"Tu veux me raccompagner... Sur ta bicyclette ?"
Je secoue la tête, incrédule.
Mais je sais qu'au fond il y a plus qu'à simple accompagnement derrière son geste.
Cet homme a l'air complètement perdu, avachi sur son banc avec son vélo rouge, et j'ai l'impression qu'il a trouvé en moi une bouée de sauvetage.Mais je ne veux pas être une bouée de sauvetage. Je ne veux pas qu'il s'accroche à moi comme si sa vie en dépendait. Je ne veux pas qu'il me rabaisse encore plus, en cherchant à s'élever.
Je veux essayer de m'en sortir toute seule.
J'ai conscience qu'il a remarqué ma déchéance. Mais je veux me reconstruire sans qu'il n'apporte sa sombre pierre à l'édifice.Il croit son geste romantique mais je le juge juste malsain. Il est beaucoup plus âgé que moi, il doit avoir dans les 35 ans.
Il me regarde comme si j'étais capable d'être là lumière de son monde. Et même si ce regard me flatte, il me réduit. Parce que je ne suis pas qu'une lampe torche destiné à éclairer le bas-fond des âmes sombres. Si je suis une lumière je veux pouvoir éclairer ma vie en premier.Est ce que la vie m'a usée au point que je n'arrive plus à trouver de beauté dans son geste ou est ce qu'il en est réellement dépourvu ?
Je ne veux pas jouer, je veux vivre. Je veux retrouver mes sentiments, la spontanéité. Pas me perdre encore plus.
" Tu sais quoi, c'est pas grave, tu peut me raccompagner à pied, je n'habite pas loin."
Je ne sais pas vraiment ce qu'il m'a pris, mes lèvres semblent avoir bougé toutes seules. J'ai juste peur de trouver le monde malsain à cause de cette dépression qui m'étouffe.
Alors j'accepte dans l'espoir de retrouver ce trait qui me semble trop loin maintenant pour pouvoir le rattraper.
Ma naïveté.