dernier étage. Mes parents voudraient très certainement que je sois indépendant, que je puisse me trouver un appartement, payer mon loyer, faire ma lessive et mes repas, mais je n'ai pas été habitué comme ça. Et ça, ce n'est pas de ma faute.

Je me rends à l'accueil, alors que William me suit avec mes valises, pour demander ma chambre. La jeune femme derrière le balcon se lève, certainement pour me montrer son corps fin et bien en forme. Identique à toutes celles que je me suis déjà fait. J'ai l'habitude de ce genre de comportement. Elle lisse son tailleur avant de me tendre ma carte magnétique.

— Bon séjour, Monsieur Doneghan.

Je ne prends pas la peine de répondre et la salue par un unique hochement de tête avant de rejoindre mon cher William. Il m'accompagne jusqu'à ma suite et dépose mes valises dans l'entrée.

— Si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas monsieur.

— Allez vous reposer, le voyage a été long.

Il acquiesce avant de me saluer pour prendre congé. Je referme la porte derrière lui puis regarde autour de moi en mettant mes mains dans ma poche. Cette suite va être mon territoire pendant un an à compter d'aujourd'hui, le 16 avril. Elle fait certainement la moitié de ma chambre et je me sens un peu à l'étroit, mais c'est toujours plus luxueux que ma chambre universitaire.

Je ne sais pas si je me sens libre ou enfermé. J'ai toujours eu un chemin tracé depuis ma tendre enfance. Mes parents ont décidé de chacun de mes mouvements et même encore aujourd'hui. Ils m'ont trouvé une place dans une grande multi-nationale émergente afin de mener à bien mon projet de base : devenir directeur marketing. Je sais que c'était mon projet, c'est moi qui le voulais, j'ai toujours eu ce don de créativité depuis gamin. Cependant je sais très bien qu'ils auraient voulu autre chose pour moi, peut-être qu'ils espèrent que je me plante royalement et que je retourne vivre chez eux et les laisser faire de moi ce qu'ils désirent.

Peut-être qu'avoir enchaîné les conneries pendant ces derniers mois a été la clé de ma libération. Peut-être que grâce à tout ça, ma prétention et mon égocentrisme, je vais pouvoir faire ce que bon me semble. Au moins pendant un an, je suis libre de la tour dans laquelle mes parents ont essayé de m'enfermer toutes ces années, fermé au monde extérieur dans l'unique but de devenir celui qu'ils veulent que je sois. Aujourd'hui je me sens libéré d'eux et de mon avenir. À partir d'aujourd'hui, je peux être celui que je veux être, effaçant mon passé, pendant un an.

Je sors sur le balcon de ma suite qui me donne une excellente vue sur Londres. J'aperçois un immense parc non loin, je vais pouvoir aller y faire mon jogging à l'occasion. Je prends mon téléphone afin d'appeler Joshua, mon frère cadet. Nous n'avons que deux ans de différence, on ne s'entend pas spécialement bien, mais nous nous parlons cordialement tout de même. Sauf quand je suis agité par mes nuits mouvementées. Il me répond au bout de quelques sonneries.

— James. Que me vaut ton appel ?

Je lève les yeux au ciel, il parle toujours comme un bourgeois et j'ai envie de lui dire de se la fermer. Je sais que la conversation va être courte alors je passe.

— Joshua. Juste pour vous prévenir que nous étions bien arrivés avec William. Je te laisse transmettre le message aux parents.

— Je pense qu'ils n'en ont pas grand-chose à faire.

Il lâche un rire contenu comme il sait si bien le faire et je ne me retiens pas de lui raccrocher au nez. Il m'exaspère celui-là avec ses faux airs de fils parfait. Je suis un peu le vilain petit canard, on va dire et c'est à cause de lui. Je retourne à l'intérieur et je regarde mes valises, encore fermées. Il faut que je les vide pour sortir mes vêtements pour demain.

Demain je commence mon premier jour de travail. J'aurai même la chance de rencontrer le P-DG de cette multi-nationale. Il va falloir que je travaille une longue année pour prouver à mes parents que je suis capable de faire quelque chose de ma vie. Mais aussi pour me le prouver à moi. Je ne veux plus dépendre de personne. Et pourtant je sais qu'au bout de cette année ce sera inévitable. Mes parents pensent juste que je serai devenu un peu plus sérieux afin d'assumer l'héritage familial. Rien de plus.

***

Les apparences sont trompeuses  T1 (sous contrat d'édition avec BMR éditions)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant