CHAPITRE III - partie I

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Lundi. Trois jours que Grindelwald errait inlassablement dans Godric's Hollow, toutes les après-midi, tous les matins, sans exception. Il tournait, tournait dans tous les sens, essayait tant bien que mal de trouver un point positif à cet étrange village qui lui paraissait de plus en plus austère. Une ville morte, et enterrée depuis longtemps. Comme un ordre débraillé, qui contrastait tant avec l'ordre strict et utopique de la Russie. Tout était différent, tout. Les gens, les maisons... Et rien ne le faisait se sentir bien. Se sentir chez lui.
Seule une chose le préoccupait, ou plutôt une personne. Elle s'appelait Albus, et chaque fois, il se trouvait épié par ce regard bleu, ce regard perçant. Puis il apercevait cette figure si claire, si lumineuse, encadrée de ses cheveux roux qui partaient dans tous les sens, mais avec cette grâce, cette beauté naturelle et si évidente. Dumbledore... Il le trouvait aussi étrange qu'intéressant. Derrière cette douceur, cette douceur presque naïve, il avait vu quelque chose de plus mystérieux. Une puissance, et surtout une vive intelligence se cachait chez cet Albus. Et tout à coup, Gellert comprenait pourquoi sa tante avait tant voulu les mettre en relation ; elle avait d'ailleurs été très déçue lorsqu'ils s'étaient quittés plutôt froidement, avec cette haine, cette indicible haine qui régnait parfois entre deux personnes sans qu'elles ne sachent même pourquoi.
Le jeune homme avait pourtant cru apercevoir une sorte d'intérêt chez le rouquin, comme si lui, Gellert Grindelwald, avait attisé sa curiosité. Étrange. Très étrange tout cela. En vérité, une petite voix lui disait tout au fond de lui qu'ils se reverraient, et que cette fois-ci, ils iraient plus loin. Beaucoup plus loin. Un drôle de pressentiment.
Ses journées étaient vides de sens. Mis à part ses petites excursions à l'extérieur, inutiles et résultant seulement d'une petite tendance masochiste, il restait souvent chez Bathilda et lisait tous les livres qui lui tombaient sous la main. Ses rapports s'étaient un peu arrangés entre lui et sa tante ; une sorte de paix s'était installée entre eux, une paix silencieuse qui permettait au jeune homme de faire plus de choses. Aussi, elle l'avait autorisé à lire les ébauches de son bouquin, en cours d'écriture. Pour l'instant, il se résumait en un gros tas de feuilles jaunies par le temps ; elle l'avait en effet commencé des années plus tôt, et le continuait inlassablement, dans l'espoir de le publier un jour. Histoire de La Magie. Voilà les premiers mots qui figuraient sur ce qui semblait être la couverture, et lorsque Gellert s'était mis à le lire, il n'avait plus pu s'arrêter. Ce roman, où plutôt cette encyclopédie, était une véritable mine d'or. Il relatait, du début à la fin, toute l'histoire de la sorcellerie. Grindelwald n'était pas allé loin dans le livre, mais avait beaucoup apprécié les pages qu'il avait lues. C'était écrit dans un style pompeux et gênant pour le lecteur, mais en s'accrochant, on pouvait en tirer de bonnes choses.
Bref, dans tous les cas, la vie à Godric's Hollow était loin d'être passionnante et le jeune homme songeait sérieusement à retourner en Russie.
Ses plans n'avançaient pas, il avait comme un manque d'inspiration qui l'énervait au plus au point et l'angoissait terriblement. Comment faire s'il était incapable d'établir un véritable programme de domination ? C'était un projet qu'il s'était lancé en créant les Élus, cette secte tyrannique à Durmstrang. Le projet de gouverner le monde, et surtout d'asseoir la domination des sorciers sur la société moldue. Il ne concevait et n'avait jamais pu concevoir le fait que les siens, hommes et femmes aux puissants pouvoirs magiques, puissent se terrer dans l'ombre pour se cacher de la menace moldue. Quelle menace ?! Il se le demandait bien ! Ces vermisseaux étaient incapables de se défendre ; inutiles, faibles... Les sorciers les dominaient sous tout points de vue. Alors pourquoi continuer de la sorte ? Pourquoi ne pas se libérer de toutes ces contraintes et leur faire comprendre une bonne fois pour toute qui étaient les maîtres ?C'étaient les idées qui trottaient déjà dans la tête du jeune Gellert Grindelwald, et qui ne cessèrent de le hanter tout au long de sa vie. Ce fut à cette époque que cette folie de domination prit pied, et se matérialisa peu après. Un point de départ, l'été mille huit cent quatre-vingt neuf...
Le russe, contre toute attente, avait un sens aiguisé de la politique et du pouvoir, malgré son jeune âge. Il savait qu'il allait devoir rassembler des partisans, convaincre avant d'imposer son pouvoir, son règne. Il savait tout cela. Et de plus, il était conscient de sa faiblesse, de cette faiblesse qu'il devait transformer en puissance pour pouvoir prendre les rênes et régir le monde entier. Rassembler, convaincre, il verrait plus tard, cela viendrait, mais l'acquisition d'un plus grand pouvoir lui posait un réel problème. Il s'était alors retranché sur les Reliques de la Mort. Un simple conte en apparence mais de réels objets en vérité, qui le rendraient sans aucun doute immortel, infaillible. La baguette de Sureau en particulier... Biddle Le Barde la décrivait comme étant l'arme ultime, supérieure à la Mort elle-même... La baguette la plus puissante du monde : avec elle, plus personne ne pourrait lui résister.
Son imagination fourmillait donc d'innombrables plans qu'il effectuerait une fois majeur, et peut-être même avant, pour mener à bien son projet, son grand et beau projet.
Sa mère et son père prenaient toutes ses ambitions, ses rêves à la légère, ne voyant là qu'une folie grandissante chez leur fils, qui leur faisait peur. Oui, ils le disaient complètement fou, illuminé, bardé de mauvaises intentions. Des défauts monumentaux qui le perdraient sûrement dans un futur proche. Sa mère avait tant de fois essayé de le ramener à un semblant de raison... Mais pour lui, la raison n'était qu'abstraite. Une norme, une idée vague que chaque personne fixait à partir de sa propre imagination, de ses propres valeurs. Tout comme la folie, tout comme l'amitié ou l'amour. Que des choses inutiles, des mots vides de sens. Il savait que tout cela n'existait pas et vivait dans un monde absolument dépourvu de limites... Un monde où tout pouvait être possible, réalisable. Son Monde à lui.

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⏰ Dernière mise à jour : Feb 25, 2017 ⏰

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