Lisi

Lisi vu par son père

Un homme d'une cinquantaine d'années arriva en courant. Ses habits étaient sales. Sa barbe mal taillée et ses énormes cernes en disaient beaucoup sur les derniers jours qu'il a vécu. Il pris place face à l'assemblé. Il tremblait. Une larme brillait au coin de son œil.
"- Bonjour, je suis le père de la fille enfermée dans ce cercueil. Pendant les trois derniers jours, j'essayais de me convaincre qu'elle nous faisait une blague. Elle aimait beaucoup rire. Je... Je n'avais sûrement pas les bonnes méthodes, je me saoulais. Depuis le début de cette cérémonie, je suis dans le bar d'en face, mais j'ai eu une illumination. Je me suis demandé quel père je fais ? Quel père ne va pas à l'enterrement de sa fille, quel mari ne soutiens pas sa femme ? Alors me voilà... Euh... Je pense que le petit ami de ma fille, ici présent, l'a mieux décrite que je ne peux le faire. Je vais vous raconter...sa naissance. Sa naissance... Il y a 20 ans, 3 mois, 2 jours et 7 heures, j'amenais ma femme à la maternité. Je conduisais très très mal, j'étais tellement stressé. Ma petite princesse allait naître. Si ma femme ne m'avait pas giflé pour me réveiller, j'aurais loupé le deuxième plus beau jour de ma vie. Arrivé à destination, je ne savais pas quoi faire alors j'ai engueulé la bonne femme de l'accueil, je parlais très mal français à l'époque. Elle a compris que ma femme souffrait mais la raison. Je lui ai montré le ventre de ma bien-aimée. Dans la salle, tout se passait bien, enfin pour moi car je voyais Marianne souffrir. Quand le médecin a dit que la tête du bébé était déjà sortie, j'ai jeté un coup d'œil et je me suis évanoui. Je suis tombé comme une merde. Cela fait encore rire ma femme, vingt ans après.Bref, quand je me suis réveillé, j'ai entendu des petits cris à côté de moi. J'ai regardé cette petite fée qui était posée sur le ventre de sa mère. Je vous jure, je n'ai jamais été aussi fier. Quand ma femme m'a demandé de la porter, j'avais peur de la casser. Une si petite poupée, une si belle poupée." L'homme fit une pause, il avait mal. Il sortit de sa poche une petit fiole de whisky et la but cul-sec. Il reprit son discours, comme pour se justifier: "Ne me jugez pas, je sais, si ma fille était là, elle m'aurait engueulé et dit que je suis irresponsable, sauf qu'elle n'est plus là. Je ne sais pas si vous savez ce que ça fait de perdre un enfant mais je vous jure que c'est pire que de perdre un parent et je peux me permettre de le dire car j'ai vécu les deux... Je savais que je devrais passer par là le jour où elle m'a dit qu'elle ne voulait plus se battre. Je m'en souviens comme si c'était hier. Comme tous les matins, elle descendait des escaliers sauf que, ce jour-là, elle ne chantait pas comme à son habitude. Ses yeux rougis par les larmes fixaient son téléphone. Toujours les même insultes, toujours les mêmes gamins irrespectueux. Comme tous les matins, je lui ai demandé si elle avait bien dormi, si elle allait bien. Elle m'a répondu :" Papa, Je n'en peux plus. Je n'y arrive plus. Je ne veux plus me battre contre la fatalité..." Ensuite, elle a éclaté en sanglots. Ma petite fée n'avait plus la joie de vivre. Ça m'a fait mal de la voir comme cela. Tout ça, à cause d'un petit imbécile qui a lancé une rumeur qui se trouvait être véridique sauf qu'il ne connaissait pas les circonstances. J'en ai marre alors je vais vous le dire. OUI, ma fille était enceinte à 13 ans et oui, elle a avorté sauf qu'elle n'est pas tombée enceinte avec son consentement. Mon connard de frère l'a violée. Elle est tombée enceinte de son oncle. Elle en a souffert. Si ma femme n'avait pas été là, cet enterrement se serait fait 7 ans plutôt." L'homme s'arrêta quelques minutes. L'assemblé était choquée, la plupart des personnes ici présentes ne connaissait pas la véritable histoire de cette jeune fille. Les plus sensibles pleuraient avec le père de la défunte, les plus forts restaient stoïques. Tous se sentirent un peu coupable car tous croyait que le fils Daniel disait la vérité quand il la traitait de prostituée. Le père lança un regard désolé à sa femme qui voulait qu'on taise cette histoire. Puis il repartit dans son piteux bar pour oublier, encore...