Je noue ma cravate devant le miroir du grand dressing de ma suite. J'enfile ma veste et William doit déjà m'attendre. C'est mon premier jour. Je ne suis pas stressé, loin de là, je ne connais même pas cette sensation. Je suis plutôt excité de découvrir ce lieu qui va m'accueillir pendant cette longue année. J'ai également hâte de savoir si la formation que j'ai suivie me va parfaitement ou si je me suis complètement égaré. Et dans ce cas, ma mère s'en donnera à cœur joie. Pourtant c'est elle qui m'a pistonné.
Je rejoins William devant l'entrée du Four Seasons. Il m'ouvre la portière en m'offrant un « bonjour ». Je hoche la tête pour lui répondre et me glisse sur la banquette arrière. Heureusement que ce n'est pas une limousine car on pourrait croire que je suis le patron de cette entreprise. Il me dépose juste devant et je me penche pour lui parler.
— Je rentrerai à pied William, j'ai envie de découvrir un peu les environs.
— D'accord monsieur. Bonne journée.
— À vous aussi.
Je descends de la voiture et regarde autour de moi. Le bâtiment est sublime et en grosse lettre au-dessus de la porte tournante est inscrit le nom : Martinez Company London. Le propriétaire de cette entreprise a fait un parcours incroyable. Il est aujourd'hui l'un des plus grands dans sa catégorie alors qu'il partait de rien. C'est un véritable exemple. J'aimerais être un acharné du travail comme il l'est. Et aujourd'hui je vais le rencontrer. Il est de passage à Londres selon ma mère. Je ne sais pas d'où elle le connaît, mais en tout cas je suis heureux d'être tombé ici.
Je me rends à l'accueil en observant la décoration autour de moi. C'est sans fioriture, tout ce que j'aime et notamment tout le contraire d'où je vivais. Je m'adresse à la jeune femme derrière le comptoir qui a exactement la même attitude que celle d'hier à l'hôtel.
— Bonjour, j'ai rendez-vous avec monsieur Martinez puis le responsable des embauches.
— Bien sûr. Vous êtes ?
— James Doneghan.
Elle compose un numéro et énonce mon nom, non sans le déformer. Il n'est pourtant pas bien compliqué. Elle m'explique ensuite où me rendre, n'omettant pas de me faire un clin d'œil à la fin, sur lequel je passe. Si je veux me trouver des plans cul, je saurai où chercher au moins.
Je me rends donc au dernier étage de l'entreprise afin de rencontrer son doyen. Je sors de l'ascenseur une fois arrivé et monsieur Martinez en personne m'attend. Je le reconnaîtrai sans le connaître. Il en impose par sa carrure et sa posture alors qu'il paraît totalement décontracté. Une nouvelle hôtesse d'accueil me demande mon nom.
— C'est pour moi, laissez. Bonjour monsieur Doneghan.
Je prends la main qu'il me tend et la serre professionnellement. Il est beaucoup moins impressionnant de près. Nous avons à peu près la même carrure et il ne doit pas être beaucoup plus âgé que moi. Ma mère m'a raconté qu'il avait deux petites filles. Elle sait toujours tout.
— Enchanté monsieur.
— Suivez-moi.
Il me précède jusqu'à son bureau où il me demande de m'installer. Il prend place face à moi après m'avoir proposé un café, que j'ai refusé par pure politesse. Mes bonnes manières sont toujours là.
— Vous avez fait bon voyage ?
Un peu dérouté par sa question, j'acquiesce avant de le remercier. Il croise ses mains sur son bureau.
— Votre mère m'a fait beaucoup d'éloge sur vous, arrivant même à me convaincre de vous prendre dans l'entreprise.
Ma mère ? La même qui ne me fait jamais d'éloge à moi, son fils ? Impossible. Il reprend.
— Vos études sont brillantes et c'est ce qu'il faut pour convoiter le poste de directeur de marketing. Cependant je dois vous avouer que vous aurez de la concurrence. Je ne peux pas vous nommer directement à ce poste sans gravir les échelons.
— Je comprends tout à fait. Je suis d'accord pour commencer tout en bas, j'ai beaucoup de choses à apprendre.
— J'aime les gens curieux c'est un bon point. Ce ne sera pas uniquement moi qui ferai le choix, mais toute une équipe, la direction. Il sera établi sur ce que vous aurez réalisé au sein de l'entreprise et de l'équipe, en contribuant aux principaux projets. Après quelques semaines, nous vous laisserons un projet en main et vous devrez le crée de A à Z, avec une équipe. C'est cette étape-là qui sera décisive.
Ça me donne carrément envie de commencer. Une équipe, un projet, dirigé par moi ! J'ai toujours des milliards d'idées, même pour la chose la plus inutile du monde. J'ai vraiment hâte de faire ça. Il poursuit.
— Je ne vous cache pas que le poste est convoité par une personne qui est dans l'entreprise depuis son ouverture et qui prend également très à cœur ce poste. Vous me semblez cependant en avoir également envie.
— Je suis né pour ça. Je n'attends que ça, de me le prouver et de le prouver aux autres.
— Très bien. Avez-vous des questions ?
— Pas en rapport avec tout ceci.
— Je vous écoute.
— Ma mère a réussi à vous convaincre... Vous vous connaissez ? Car elle ne m'a jamais parlé de vous.
Il décroise ses mains afin de passer une main sur sa tête, légèrement mal à l'aise peut-être. Je n'aurai jamais dû poser la question. Je m'apprête à m'excuser.
— Mon père était neurologue il y a presque des années maintenant et votre mère ou grand-mère je ne sais plus, était l'une de ses patientes. Ils se connaissaient soi-disant.
— Je comprends mieux.
Tout s'explique... Si elle m'expliquait davantage les choses au lieu de faire ça dans mon dos, j'éviterais de poser des questions inutiles à mon patron.
— Si vous n'avez pas de question, je vais vous laisser rejoindre le bureau des embauches afin d'avoir votre pass et tout ce qui s'en suit.
Je me gratte distraitement le menton me posant une question...
— Est-ce que ma mère vous a parlé de... euh...
Il ne me laisse pas finir et acquiesce.
— Votre secret est bien gardé avec moi, ne vous en faîtes pas, il me sourit.
— Je vous remercie beaucoup d'avoir pris de votre temps pour ça.
— Je vous en prie. Ne me faîtes pas regretter de vous avoir embauché.
Je le remercie à nouveau en lui serrant la main avant de sortir de son bureau. Pourquoi diable a-t-elle été obligée de me pistonner ? Pourquoi doit-elle se mêler de tout ? Si j'échoue ici, toutes les portes me seront fermées. Mais je suis dans l'entreprise la plus prometteuse de ces dernières années. Elle ne cesse de s'agrandir. Et il sait...
Même à des kilomètres d'elle c'est comme si elle me surveillait. Si je réussis, ce sera comme-ci je lui devais ma réussite alors que j'étais censé réussir seul pendant cette année. Je ne sais même plus si j'ai envie de réussir pour moi ou de tout envoyer valser pour lui tenir tête... Elle me pousse dans mes retranchements, elle me pousse à la contredire comme d'habitude. Si elle me laisse un an, mais qu'elle fourre son nez partout, rien ne changera par rapport à là-bas. Et je veux profiter de cette année.
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Les apparences sont trompeuses T1 (sous contrat d'édition avec BMR éditions)
Romance{sous contrat avec les éditions BMR - désormais disponible en numérique} James Doneghan n'a besoin de rien pour réussir. Il a déjà tout son avenir tracé grâce à ses parents. Et pourtant ce n'est pas ce qu'il veut. Il rêve d'indépendance et de libert...